L’augmentation moyenne annuelle des émissions de CO2 dues à la combustion d’énergie est de 3,2% depuis 2000. Si depuis 1990, les pays membres de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) ont augmenté leurs émissions de CO2 dues à la combustion d’énergie de 17,4%, le reste du monde affiche une progression de 60,7%. Ceci étant dit, les pays membres de l’OCDE ont été responsables de plus de la moitié de ces émissions de CO2 jusqu’en 2004 alors que leurs populations ne représentent pas même 20% du total global.
Le monde change. Les tendances s’affirment entre les pays développés (croissance à présent lente pour un total disproportionné par rapport au reste du monde), les pays émergents (croissance récente démesurée pour des émissions qui, par habitant, sont encore souvent sous la moyenne mondiale), et les pays les moins avancés (croissance contenue pour un total très peu représentatif). Ainsi, en 1971, les trois pays les plus émetteurs de CO2 dû à la combustion d’énergie étaient les USA, la Russie et l’Allemagne. En 1990, les USA étaient toujours largement en tête de ce classement, suivis par la Chine et la Russie. En 2008, la Chine est le premier émetteur suivi par les USA et l’arrivée de l’Inde dans le top 3.
Les fossés se creusent
A titre d’exemple, en 2007, l’Australie a émis deux fois plus de CO2 dû à la combustion d’énergies fossiles que l’ensemble des personnes qui peuplent l’Afrique subsaharienne non émergente. A l’heure actuelle, cette part du continent abrite 11,4% de la population mondiale pour 0,6% des émissions liées aux combustibles fossiles.
La célérité avec laquelle la Chine augmente ses émissions de CO2 dues à la combustion d’énergie est telle (+426 106 tonnes CO2 entre 2006 et 2007) que l’ensemble des efforts de réductions de l’UE-27 entre 1990 et 2007 (-133 106 tonnes CO2) a été totalement annulé par seulement 16 semaines d’accroissement des émissions de CO2 chinoises en 2007.
Cependant, il est impératif de ramener ces chiffres en « émissions de CO2 dues à la combustion d’énergie par habitant ». Un constat simple s’impose à nous : en 2007, un être humain est responsable d’émissions de 4,4 tonnes CO2 par an, soit 10% de plus qu’en 1990. Mais un habitant d’un pays de l’OCDE (11 tonnes CO2) pollue toujours quatre fois plus qu’un résident du reste du monde (2,7 tonnes CO2). Ainsi, un Américain (19,1 tonnes CO2) émet l’équivalent de deux Belges, ou de quatre Chinois, ou de seize Indiens, ou encore de 80 Africains …
Dès lors, on peut se réjouir de constater que les émissions de CO2 dues à la combustion d’énergie par Belge aient diminué de 7,8% entre 1990 et 2007, et s’effrayer de voir ces mêmes émissions exploser au Bénin (+608%). Il n’empêche qu’à l’heure actuelle, les 300 000 habitants ma ville (Liège) et de sa périphérie directe émettent toujours autant de CO2 que tout le Bénin (9 millions de personnes) !
Justice climatique
Pour lancer les négociations de Copenhague, l’Europe s’est engagée à faire des efforts importants de réduction des émissions de gaz à effet de serre (GES), soit -20% ses émissions de GES en 2020 par rapport à 1990, tout en annonçant un effort de réduction possible de 30% de ses émissions pour autant qu’un accord global ambitieux soit signé à l’issue de la Conférence. Cependant, les autres pays développés, dont plusieurs ont refusé d’adhérer au Protocole de Kyoto ou n’ont pas respecté leurs engagements, hésitent à aller plus loin.
