On les voit sur les grandes artères de Pékin comme dans les ruelles qui parcourent les houtong. Ils circulent avec leur bicyclette ou leur tricycle à fond plat, suivis par des échafaudages incertains de cartons, de matières plastiques, de vieux ordinateurs, de lampes, de livres, de toutes sortes de matériaux qu’ils récupèrent, chinent, achètent à bas prix. Ce sont les chiffonniers de Pékin. La plupart sont des migrants qui n’ont officiellement pas droit de cité dans la capitale. Ils sont tolérés voire reconnus parce qu’ils jouent un rôle essentiel dans le nettoyage de la ville.
Du matin au soir, ils sillonnent les rues à la recherche de tout ce qui peut être recyclé. Le commerce est bien organisé. Les chiffonniers « de base » revendent leur collecte à des semi-grossistes, équipés de camionnettes ou de camions, qui eux-mêmes sont en cheville avec des industriels du recyclage. Les cargaisons sont envoyées dans les provinces lointaines pour y être transformées. Selon la Banque mondiale, il y avait en 2005 en Chine quelque 2,5 millions de ces chineurs. A Pékin, ils évacuent 80% des appareils électroniques désuets. « Une solution technique de basse intensité, écrit le magazine The World of Chinese, mais une solution qui fonctionne. »
Les tarifs sont connus : un kilogramme de vieux papiers vaut 7 jiao, ou 7 centimes d’euro, une veille bouteille en plastique un jiao. Les vieux morceaux de polystyrène sont plus recherchés car ils se revendent plus cher. Les revendeurs, ou demi-grossistes, se tiennent aux carrefours de rues connues des habitués. En fin d’après-midi, ils entassent sur leur camionnette ce que les chiffonniers à bicyclette ont récolté pendant la journée. La recette n’est pas grasse mais un bon chiffonnier peut se faire environ 1000 yuans par mois (un peu moins de 100 €), beaucoup plus que ce qu’il aurait pu gagner dans sa campagne natale.
L’un d’eux raconte : sa journée commence à 8 heures. Il sillonne les rues à la recherche de déchets recyclables jusque vers 5 heures de l’après-midi, après s’être octroyé une petite pause déjeuner. Il déclare que la concurrence peut être vive mais n’ayant pas ni grande éducation et ni aptitude technique particulière, il reconnaît que c’est plutôt un bon job.
La reprise économique a donné un élan supplémentaire au métier. Les autorités de Pékin cherchent à nettoyer la ville de ses détritus tandis que la prospérité aidant, la classe moyenne produit de plus en plus de déchets. Sur leur tricycle, les chiffonniers contribuent, de manière certes rudimentaire, à la campagne pour une capitale « verte ».