Donald Trump dans le bourbier moyen-oriental

Dans le conflit qui oppose l’Arabie saoudite et les Emirats arabes unis d’une part, le Qatar d’autre part, le président américain Donald Trump s’est rangé aux côtés des premiers, par hostilité à l’Iran. Ancien ambassadeur de France à Téhéran, François Nicoullaud a analysé pour la Fondation Jean-Jaurès, la stratégie américaine au Moyen-Orient.

Donald Trump au sommet arabo-islamique de Riyad
J.Ernst/Reuters

Ali Khamenei, guide de la révolution islamique, n’a pas raté Donald Trump au lendemain du sommet de Riyad : "le Président américain se tient aux côtés de dirigeants d’un système tribal et arriéré, fait la danse du sabre, mais critique l’élection iranienne qui réunit 40 millions de votants…" Et de fait, ce sommet qui, sur deux jours, les 20 et 21 mai, s’est déroulé en trois formats : sommet entre les États-Unis d’une part et l’Arabie saoudite, puis les Pays du Golfe, et enfin les pays arabes d’autre part, risque de laisser peu de souvenirs.

Certes, si l’on se plonge dans les déclarations et les communiqués produits par la rencontre, l’on y voit que les participants ont inauguré un Centre de ciblage du financement du terrorisme, basé à Riyad, et adopté une déclaration dans laquelle figure notamment l’intention de créer une "Alliance stratégique du Moyen-Orient", à mettre en place d’ici à 2018. Ils y saluent aussi le lancement d’un "Centre global de lutte contre le terrorisme", destiné à "combattre l’extrémisme intellectuel, médiatique et digital, et à promouvoir la coexistence et la tolérance entre les peuples." Ils se félicitent enfin de" la disposition d’un certain nombre de pays islamiques à participer à la Coalition militaire islamique de lutte contre le terrorisme", fondée à Riyad en 2015, "et à constituer une force de réserve de 34.000 hommes en vue d’appuyer, autant que de besoin, des opérations contre des organisations terroristes en Irak et en Syrie." Reste à voir comment vont se concrétiser ces intentions.

La réunion a quand même été marquée par un discours se voulant fondateur de Donald Trump, à l’instar du discours du Caire prononcé par Obama en direction des monde arabe et musulman au début de son premier mandat. Ce discours axé sur un objectif, "vaincre les forces du terrorisme", a débouché sur une formule familière aux Américains : "Ceci est un combat entre le bien et le mal". Quant à la façon de le conduire, deux points ont émergé : le premier, faisant écho aux propos adressés à plusieurs reprises par le Président américain aux membres de l’OTAN, est que "l’Amérique ne peut y être seule, les États de la région doivent y prendre leur part". Le deuxième est que les États-Unis ne saisiront pas cette occasion "pour dire aux autres peuples comment vivre, ce qu’ils doivent faire, ce qu’ils doivent être, comment ils doivent prier". "Nous cherchons des partenaires, pas la perfection" a ainsi souligné Donald Trump, comme pour exonérer les États présents de leurs faiblesses, et faire passer le message qu’il ne serait pas trop exigeant en matière de références démocratiques et de droits de l’Homme.

L’Iran, ennemi principal

Quant à l’incarnation du terrorisme, Donald Trump la voit sans surprise dans "l’État islamique, Al Qaeda, le Hezbollah et le Hamas" et derrière eux, venant en point d’orgue dans son discours, "le gouvernement iranien", qui leur fournit " refuge, soutien financier, et statut social leur permettant de recruter". "Du Liban à l’Irak et au Yémen" a poursuivi Trump, "l’Iran finance, arme et entraîne les terroristes, les milices et autres groupes extrémistes qui répandent la destruction et le chaos dans toute la région. Durant des décennies, l’Iran a alimenté les brasiers des conflits sectaires et de la terreur. C’est un gouvernement qui parle ouvertement de meurtres de masse, vouant Israël à la destruction, criant mort à l’Amérique, et œuvrant à la ruine de beaucoup des dirigeants et des nations se trouvant en cette salle. Mais les interventions les plus tragiques et les plus déstabilisantes de l’Iran se déroulent en Syrie. Appuyé sur l’Iran, Assad a commis des crimes innommables…" Voilà donc, si l’on avait encore des doutes, désigné l’ennemi principal des États-Unis au Moyen-Orient. "Toutes les nations ayant une conscience doivent œuvrer ensemble pour isoler l’Iran, l’empêcher de financer le terrorisme, et prier pour le jour où le peuple iranien aura le gouvernement juste et droit qu’il mérite." Le projet de Regime Change, déjà caressé par Bill Clinton puis George W. Bush, mis en revanche de côté par Barack Obama, apparaît donc bien comme l’objectif ultime de la croisade de Donald Trump.

