Carnets de Pékin (5) : 60 millions de Chinois menacés par la sécheresse

Le cinquième volet des « carnets de Pékin » nous amène dans le sud-ouest de la Chine où une terrible sécheresse sévit depuis l’automne, menaçant directement quelque 60 millions de personnes.

Terres craquelées. Cours d’eau asséchés. Plantes rachitiques. Animaux assoiffés. Les images qui proviennent du sud-ouest de la Chine, des régions du Yunnan et de Guizhou, de la province autonome du Guangxi Zhuang ou du district de Chongqing attestent de la gravité de la situation. L’armée distribue de l’eau potable aux villageois des endroits les plus reculés, dans cette partie de la Chine encore très pauvres malgré les milliards de yuans qui y ont été investis ces dernières années. Le pouvoir fait appel à la générosité de la population. Chaque membre des organisations de jeunesse du PC chinois est instamment invité à donner une bouteille d’eau.

Au total quelque 60 millions de personnes seraient touchées par une sécheresse, qui a commencé entre septembre et novembre 2009 et qui est, selon les experts, la plus dure depuis cent ans. Parmi elles, 18 millions manquent d’eau potable et 11 millions de têtes de bétail ne peuvent plus se désaltérer. Les récoltes sont perdues ou gravement compromises. La région n’est pas le « grenier à blé » de la Chine, se sont empressées de déclarer les autorités ; elle ne contribue que pour 15% à la production nationale de céréales. Mais les plantations de thé, d’hévéas et de tabac sont touchées. La production d’hydro-électricité est également frappée, avec des effets jusque sur la ville de Canton. La sécheresse a déjà coûté 19 milliards de yuans (un peu plus de 2 milliards d’euros) de PIB.

Les autorités se veulent rassurantes. Les réserves alimentaires de la Chine sont suffisantes pour nourrir la population, même si l’objectif d’une production de 500 millions de tonnes de blé sera difficile à atteindre. Les craintes concernent les conséquences de la sécheresse sur l’inflation alors que le gouvernement essaie de contrôler la hausse des prix suscitée par la surchauffe économique.

Les critiques commencent à se faire jour contre le manque d’anticipation des autorités bien que des experts, il est vrai américains, aient prévu depuis longtemps ce risque de sécheresse. D’autres voix incriminent la recherche d’un développement intensif, sans égard pour les équilibres des écosystèmes. Le détournement des cours d’eau ou le gigantesque barrage des Trois gorges sur le Yangtse ne sont pas directement responsables de la vague de sécheresse mais les équilibres naturels et les réserves d’eau traditionnelles en ont été affectés, ce qui ne permet pas une lutte efficace contre ce fléau. En attendant la mousson qui doit arriver au mois de mai…