Israël-Palestine : vers une reprise du dialogue ?

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Le voyage de Barack Obama en Israël n’a pas donné lieu à une relance du processus de paix, bloqué depuis plusieurs années. Ce n’était pas son objectif et nul ne s’attendait à l’annonce de pourparlers sur la création d’un Etat palestinien. Mais la visite du président américain, la première depuis son arrivée à la Maison-Blanche en 2009, a permis au moins l’esquisse d’une reprise du dialogue sur ce sujet controversé. C’est un résultat modeste, dira-t-on, mais il était difficile d’espérer mieux tant les conditions d’un règlement apparaissent aujourd’hui hors d’atteinte, vingt ans après les accords d’Oslo, dont les promesses n’ont pas été tenues.

Le premier mandat de Barack Obama s’est soldé, en ce domaine, par un échec complet. Faute d’avoir pu obtenir de Benyamin Nétanyahou le gel de la colonisation en Cisjordanie, le président américain s’est pratiquement désengagé du dossier, avouant son impuissance face à la mauvaise volonté du premier ministre israélien et son incapacité à passer des discours aux actes. S’il a fait un geste en se rendant en Israël dès le début de son second mandat, il a renoncé à mettre sur la table un nouveau plan de paix, au risque d’affaiblir la crédibilité de sa démarche.

Benyamin Nétanyahou, pour sa part, n’entend pas mettre fin à sa politique de colonisation. Sa reconduction à la tête du gouvernement au lendemain de son succès électoral n’est pas de nature à le faire changer d’avis. La question palestinienne a été largement absente de la campagne et la coalition que vient de former le premier ministre n’est pas portée à la remettre sur le tapis, l’un de ses principaux alliés, le nationaliste Naftali Bennett, considérant comme un « suicide politique » l’hypothèse d’un Etat palestinien. Bref, de part et d’autre, on manifeste peu d’empressement à rouvrir le dossier, au moment où les Palestiniens sont eux-mêmes paralysés par leurs divisions.

Pourtant, à l’issue de cette visite, une reprise du dialogue semble possible. Entré dans son second et dernier mandat, sans perspective de réélection, Barack Obama a les mains plus libres et la volonté d’effacer l’échec de son premier mandat. Les déclarations qu’il a faites devant un public de jeunes Israéliens à Jérusalem attestent de sa détermination. « Il n’est pas juste qu’un enfant palestinien ne puisse grandir dans un Etat qui est le sien », a-t-il dit, en affirmant que « la possibilité d’une solution à deux Etats continue d’exister ».

S’il a changé de tactique en choisissant de s’adresser à l’opinion publique israélienne plutôt qu’aux dirigeants du pays, il n’a pas changé de conviction. « Tout comme les Israéliens ont bâti un Etat dans leur patrie, les Palestiniens ont le droit d’être un peuple libre sur leur propre terre », a-t-il lancé. On ne saurait être plus clair. Barack Obama n’a pas avancé de propositions concrètes pour relancer le processus de paix mais il a fait entendre des paroles fortes qui ne sauraient rester sans lendemain.

Benyamin Nétanyahou peut-il recevoir ce message ? Quoique vainqueur des élections, le premier ministre en est sorti affaibli, ce qui peut le rendre plus réceptif. S’il a dû accueillir Naftali Bennett dans son équipe ministérielle, il s’est séparé de deux partis ultranationalistes avec lesquels il était traditionnellement allié. Surtout, il a ouvert son gouvernement au centriste Yaïr Lapid, nouveau venu sur la scène politique, ancien présentateur de télévision considéré comme un partisan du dialogue, et à l’ancienne ministre des affaires étrangères Tzipi Livni, qu’il a chargée du dossier des relations israélo-palestiniennes. Ce sont des signes positifs, comme l’est la référence faite par Benyamin Nétanyahou à la création d’un Etat palestinien.

La négociation est loin d’être remise sur les rails. Les incertitudes sont nombreuses sur la manière d’y parvenir. Elles subsistent aussi sur les intentions réelles de Barack Obama et de Benyamin Nétanyahou. Mais l’amorce d’un changement est perceptible. Il appartient à ceux qui, d’un côté comme de l’autre, aspirent à la paix, de le confirmer et, le moment venu, de l’amplifier.