Merkel chahutée à Athènes

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Qu’est allée faire Angela Merkel à Athènes ? Pour la première fois depuis le début de la crise financière et économique, la chancelière allemande s’est rendue, le mardi 9 octobre, en Grèce, provoquant des manifestations contre le « diktat » de Berlin. Les Grecs sont en effet convaincus que l’Allemagne est en grande partie responsable de leurs maux. C’est elle qui serait l’inspiratrice de la politique d’austérité qui a provoqué une baisse de plus de 25% des salaires et des retraites et une hausse de la fiscalité ; c’est elle qui serait donc à l’origine du chômage de masse qui frappe la population et en particulier les jeunes ; c’est elle qui imposerait des réformes draconiennes avant d’accepter que l’Union européenne et le FMI débloquent une aide à double tranchant ; c’est elle enfin qui doit l’équivalent de plusieurs milliards d’euros en réparation des vols et des exactions commises par les nazis pendant la Deuxième guerre mondiale.

C’est peu dire que la chancelière n’était pas la bienvenue à Athènes. Aussi peut-on se demander pourquoi elle a fait le voyage, à ce moment précis. Officiellement c’est pour apporter son appui à la politique « courageuse » du Premier ministre Antonio Samaras, arrivé au pouvoir en juin, après deux rounds d’élections durement contestées. Elle aura attendu longtemps pour manifester cette solidarité politique avec un pays membre de la zone euro. Elle n’avait pas fait le même geste envers les gouvernements du socialiste George Papandréou ou du technocrate Lukas Papademos. Au contraire : avec Nicolas Sarkozy, elle a lâché Papandréou, fin 2011, quand le chef du gouvernement grec a voulu soumettre le plan d’austérité à un référendum. La Grèce et l’Union européenne ont perdu près de deux ans dans la tentative de sauvetage d’un Etat membre de l’euro groupe et ces hésitations ont fait monter la facture. Les partenaires européens de la Grèce sont responsables de ces atermoiements, mais aussi Antonio Samaras qui reçoit aujourd’hui les encouragements d’Angela Merkel. Alors chef de l’opposition, Samaras s’est battu pendant des mois contre la politique de réforme des gouvernements grecs précédents, en menant campagne contre les programmes d’assainissement exigés par la « troïka » (Banque centrale européenne, Commission de Bruxelles et FMI).

Antonio Samaras déploie maintenant le zèle des convertis. Il n’en reste pas moins sous surveillance et la chancelière n’a apporté à Athènes aucun cadeau, mise à part l’assurance que la Grèce doit rester dans l’euro. Ce n’est pas par amour immodéré pour le berceau de la démocratie. C’est un calcul politique bien réfléchi : à moins d’un an des élections générales en Allemagne, Angela Merkel a besoin de calme sur le front européen.