Carnets de Pékin (9) : les six « avantages » du système politique chinois

Le « modèle chinois » est-il exportable ou est-il un système sui generis qui ne peut s’appliquer qu’à l’empire du milieu ? Le débat n’est pas seulement académique comme le montrent ces quelques réflexions des « carnets de Pékin ».

La Chine fait la modeste tout en étant très fière de ses performances au cours des derniers mois qui ont vu les économies des grands pays industrialisés frappés par la crise. Pourquoi s’en sort-elle mieux que les autres, avec un taux de croissance qui dépasse les 8% et une contribution à la reprise mondiale que les Chinois eux-mêmes évaluent à 50% de l’effort global ?

Vu de Pékin, la réponse n’est pas seulement économique. Elle a aussi ses racines dans le système politique. Affichage de la modestie oblige, la presse chinoise s’en remet souvent à des jugements extérieurs pour souligner les « avantages » du régime. Récemment, un politologue, chinois, de Singapour, énumérait six caractéristiques principales du système politique chinois. Il n’est pas nécessaire de les approuver pour les entendre.

Premier avantage : l’existence d’un parti unique permet la définition et la mise en œuvre de politiques à long terme qui ne sont pas sujettes à l’alternance au pouvoir de forces représentant des idéologies différentes.

Deuxièmement, les autorités peuvent réagir rapidement et efficacement aux opportunités et aux défis soudains.

Trois, le système de parti unique a permis de limiter la corruption alors que celle-ci est particulièrement florissante dans les périodes de transition, voir les exemples de l’Inde et de la Russie.

Quatrièmement, le gouvernement est composé de gens plus responsables. Alors que dans les régimes démocratiques, les dirigeants sont élus pour des périodes déterminées, en Chine, ils peuvent être destitués et amenés à rendre des comptes à tout moment.

Le cinquième avantage réside dans la formation des gouvernants et la sélection des talents.

Enfin, le parti unique représente l’ensemble du peuple tandis que dans les systèmes multipartis occidentaux, chaque formation politique représente les intérêts d’une fraction de la population.

Une énumération contestable

Il est bien évident que chaque argument rapporté ici peut être retourné. Cette énumération contestable contient en elle-même sa réfutation. Le contrôle des dirigeants au plus haut niveau dans un cercle fermé, en dehors de toute publicité, aboutit à une irresponsabilité que ne compensent pas les règlements de compte entre hiérarques. C’est aussi vrai de la lutte contre la corruption qui fait les beaux jours de la presse officielle que des catastrophes naturelles dont l’ampleur est souvent accentuée par l’incurie et la vénalité des autorités en amont comme dans les phases de reconstruction.

On pourrait multiplier les exemples, ou plutôt les contre-exemples aux « avantages » développés plus haut. La preuve du pudding, c’est qu’il se mange, dit-on. La preuve du « modèle » chinois, c’est qu’il fonctionne, pourrait-on ajouter. La combinaison du pouvoir d’un seul parti avec une économie en développement fait des envieux. Cela ne veut pas dire que le « modèle chinois » — certains préfèrent l’expression « consensus de Beijing », par analogie (et opposition) avec le « consensus de Washington » de 1989 qui ouvrit l’ère du néolibéralisme —, puisse être appliqué ailleurs. Les commentateurs de Pékin les plus prudents parlent de « cas chinois » pour ne pas éveiller l’illusion que des répliques mêlant autoritarisme et marché aient une chance de réussir.