A l’opposé, le G77 (pays du Sud) souligne la responsabilité historique des pays développés dans les émissions anthropiques de GES, réclame une « justice climatique » avec la mise en place de mécanismes de compensation et d’adaptation aux effets des changements climatiques et exige des pays du Nord une réduction de 40% de leurs GES d’ici 2020 par rapport à 1990. Le G77 se base ainsi sur les conclusions scientifiques du dernier rapport du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (Giec) qui estime que, pour éviter le pire, c’est-à-dire ne pas dépasser une augmentation globale des températures de 2,0 à 2,4°C d’ici à la fin du siècle, les émissions de GES doivent se stabiliser entre 2000 et 2015 puis diminuer de 50 à 85% en 2050 par rapport à 2000.
Notons que les secteurs maritimes et aériens ne sont actuellement pas soumis à des efforts de réduction de GES. Or, leurs émissions annuelles en 2007 ne sont pas négligeables, avec (…) près de quatre fois les émissions de l’Afrique subsaharienne non émergente pour ce qui est du transport maritime ou plus que les émissions annuelles de la France pour le transport aérien. L’évolution des émissions de dioxyde de carbone pour ces deux secteurs est respectivement de 71,1% et 62,3% entre 1990 et 2007, soit une croissance annuelle de 4,2% et de 3,7%.
(…)
L’Europe est de loin l’acteur le plus dynamique quand il s’agit de lutter contre le réchauffement climatique. Lors du Protocole de Kyoto en 1997, l’Europe des 15 s’est engagée à réduire de 8% les émissions de gaz à effet de serre, ou GES, de la Communauté européenne pour la période 2008-2012, par rapport à l’année de référence 1990.
Aujourd’hui, les émissions de GES au sein de l’Europe des 15 ont diminué de 2,5%. Mais les progrès observés sont loin d’être identiques pour tous. Le dernier rapport européen sur les projections d’émissions de GES indique cependant que l’Europe respectera ses objectifs (à A l’instar de la Belgique, qui devrait atteindre le sien : -7,5 % d’émissions de GES durant la période 2008-2012).
En juin 2009, l’Europe des 27 a confirmé son engagement : réduire de 20% ses émissions de GES en 2020 par rapport à 1990, et augmenter d’autant sa production d’énergies renouvelables. A Copenhague, l’Union européenne est même prête à annoncer un effort de réduction de 30% de ses émissions, pour peu qu’un accord global ambitieux soit signé à l’issue de la conférence. Quoi qu’il en soit, l’Europe et ses 388 millions d’habitants consolide sa position de leader dans la lutte contre le réchauffement climatique.
Les progrès observés au sein de l’Union européenne masquent une très forte disparité des efforts réalisés par les Etats qui la composent. En effet, pour atteindre l’objectif « régional » de réduction de 8% de ses émissions de gaz à effet de serre pour la période 2008-2012 par rapport à 1990, différents objectifs ont été attribués aux Etats. Ces objectifs varient de -28% pour le Luxembourg (-21% pour l’Allemagne et le Danemark) à +27% pour le Portugal (+25% pour la Grèce, +15% pour l’Espagne). Une très grande disparité est également observée au sein des résultats obtenus par ces pays.
En effet, si les plus grands marchés font des efforts importants (Royaume-Uni, France, Allemagne), d’autres ne rencontreront certainement pas leurs objectifs (Autriche, Danemark, Luxembourg, Espagne, Italie). Cependant, il est heureux de constater que les politiques mises en place dans les différents pays européens donnent leurs fruits puisque de 2006 à 2007, seulement deux pays ont augmenté leurs émissions. (...) Lors des négociations sur le climat à Bonn en juin 2009, l’Union européenne a rappelé sa position qui est de réduire ses émissions de gaz à effet de serre de 20% en 2020 par rapport à 1990, notamment en augmentant l’efficacité énergétique de 20% et en augmentant de 20% la production d’énergies renouvelables.