Guère de solidarité, donc, avec l’Iran quand il est frappé par ce même terrorisme. Quelque deux semaines après le sommet de Riyad, Da’esh attaque au cœur de Téhéran, faisant une quinzaine de morts. La Maison blanche diffuse alors une déclaration du Président, faisant état de son "affliction" et "ses prières pour les victimes innocentes", mais soulignant aussi que "les États qui parrainent le terrorisme risquent de se retrouver victimes du mal qu’ils encouragent". Cette déclaration est aussitôt qualifiée de "répugnante" par Mohammad Javad Zarif, ministre iranien des Affaires étrangères.

L’apparition d’une nouvelle crise

Pour en revenir à la réunion de Riyad, l’idée avancée par un certain nombre selon laquelle elle donnait le coup d’envoi d’un "OTAN du Moyen-Orient" réunissant le monde arabe et les États-Unis pour faire pièce à l’Iran, a presque aussitôt subi un sérieux revers lorsque la querelle couvant depuis longtemps entre l’Arabie saoudite et les Émirats arabes unis d’une part, le Qatar d’autre part, a éclaté au grand jour. Le 5 juin, ces deux premiers pays, bientôt suivis de l’Égypte, de Bahreïn, du Yémen, de la Mauritanie, des Comores et des Maldives, rompent brusquement leurs relations diplomatiques avec le troisième. Entre autres mesures coercitives, l’Arabie saoudite, les Émirats et Bahreïn ferment leur espace aérien aux avions de Qatar et expulsent les ressortissants qataris de leur territoire. L’Arabie saoudite instaure en outre un début de blocus en coupant la seule voie terrestre donnant au Qatar un contact avec l’extérieur. Les Émirats interdisent leurs ports aux navires qataris. Ceci, à première vue, suite à la publication d’une dépêche faisant état de propos, ensuite contestés, de l’émir du Qatar marquant de la sympathie pour l’Iran, le Hezbollah, le Hamas… et Israël. Mais ceci n’a été que la goutte faisant déborder le vase. Le soutien constant du Qatar aux Frères musulmans, l’influence exercée dans tout le monde arabe par la chaîne de télévision qatarie Al Jazeera, nourrissant la contestation contre les pouvoirs établis, sont au cœur de la crise.

L’affaire soulève aussitôt une vague d’inquiétude dans la région et au-delà. L’Iran commence à alimenter le Qatar en produits de première nécessité. La Turquie, elle, se propose d’y envoyer des troupes de protection. Quant à la réaction américaine, elle est plus que désordonnée. Alors que le Département d’État émet les propos d’usage appelant à la levée de l’embargo et au raccommodement des parties, Donald Trump, lui, twitte : "lors de mon récent voyage au Moyen-Orient, j’ai dit qu’il n’était plus question de financer l’idéologie radicale. Les dirigeants ont pointé du doigt le Qatar. Et voilà !". Il insiste encore trois jours plus tard en une conférence de presse : "…nous devons arrêter le financement du terrorisme. Le Qatar, malheureusement, a été historiquement un fondateur du terrorisme à très haut niveau". Savait-il que le Qatar accueille la plus grande base américaine du Moyen-Orient, avec 11.000 personnes ? Ignore-t-il le rôle de l’Arabie saoudite dans la genèse et le développement d’Al Qaïda (sans parler du rôle de la CIA) ? il avait pourtant au cours de sa campagne accusé les Saoudiens d’être mêlés aux attentats du 11 Septembre… Les promesses saoudiennes d’achat de 110 milliards d’armement américain ont-elles joué dans ce soutien sans faille à la ligne de Riyad ? Mais après tous ces propos présidentiels, les États-Unis viennent de vendre pour 12 milliards de dollars d’avions de combat F15 au Qatar… Comprenne qui pourra.

