Par principe, la Chine n’aime pas beaucoup les « révolutions de couleur » qui ont eu lieu en Europe centrale en 2003 (Géorgie) et en 2004 (Ukraine) puis en 2005 dans la république d’Asie centrale du Kirghizstan. Dans ce petit Etat de 5,3 millions d’habitants, la « révolution des tulipes » avait porté au pouvoir le président Kourmanbek Bakiev, qui s’est vite révélé être un potentat tout aussi corrompu que son prédécesseur.
Tout au long de la semaine, des émeutes ont eu lieu dans la capitale Bishkek, qui ont fait plus de soixante-dix morts et un millier de blessés. Le gouvernement intérimaire formé par l’opposition à Bakiyev, sous la direction d’une ancienne ministre des affaires étrangères, Roza Otumbayeva, a tout de suite été reconnu par la Russie. La position stratégique du Kirghizstan, qui abrite une base américaine, à Manas, par laquelle transitent la plupart des soldats américains vers l’Afghanistan, est la principale préoccupation du Kremlin.
La Chine partage ce point de vue et son principal souci est le rétablissement de l’ordre et de la stabilité chez ce voisin avec qui elle partage 1100 kilomètres de frontière. Peu lui importe la nature du gouvernement, à condition que les autorités de Bishkek ne remettent pas en cause la coopération avec elle.
Il n’en est pas question et ce n’est certainement pas dans l’intérêt de cette république d’Asie centrale qui a quelques ressources minières. Certaines sont d’ailleurs exploitées par des sociétés chinoises. Les dirigeants de Pékin se sont dit « profondément inquiets » de ce qui se passe au Kirghizstan, mais les rares commentateurs ont tout de suite ajouté que « le chaos ne remettait pas en cause les intérêts chinois dans ce pays, ni la coopération dans la lutte antiterroriste ». Le Kirghizstan fait partie du « groupe de Shanghaï », une organisation internationale qui rassemble, outre la Chine et la Russie, trois autres républiques d’Asie centrale, plus le Pakistan et l’Afghanistan, à titre d’observateurs.
La presse chinoise a fait état, à Bishkek, du pillage et de l’incendie d’un centre commercial appartenant à un de ses ressortissants. Cet immeuble abritait 26 magasins tenus par des Chinois, qui y vendaient des meubles, de l’alimentation et des articles de ménage.