Deuxième économie mondiale derrière les Etats-Unis, le Japon est le cinquième pays à émettre le plus de gaz à effet de serre, ou GES, au monde. En 2002, le Japon a ratifié le protocole de Kyoto. Il s’est ainsi engagé à réduire de 6% ses émissions de GES, par rapport à 1990, l’année de référence. Mais aujourd’hui, loin d’avoir diminué, ces émissions ont au contraire, augmenté de 5,8%. Le pays apparaît donc comme l’un des mauvais élèves du Protocole de Kyoto. En juin 2009, voulant rectifier le tir, le premier ministre japonais a annoncé une réduction de 15% d’émission de GES pour 2020 par rapport à … 2005, l’année noire du Japon en matière d’émission de gaz. Cela reste, malheureusement, très insuffisant au regard des diminutions préconisées par le GIEC, le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat. Cette déclaration du premier ministre japonais a, par ailleurs, été très mal accueillie par les autres signataires du Protocole de Kyoto. En septembre 2009, le Japon a rectifié sa position et propose maintenant un objectif de réduction de 25% en 2020 par rapport à 1990.
(…)
Première puissance économique mondiale, les Etats-Unis ont été détrônés en 2007 par la Chine de leur première place au classement des pays les plus émetteurs de dioxyde de carbone ou CO2, principal gaz à effet de serre. Sous la présidence de George W. Bush, les Etats-Unis ne se sont jamais engagés dans le Protocole de Kyoto. En conséquence, leurs émissions de GES ont augmenté de près de 14% depuis 1990, l’année de référence.
Aujourd’hui, avec plus de 20 tonnes d’émissions annuelles de GES par habitant, un américain pollue deux fois plus qu’un Européen ou qu’un Japonais, et … 200 fois plus qu’un Congolais ! En vue de la Conférence de Copenhague, les USA ont annoncé un objectif de réduction de GES de 16% pour 2020 par rapport à 2005, ce qui correspond à une diminution très légère par rapport à 1990.
Cependant, depuis l’élection de Barak Obama, tous les espoirs sont permis, y compris dans le domaine du réchauffement climatique. Aujourd’hui, certains Etats multiplient les initiatives. Impensable sous Bush, les USA évoquent la possibilité d’instaurer, comme en Europe, un « marché du carbone » pour donner une valeur monnayable au CO2 et inciter les entreprises aux économies d’émission de gaz.
(…) Créé en 1964 pour promouvoir les intérêts des pays dits « pauvres » auprès de l’ONU, le G77 compte 130 Etats. Ces pays « en développement », de part leur faible capacité d’adaptation, sont les plus vulnérables aux changements climatiques, qu’il s’agisse d’élévation du niveau des océans, d’inondations ou de désertification. A Kyoto, le G77 n’a pris aucun engagement chiffré par rapport à ses émissions de gaz à effet de serre, ou GES. En revanche, il a de nombreuses revendications. En effet, le G77 réclame au reste du monde des efforts importants, et demande aux pays développés de réduire leurs émissions de GES d’au moins 40% pour 2020 et d’au moins 95% en 2050 par rapport à 1990, l’année de référence. Cette position extrême est dictée par l’urgence. Les changements climatiques affectent déjà la vie des centaines de millions de personnes vivant dans ces pays, à l’instar des habitants de l’île de Tuvalu, en Océanie, touchés par la hausse du niveau de la mer.
A Copenhague, avançant la responsabilité historique des pays développés, les pays du G77, sous la présidence du Soudan en 2009, réclament une « justice climatique ». C’est à dire des efforts importants de réduction au Nord, et des mécanismes de compensation au Sud. Cependant, les intérêts et problématiques soulevés par la lutte contre le réchauffement climatique varient fortement parmi les membres du G77 qui intègre aussi bien les pays dits AOSIS (Alliance des petits Etats insulaires) particulièrement vulnérables à une hausse du niveau de la mer que la Chine, grande puissance émergente, en passant par les pays de l’OPEP et le Groupe Afrique qui, lors des pourparlers de Barcelone sur le changement climatique, s’est momentanément retiré des négociations, menaçant de la sorte tout le processus de Copenhague.