Trump et les guerres du Moyen-Orient

Au-delà des mots, quelle forme prennent les interventions de l’Amérique au Moyen-Orient depuis l’inauguration de Donald Trump ?

Manifestement, la méthode d’Obama, qui tenait la bride courte aux militaires, et veillait à ne pas être débordé par des initiatives dont il n’aurait pas pesé à l’avance toutes les conséquences possibles, n’est pas celle de son successeur. Une semaine après son inauguration, celui-ci donne son feu vert à une opération de commando au Yémen, sans trop se pencher sur ses détails. Elle tourne au fiasco. Si quelques membres d’Al Qaeda sont en effet neutralisés, le cadre de cette organisation qui était visé parvient à s’échapper, et de nombreux civils, y compris des enfants, sont tués, ainsi qu’un membre du commando. Depuis, l’armée américaine a cependant été autorisée à être présente au sol pour conseiller les troupes loyales au gouvernement yéménite.

Sur le théâtre irako-syrien, il est significatif que Trump ait, en avril dernier, laissé à son secrétaire d’État à la défense, James Mattis, le soin de déterminer le montant nécessaire de troupes sur le terrain. Et il vient de prendre la même décision pour l’Afghanistan. Depuis quelque temps, le Département d’État à la défense ne communique d’ailleurs plus de chiffres et de détails sur ces sujets. Les commentateurs n’ont pas manqué alors de relever le risque de "mission creep", c’est-à-dire de voir les forces américaines, à la poursuite de résultats insaisissables, peu à peu entraînées de plus en plus profondément dans des conflits sans fin.

En Afghanistan, l’armée a utilisé à la mi-avril, la plus puissante bombe de l’arsenal américain, encore jamais mise en œuvre à ce jour, pour frapper des troupes de Da’esh apparemment installées dans des bunkers et des tunnels près de la frontière avec le Pakistan. L’opération a-t-elle été personnellement autorisée par Donald Trump ? Celui-ci, interrogé par les journalistes, se dérobe : "chacun sait exactement ce qui s’est passé. Ce que je fais, c’est donner l’autorisation aux militaires. Nous avons les plus grands militaires du monde, et ils ont fait leur travail, comme d’habitude. Ils ont reçu une autorisation totale, et voilà ce qu’ils font, franchement, voilà pourquoi ils ont si bien réussi récemment. Regardez ce qui s’est passé ces dernières huit semaines, comparez-les avec les dernières huit années. Il y a une extraordinaire différence…" De fait, il semble bien que la décision ait été prise au niveau du général John Nicholson, responsable du théâtre d’opération afghan.

Les dilemmes syriens

Donald Trump a en revanche donné sans conteste son feu vert personnel au tir de 59 missiles Tomahawk sur la base aérienne syrienne de Shayrat, le 6 avril, en punition de l’attaque chimique sur la petite ville de Khan Sheikhoun, imputée à partir de lourdes présomptions au régime syrien. La décision n’allait pas de soi. Durant sa campagne, Donald Trump avait mis en valeur le risque de voir Assad, s’il était poussé vers la sortie, "remplacé par pire que lui". Fin mars, l’ambassadrice américaine aux Nations-Unies, Nikki Haley, déclarait que l’élimination d’Assad n’était plus une priorité. Son ministre, Rex Tillerson, affirmait peu après que le futur d’Assad serait "décidé pat son propre peuple". Les photographies des enfants gazés à Khan Sheikhoun – "des enfants innocents…de beaux bébés cruellement assassinés" selon les termes de Donald Trump – commencent à changer la donne. La décision de frapper est prise peu après que l’avion du Président a atterri à Palm Beach, où Donald Trump se rend pour accueillir Xi Jinping, le Président chinois. Celui-ci est informé de l’opération au dessert.

