Le remaniement du gouvernement, un mois seulement après sa formation, n’a pas pu plaire à la chancelière qui n’aime pas réagir à l’improviste.Mais la décision du nouveau ministre de la défense, Karl-Theodor zu Guttenberg, de remercier son secrétaire d’Etat, Peter Wichert, et son chef d’état-major des armées (CEMA), le général d’armée Wolfgang Schneiderhan, pour n’avoir pas tout dit sur l’attaque aérienne du 4 septembre 2009 près de Kunduz en Afghanistan, a augmenté la pression sur son prédecesseur Franz-Josef Jung, devenu ministre du travail après les élections de septembre. Celui-ci a démissionné un jour après, bien que, la veille, au Bundestag, il ait encore déclaré qu’il n’ait "pas commis d’erreurs"
Franz-Josef Jung était ministre de la défense quand l’attaque a eu lieu et c’est lui qui avait déclaré officiellement que les victimes de cette attaque n’étaient que „des terroristes talibans“. Or, le rapport de la police militaire allemande de Kunduz immédiatement après, dont le contenu a été publié la semaine dernière par le quotidien de grand tirage „BILD“, parle clairement de victimes „civiles“, en l’occurence des jeunes et même des enfants. Et le commandant-en-chef de la FIAS, le général américain Stanley McChrystal, avait aussi fait savoir, immédiatement après l’attaque, qu’il ne pouvait pas exclure des victimes „civiles“. Est-ce que M. Jung a parlé sans savoir ou est-ce qu’il a choisi sa réponse en fonction de sa campagne électorale qui entrait dans sa phase finale (3 semaines avant le scrutin) et qui s’avérait difficile pour lui ?
Le ministre zu Guttenberg qui avait soutenu, le 6 novembre, la thèse du CEMA selon laquelle l’attaque du 4 septembre, sur l’ordre du colonel allemand Georg Klein, était „militairement appropriée“, a déclaré devant le parlement le 26 novembre, que dorénavant, il pense que l’attaque n’était pas appropriée, sur la foi de documents qu’il n’a pas dévoilés.
La commission de défense du Bundestag a décidé de se constituer en commission d’enquête pour établir les faits devant les députés. La „star“ du gouvernement Merkel I, M. zu Guttenberg, se trouve donc tout au début du gouvernement Merkel II en face d’une commission d’enquête qui va, en fin de compte, selon les résultats des enquêtes sur le comportement des plus haut responsables de la défense en Allemagne, rétablir, voir établir, ou détruire la crédibilité des uns et des autres.
Et ceci à un moment où, selon les sondages, la participation de la Bundeswehr à la mission de l’Otan en Afghanistan ne trouve plus de majorité dans la population ; où le gouvernement s’apprête, avec la France et la Grande Bretagne, à redéfinir une stratégie commune en Afghanistan, qui être discutée à Londres à la fin janvier prochain ; où le gouvernement n’exclut pas, après la conférence de Londres, d’augmenter, comme souhaité par le président Obama, la participation de la Bundeswehr, ce qui signifie un changement du mandat à être voté par le Parlement qui vient de renouveler le mandat actuel d’un an. Dans cette phase cruciale de réorientation de la politique sur l’Afghanistan, les responsables de Berlin seront très occupés à défendre leur crédibilité, c’est-à-dire, leur capacité d’agir. „L’affaire Kunduz“ est loin d’être terminée.
Karl-Theodor zu Guttenberg a promis la plus grande transparence et son plus grand intérêt personnel à établir ce qui s’est passé. Ainsi, il se trouve lui-même en première ligne de ce „combat“ pour établir les faits du 4 septembre. Il est à souhaiter que l’intérêt du ministre et de tout responsable se porte sur l’établissement des faits, plus que sur les motivations politiciennes qui ne seront pas à exclure.