Le Dragon rouge à la conquête de l’espace

Le 3 janvier 2019 le grand public découvrait la puissance du programme spatial chinois avec l’atterrissage très médiatisé – une première mondiale – de l’engin « Chang’e 4 » sur la face cachée de la Lune. Ainsi la Chine, dans sa volonté de s’affirmer comme un nouveau leader mondial, s’attaque à l’exploration spatiale et n’hésite pas à défier le pays qui occupe la première place dans le domaine : les Etats Unis. Après la Lune, Mars pourrait être la prochaine planète convoitée. Le programme spatial chinois sera sans doute celui qui proposera le plus de projets dans les années à venir.

Le module chinois Chang’e 4 s’est posé sur la face cachée de la lune le 3 janvier 2019
EPA/MAXppp

Historiquement la Chine a toujours été au second plan dans l’exploration spatiale. Elle a commencé à s’intéresser à l’espace dans les années 50 ans alors sous le régime communiste de Mao Zedong. Elle va d’abord obtenir la technologie du célèbre missile V2 allemand en 1957, puis d’autres technologies grâce à son voisin russe, pour enfin envoyer son premier satellite dans l’espace en 1970 à bord de la fusée « Long March 1 ». Durant une longue période le programme spatial chinois ne va pas faire de grandes avancées ni revêtir une importance spéciale, jusque dans les années 80-90 où la Chine recommence à s’intéresser au projet d’un vol habité. Elle profite de la chute de l’URSS pour récolter des technologies.

Le premier homme chinois dans l’espace sera finalement Yang Liwei en 2003, attestant du retard chinois par rapport aux leaders du secteur : en comparaison le premier vol spatial habité a eu lieu en 1961 pour l’URSS et les États-Unis. Ainsi pour la Chine, il faudra attendre le boom économique et la volonté de détrôner les États-Unis de leur place de leader mondial pour que le programme spatial chinois revienne au premier plan dans les années 2000.

Une démonstration de puissance

Pourquoi ? Pour les avancées pour la communauté scientifique que cela représente, les nombreuses applications dans le domaine militaire ou économique avec des satellites de toutes sortes, et surtout comme un moyen pour la Chine de démontrer sa puissance scientifique, car l’exploration spatiale requière et utilise des technologies parmi les plus avancées et contribue à l’affirmation de sa position dirigeante car elle permet d’obtenir des résultats au nom de toute l’humanité. L’exploration spatiale est un nouvel espace où défier les Etats-Unis, tenter de les détrôner, ce qui n’est pas sans rappeler la guerre froide. Bon exemple de cette rivalité, à la vue du succès de l’entreprise privée américaine « Space X » dans ce domaine, la Chine a répliqué en soutenant l’émergence de la Start-up « One Space » qui a lancé sa première fusée en 2018.

Pour rattraper son retard la Chine est très active sur le plan de l’exploration spatiale. Avec trois robots lunaires ou « rovers » envoyés sur la Lune, qui ont respectivement atterri en 2013, 2019 et 2020, et le projet d’une base lunaire permanente en cours, le pays est de loin le plus entreprenant et le plus intéressé par notre satellite, mais pas seulement : il construit sa propre station orbitale dont certaines parties sont déjà en orbite.Cette station pourrait devenir la seule si l’ISS n’était pas remplacée ou rénovée dans les prochaines années. C’est aussi le pays qui a effectué le plus de lancements de fusées ces dernières années : en 2019 par exemple la Chine est première en terme de lancements avec 34 réalisés, puis viennent les Etats-Unis avec 27 et la Russie avec 22. Enfin, il ne faut pas oublier que ce développement très rapide a un prix : un isolement total de la Chine, notamment à cause de l’opposition des Etats-Unis : tous les lanceurs utilisés sont chinois, avec des satellites chinois, des robots chinois etc…

Objectif Mars

Quel est le prochain objectif pour l’avenir de l’exploration spatiale chinoise ? Mars. Non sans rappeler une certaine course pour la Lune entre les Etats-Unis et l’URSS, Mars est devenue la planète convoitée, et le prochain objectif pour la Chine. Même si récemment nous avons beaucoup entendu parler du robot américain « Perseverance » qui s’est posé sur le sol de Mars le 18 février 2021, la Chine n’est pas loin derrière avec sa sonde « Tianwen-1 » qui est rentré dans l’orbite de mars le 10 février 2021 et qui possède à son bord un robot chinois qui devrait atterrir sur la planète rouge fin avril ou début mai à cause de contraintes technique. Pour Pékin l’objectif, en plus de l’accomplissement scientifique pour l’humanité, est de ne pas seulement rattraper son retard mais bel et bien de dépasser les autres puissances et surtout les Etats-Unis en étant les premiers à envoyer un homme sur Mars.

Cependant, alors que la Nasa annonce envoyer sa première mission habitée vers notre planète voisine en 2033 et Space X en 2024, même si ces prévisions risquent d’être reportées (surtout pour SpaceX) devant nombre d’obstacles importants, la Chine n’a toujours donné aucune prévision sur la date de l’envoi d’une telle mission, ce qui peut laisser supposer que ce n’est pas pour bientôt. Enfin il ne faut pas oublier que le programme spatial chinois ne se focalise pas exclusivement sur Mars mais possède aussi d’autres projets que l’on a déjà cité : l’établissement d’une station lunaire permanente, la construction de sa propre station orbitale, l’installation de satellites pour créer son propre service GPS indépendant de l’américain et de l’européen etc..

En conclusion même si la Chine n’a pas été dans son histoire un leader dans l’exploration spatiale, elle met désormais les moyens nécessaires pour en devenir un, ce qui correspond à sa volonté d’affirmer son rôle mondial. Plus que la course contre les Etats-Unis pour envoyer des hommes sur Mars, le programme spatial chinois sera sans doute celui qui proposera le plus de projets dans les années à venir.