Mise en garde israélienne contre l’Iran et ses alliés

Benjamin Netanyahu, accompagné de son ministre de la Défense Avigdor Lieberman et du chef d’Etat-major des armées Gadi Eizenkot, a inauguré, dimanche 2 avril à la base aérienne de Hatzor dans le sud d’Israël, le système de missiles anti-missiles destiné à répondre à toute attaque de missiles de courte, moyenne et longue portée (« Fronde de David » contre les roquettes, « Dôme d’acier » contre les missiles et « Arrow » contre les missiles balistiques). Israël ne tolérera pas l’installation de forces iraniennes ou alliées à l’Iran à ses frontières.

F-15 israélien envoyant des leurres pour contrer les missiles

Depuis l’installation de Donald Trump à la Maison Blanche, Benjamin Netanyahu est plus déterminé que jamais à empêcher l’installation de bases militaires iraniennes permanentes à proximité d’Israël, notamment en Syrie. Le renforcement des capacités militaires du Hezbollah libanais sur les chaînes de montagnes qui surplombent la vallée du Jourdain et la Galilée est également une préoccupation majeure de l’Etat-major israélien.

Montée des tensions

Vendredi 17 mars, quatre avions israéliens ont traversé l’espace aérien libanais durant la nuit et ont effectué un raid sur une base aérienne syrienne située entre les villes de Homs et de Palmyre dans le centre de la Syrie. Un missile sol-air a été déclenché du territoire syrien après le repli des avions israéliens et il a été aussitôt contré par le système Arrow. Des éclats ont atteint la Jordanie toute proche et les habitants israéliens de la vallée du Jourdain ont été réveillés par une très forte déflagration.
Quelques heures plus tard, Israël effectuait un raid sur une position militaire syrienne sur les hauteurs du plateau du Golan. Un responsable d’une unité paramilitaire affidée du régime de Damas a été tué. Dimanche 19 mars, ce sont des installations militaires du Hezbollah qui ont été visées sur les hauteurs de la chaîne montagneuse de l’anti-Liban frontalière de la Syrie.
Entretemps le Kremlin, qui intervient en Syrie depuis septembre 2015, avait convoqué l’ambassadeur israélien à Moscou pour le mettre en garde contre toute attaque contre l’armée syrienne ou l’armée russe.
Ces événements surviennent huit jours après une visite à Moscou de Benjamin Netanyahu où il a rencontré Vladimir Poutine, attirant son attention sur les dangers d’une installation permanente de forces militaires iraniennes en Syrie, notamment d’une base navale qui jouxterait la base militaire russe près de Tartous.
Selon les informations en provenance de Moscou, le président russe a cherché à rassurer son hôte et à minimiser le rôle de Téhéran en Syrie.
Quelques jours plus tard, le mardi 28 mars, Vladimir Poutine recevait son homologue iranien Hassan Rohani en visite officielle à Moscou. D’importants accords commerciaux ont scellé l’alliance des deux puissances qui parrainent le régime de Bachar el-Assad.
En avril 2016 déjà, un incident aérien avait mis aux prises des avions russes et israéliens au-dessus de la côte syrienne sans incident majeur. L’avertissement était sérieux mais avait été minimisé. L’incident du 17 mars est plus grave même si, de part et d’autre, on cherche à en réduire la portée. Il est en effet douteux qu’un missile, même s’il a été tiré après le repli des avions israéliens, ait été lancé sans l’aval de Moscou.

Rupture israélo-russe

L’avertissement est d’autant plus significatif qu’un modus vivendi avait été trouvé entre Vladimir Poutine et Benjamin Netanyahu – ils se sont rencontrés à quatre reprises depuis 2015 – pour autoriser l’aviation israélienne à empêcher toute tentative de menaces contre le territoire israélien. Tsahal ne s’était pas privée de faire usage de cette « autorisation » et avait mené plusieurs opérations contre le Hezbollah sur le plateau du Golan ou au sud de Damas. L’accord excluait l’armée syrienne et a fortiori les troupes russes présentes en Syrie.
L’opération aérienne d’Israël le 17 mars concernait une base militaire aérienne syrienne sous parapluie russe. Il y a eu donc rupture de l’accord, même si officiellement aucun des deux protagonistes ne veut en faire un casus belli.

L’influence de Téhéran

Moscou et Téhéran sont alliés. C’est le général Ghassem Suleimani, chef de la force al Quds, bras armé des Gardiens de la révolution pour les opérations extérieures (Irak, Syrie, Liban et Yémen) qui est allé à Moscou en mai et en juillet 2015, à la demande du Guide Ali Khameni, demander à Vladimir Poutine d’intervenir militairement en Syrie.
Ce sont les combattants du Hezbollah, encadrés par les forces de Ghassem Suleimani et bénéficiant de l’appui aérien russe, qui ont remporté la bataille d’Alep et permis à Bachar el-Assad de renverser la situation en décembre 2016, à la veille de la passation des pouvoirs à la Maison Blanche. Conséquence immédiate : la nouvelle administration américaine a déclaré récemment, par la bouche du secrétaire d’Etat Rex Tillerson, que « le départ de Bachar el-Assad n’est pas une priorité ». La nouvelle administration américaine a en effet pour priorité l’élimination de Daech et le rapprochement avec les monarchies arabes du Golfe et l’Egypte.
En ce qui concerne Israël, Washington a l’intention de trouver un accord avec les Palestiniens. Le rapprochement entre les monarchies arabes du Golfe et Israël, même s’il n’est pas affiché publiquement, est un secret de polichinelle. Les ingérences de Téhéran dans les différents conflits et l’accord sur le nucléaire qui inquiète les pays arabes autant qu’Israël sont les causes principales de ce mouvement. Le départ de Barack Obama a conforté les deux parties qui entretenaient des relations tendues avec l’ancien président américain.
La stratégie offensive de Benjamin Netanyahu vis-à-vis de l’Iran et ses affidés est d’un tout autre ordre. Moscou l’a bien compris. Il n’est pas certain que la Maison Blanche suive le Premier ministre israélien sur ce terrain. Car elle se retrouverait face à une crise internationale dont il lui serait beaucoup plus compliqué de s’extirper.
Mais on peut douter que Benjamin Netanyahu, qui a fixé pour priorité la réduction du rôle de Téhéran en Syrie et au Liban, prête une oreille attentive aux éventuels conseils de prudence d’une administration et d’un Congrès américains qu’il croit plus que jamais favorables à ses thèses.