Mais cette affaire ne change rien au rapport de forces sur le terrain. La grande question à l’approche de l’été, alors que la chute de Mossoul se confirme, est de savoir qui pourra se targuer de la prise de Raqqa, capitale de Da’esh en Syrie, et de Deir Ez-Zor, autre important bastion de l’organisation de l’état islamique, situé à 160 kilomètres au sud-est de Raqqa. Donald Trump souhaiterait évidemment beaucoup porter à son crédit la chute de Raqqa qui sonnerait la fin de l’État islamique, du moins comme entité territoriale. Les États-Unis soutiennent donc avec des moyens de plus en plus importants, ainsi que des forces spéciales, une coalition de Kurdes et d’Arabes syriens qui est en bonne position pour s’emparer de la ville. Le gouvernement syrien, appuyé par des milices formées et encadrées par l’Iran, ainsi que par le Hezbollah libanais, vise dans l’immédiat Deir Ez-Zor, à la lisière de laquelle il est parvenu à conserver une garnison retranchée, assiégée depuis de longs mois par Da’esh. À noter que ni les États-Unis, ni la Syrie, et donc ni la Russie, ni l’Iran, ne souhaitent voir la Turquie, dont les troupes ont pourtant pénétré dans le nord de la Syrie, se mêler de ces affaires.

Le grand désert de l’est syrien, situé à l’extérieur de la "Syrie utile", où se trouvent Raqqa et Deir Ez-Zor, est donc en ce moment le terrain de grandes manœuvres. Il apparaît à présent comme un espace d’intérêt stratégique, notamment dans la mesure où il assure la continuité territoriale entre Syrie et Irak, sujet important à la fois pour Bachar el Assad et pour l’Iran. Un groupe de rebelles, appuyé par des forces spéciales américaines, tient At-Tanf, l’un des points de passage routier entre les deux pays, point important car il conduit non seulement à Bagdad mais aussi à la route reliant l’Irak et la Jordanie. Assad et les Iraniens ont donc tenté de s’en emparer, mais leurs colonnes ont été à quatre reprises arrêtées par des frappes aériennes américaines. Interventions lourdes de sens, puisque, mise à part une frappe présentée comme une erreur du temps d’Obama, c’était la première fois que les États-Unis s’en prenaient à l’armée syrienne et à ses alliés. Du coup, ces forces loyales au régime ont bifurqué plus au nord pour atteindre la frontière avec l’Irak. Les milices shiites irakiennes étant elles-mêmes en voie d’éliminer les forces de Da’esh de l’autre côté de la frontière, les forces rebelles et américaines présentes à At Tanf risquent de se retrouver encerclées, et plutôt en mauvaise posture. Dans l’immédiat, les Américains ont renforcé leur présence à At-Tanf.

Le moment de vérité approche donc, où les Américains devront faire savoir s’ils laissent Assad reprendre le contrôle de l’ensemble de son pays, auquel cas leurs troupes au sol devront à un moment ou à un autre s’effacer, ou s’ils entendent au contraire conserver en Syrie, avec les forces qui leur sont fidèles, des gages territoriaux pouvant ouvrir la voie à une fragmentation du pays.

De nouveau, l’Iran

Dans ce choix, l’analyse des avantages que pourront tirer la Russie et l’Iran de telle ou telle configuration jouera un rôle décisif dans les prises de décision de Donald Trump. Celui-ci a un moment espéré qu’il parviendrait à régler le sort de la Syrie avec Poutine, en éliminant l’Iran du jeu. Il a rapidement pris conscience du caractère illusoire d’un tel projet. Sa crainte doit être à présent que l’Iran émerge comme le grand vainqueur de l’épisode syrien, comme il l’a été de l’intervention américaine en Irak, où l’élimination de Saddam Hussein et la promotion de la démocratie ont permis à la majorité démographique chiite de prendre les commandes du pays.

