Après le ’’non’’ irlandais

Malgré tous les avantages que les Irlandais ont tiré de leur appartenance à l’Union européenne, les Vingt-Sept se retrouvent aujourd’hui au même point qu’après la victoire du "non" aux référendums français et néerlandais de 2005. La première victime sera sans doute la présidence française, qui débute le 1er juillet.

Après la victoire du "non" en Irlande, Nicolas Sarkozy va devoir concentrer la prochaine présidence française de l’UE aux moyens de réparer les dégâts, au lieu de pouvoir s’attaquer aux dossiers concrets qu’il a mis à l’ordre du jour (immigration, énergie, défense…).

La première hypothèse, c’est qu’il faudra patienter quelques mois supplémentaires avant de reposer la question aux Irlandais, en espérant qu’ils se montreront plus coopératifs. C’est ce qui s’était passé après le rejet du traité de Nice. Une déclaration garantissant la neutralité irlandaise avait suffi à renverser la tendance. Cette fois, une telle méthode paraît peu probable, puisque le non a été majoritaire par hostilité à la philosophie d’ensemble du projet européen.

La deuxième solution serait de faire ce qui a été rejeté après les non français et néerlandais : des réformes à la carte, ce qu’en anglais on appelle cherry picking, autrement dit mettre en œuvre les articles du traité de Lisbonne qui ne demandent pas une réforme adoptée à l’unanimité. Ce sera peut-être le cas pour la création du service diplomatique européen mais ce sera plus difficile pour la nomination d’un haut représentant pour la politique étrangère dépendant du Conseil européen tout en étant vice-président de la Commission. Jusqu’à nouvel ordre, l’intergouvernemental et le communautaire sont strictement séparés. Il apparaît en revanche très difficile sinon impossible de nommer un président du Conseil européen pour deux ans et demi, comme prévu dans le traité de Lisbonne pour assurer une pérennité à la représentation de l’UE.

La troisième solution est plus radicale. Les Européens doivent tirer la leçon de la difficulté de plus en plus grande de réformer les traités à l’unanimité. Ils doivent penser à une autre formule. Puisque, dans l’état actuel des textes, il faut l’unanimité pour renoncer à l’unanimité, la seule issue est dès lors la création, à côté de l’Union actuelle, d’une autre institution qui ne comprendra que les Etats volontaires pour une intégration plus poussée, fondée sur des décisions prises à la majorité qualifiée et portant sur les domaines essentiels de la vie économique et sociale. D’un mal sortirait ainsi un bien. Mais quels sont les candidats pour cette intégration européenne à l’heure de l’euroscepticisme généralisé ?