Le Brésil, l’Inde et la Chine, sont les grands pays émergents. Concentrant 40% de la population mondiale et enregistrant une croissance économique et industrielle sans pareil, leur augmentation d’émissions de gaz à effet de serre, ou GES, est, elle aussi, exponentielle.
Depuis 2007, la Chine, surnommée « l’usine du monde », est sur la 1ère marche du podium en matière d’émissions de GES. Et il est à craindre que l’Inde, forte de ses 1,2 milliards d’habitants, suive la même voie. Quant au Brésil, ses fortes émissions de CO2 sont dues, pour une grande part, à la déforestation massive de l’Amazonie, le « poumon du monde ». Ces pays posent des conditions draconiennes quant à leur investissement dans la réduction de leurs émissions de GES. Le Brésil et l’Inde reprochent aux pays industrialisés de ne pas assumer leur responsabilité historique du réchauffement climatique actuel, qui trouve sa principale cause dans l’accumulation des GES depuis le début de l’ère industrielle.
La Chine, elle, se radicalise. Elle exige notamment que sur l’ensemble de ses émissions de GES, 25% soit imputé aux pays consommateurs, puisque provenant de la fabrication de produits destinés à l’exportation. Ces pays reprochent également aux pays industrialisés de ne pas suffisamment les aider face aux conséquences du réchauffement climatique.
Les pays de l’OPEP, et essentiellement les petits états du Golfe persique conduits par l’Arabie Saoudite, n’ont pas signé le Protocole de Kyoto. Alors que leur Produit Interieur Brut ou PIB par habitant est souvent équivalent, voire supérieur à celui de plusieurs pays européens, ils ne sont donc soumis à aucun objectif de réduction des émissions de gaz à effet de serre, ou GES. Et pourtant, ils sont en tête des pays qui, par habitant, émettent le plus de GES !
Les pays de l’OPEP redoutent toute avancée dans la lutte contre le réchauffement climatique qui aurait un impact négatif sur leurs exportations de pétrole. Ils regrettent aussi que certains pays consommateurs veuillent surtaxer les produits pétroliers par rapport à d’autres types d’énergies, qu’elles soient polluantes comme le charbon ou renouvelables.
A Copenhague, l’OPEP compte mettre en garde les pays développés contre le manque d’investissements dans les capacités de raffinerie et la recherche de nouveaux gisements. La conséquence serait une flambée incontrôlée des prix pétroliers lors de la reprise économique mondiale.
Médiatiquement très active, une coalition d’Organisations Non-Gouvernementales menée par le WWF et Greenpeace, s’est formée en vue de Copenhague. Elle a rédigé un document ambitieux intitulé « Traité de Copenhague sur le Climat ». Cette coalition propose, afin d’éviter un dérèglement climatique catastrophique, un « budget carbone mondial » qui doit, pour l’ensemble des gaz à effet de serre ou GES, être ramené en 2020 au niveau de 1990. Et en 2050, ce budget devra être réduit de 80% en dessous du niveau de 1990. Pour que cela soit réalisable, le traité envisage notamment, d’ici à 2020, une réduction d’au moins 75% des émissions mondiales dues à la déforestation. Les ONG préconisent aussi le soutien significatif des pays industrialisés aux pays en développement dans le but de les aider à diminuer, dès avant 2020, leurs émissions de GES.
Afin que tous les états respectent leurs engagements, les ONG suggèrent la création d’un organisme financier : le Comité Climat de Copenhague. Elles prévoient également un renforcement des stratégies d’adaptation aux changements climatiques dans les pays en développement, ainsi que la coopération technologique Nord-Sud. Le « Traité de Copenhague sur le climat » proposé par les ONG impose donc des engagements contraignants aux pays développés, mais n’oublie pas d’inclure les pays en développement dans l’effort global de réduction des émissions de gaz à effet de serre.