En même temps, Donald Trump a compris le risque sérieux qu’il y aurait pour l’Amérique à casser l’accord nucléaire conclu en juillet 2015 à Vienne entre l’Iran et les cinq membres permanents du Conseil de sécurité, plus l’Allemagne. Jusqu’à ce jour, l’Iran a respecté sa part des obligations contenues dans l’accord et n’a donné prise à aucune sérieuse mise en cause. L’Europe, la Russie, la Chine, d’autre part, manifestent régulièrement et fermement leur attachement à l’accord. Ce serait l’Amérique qui se retrouverait dans le mauvais rôle, et finalement isolée sur la scène internationale, en cas de rupture. Donald Trump voit donc bien la difficulté à réaliser ce qu’il avait laissé espérer au fil de sa campagne, la fin d’un accord dénoncé comme "le pire qu’ait jamais conclu l’Amérique". Son administration a même dû accomplir des gestes positifs pour maintenir l’accord en vie, puisque les États-Unis doivent, à intervalles réguliers, renouveler les waivers, ou exemptions, appliquées à beaucoup de leurs sanctions contre l’Iran, en vue de tenir les engagements qu’ils ont pris dans l’accord de Vienne. Pour masquer, autant que possible, cet embarrassant changement de cap, Donald Trump en est réduit à hausser à la voix, à multiplier les attaques verbales contre l’Iran, et même à prendre à son égard quelques sanctions additionnelles, à vrai dire sans conséquences, mais qui lui permettent de se mettre au diapason des autres adversaires déclarés de Téhéran : l’Arabie saoudite, on l’a déjà vu, et bien entendu Israël. Mais la difficulté pour Donald Trump est alors de ne pas être entraîné trop loin, c’est-à-dire à la rupture de l’accord de Vienne : à Washington même, par une classe politique violemment hostile à l’Iran, et qui rêve de sanctions encore plus dures, toujours plus dures, comme le montrent les projets en cours de discussion au Congrès ; et aussi par ses amis au Proche et Moyen-Orient.

Et enfin, Israël

L’album de Donald Trump au Moyen-Orient ne serait pas complet si n’y figurait pas Israël. Après le sommet de Riyad, Trump s’est rendu à Jérusalem, notamment pour y rencontrer le Premier ministre Netanyahu et pour se rendre au Mur des lamentations, ainsi qu’à Bethléem, où il a vu Mahmoud Abbas. Trump et Netanyahu se sont retrouvés sans difficulté pour pointer du doigt l’Iran. Sur le reste, les choses ont été plus floues. Rien n’a été dit sur le transfert de l’ambassade des États-Unis de Tel Aviv à Jérusalem, promis pendant la campagne, mais dont chacun pressent les crises incontrôlables qu’un tel geste pourrait soulever. Donald Trump s’est flatté de pouvoir donner un nouvel élan au processus de paix entre Israéliens et Palestiniens, mais s’en est tenu à de vagues formules quant aux détails, demandant par exemple à Netanyahu de "faire preuve de retenue pour un petit moment sur la colonisation" ou disant qu’il envisageait aussi bien une solution à deux États qu’à un État. "J’aime la solution qu’aiment les deux parties. Je suis heureux avec celle qui plaît aux deux parties. Je peux vivre avec l’une et l’autre" a ainsi lâché Donald Trump. L’on comprend que ses auditeurs l’aient quitté plutôt perplexes.

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Combien de temps le Président américain pourra-t-il ainsi tenir, entre propos à l’emporte-pièce, vagues formules, volte-faces, décisions d’un jour, sauts et culbutes ? Le Moyen-Orient, qui s’est imposé comme un piège et un défi à tous les récents présidents des États-Unis depuis Jimmy Carter, n’est pas en voie de se montrer plus tendre pour Donald Trump. Celui-ci avait cru initialement pouvoir se laver les mains de ce qui s’y passait. C’était l’époque de l’"America first". Le voilà aspiré par le tourbillon des crises qui balaient la région. Pour le moment, le drame majeur, frappant de plein fouet, lui a été épargné. Comment se comporterait-il en de telles circonstances ? Dans quelle direction pourrait-il alors entraîner l’Amérique, ses alliés, ses amis ? Les institutions américaines seraient-elles appelées à jouer les garde-fous ? En auraient-elles le temps ? Telles sont les questions qui inquiètent les observateurs. En tout état de cause, le temps paraît lointain où l’on prédisait qu’avec l’apparition des sources d’énergie non-conventionnelles, notamment des pétroles et des gaz de schiste, et la montée en puissance de l’Asie, le Moyen-Orient ne mériterait plus qu’on y investisse en hommes, en moyens, en diplomatie, et glisserait peu à peu vers l’insignifiance. Il reste, et restera encore longtemps, au centre des préoccupations du monde, et un point de fixation majeur pour l’Amérique…et donc pour Donald Trump.

(publié par la Fondation Jean Jaurès le 25 juin 2017)