Coup de frein sur les dépenses militaires grecques

Le gouvernement grec de Georges Papandréou s’est engagé à réduire cette année de quatre points le déficit des finances publiques par rapport au PIB (de 12,7 à 9%). Un des moyens fortement suggéré par l’Union européenne serait de tailler dans les dépenses militaires qui ont certes baissé au cours des dernières années mais qui restent, en termes relatifs, parmi les plus élevées d’Europe. La raison : le conflit latent avec la Turquie.

Confrontés à une crise budgétaire sans précédent, les dirigeants socialistes grecs, au pouvoir depuis moins de six mois, planchent dur pour augmenter les recettes, essentiellement par des impôts, et réduire les dépenses, notamment militaires. La Grèce qui entretient des relations compliquées avec son puissant voisin turc est l’un des pays de l’Union européenne et de l’OTAN qui dépense le plus pour s’armer par souci toujours d’assurer un équilibre de dissuasion avec la Turquie.
Au Parlement de Strasbourg, le dirigeant des Verts, Daniel Cohn-Bendit, a accusé la Commission européenne de ne rien faire pour résoudre la question chypriote et par là atténuer le différend gréco-turc : "4,3% du PIB grec passe à la défense, quel est le problème ? C’est la relation avec la Turquie. Où est l’initiative de la Commission pour aider le problème de Chypre pour que, enfin, le PIB de la Grèce soit soulagé de ce conflit idiot ?", s’est il exclamé.
Les dépenses militaires grecques ont en fait beaucoup diminué depuis vingt-cinq ans. Selon les chiffres officiels de l’OTAN, elles représentaient 4,5% du PNB entre 1985 et 1989, puis 3,2% entre 2000 et 2004, et tournent depuis 2005 autour de 2,6% à 2,8%.
Toujours selon l’OTAN, la Grèce a affecté 6,896 milliards d’euros en 2008 à ses dépenses d’armement, 2,8% de son PNB, comparés à 8,6 milliards d’euros pour la Turquie, soit 1,8% du PNB.
Même si les dépenses militaires grecques ont bondi de 11,1% en 2008, après avoir stagné en 2007, leur importance a beaucoup décru depuis la fin de la guerre froide, mais elles restent tout de même parmi les plus importantes par rapport au PIB, devant la Bulgarie, la France et le Royaume-Uni.
Devant le parlement, le ministre de la Défense, Evanguélos Vénizélos, a indiqué que le budget de son ministère serait en 2010 de "six milliards environ", en diminution de 6,6% par rapport à 2009. "Le poste crucial des programmes d’armement comprend une enveloppe de l’ordre de 2 milliards d’euros, c’est à dire quelque 0,8% du PIB. Il faut aussi ajouter un crédit de 2,7 milliards pour la fourniture en 2010 de divers systèmes d’armement payables au moment de leur remise, c’est-à-dire 1,2% de PIB supplémentaire", a-t-il précisé.
Les économies s’élèveront à "quelque 700 millions" en 2010, a récemment précisé le ministre-adjoint de la Défense, Panagiotis Béglitis. Il a affirmé que le ministère était "dans une phase de réévaluation des besoins opérationnels et militaires en prenant en compte l’urgence de la situation économique et sociale".
Il faut, a-t-il souligné, diminuer les dépenses militaires, réévaluer la structure de l’armée et repositionner les dépenses en les adaptant aux besoins réels de la Grèce.
Un mois après l’arrivée au pouvoir des socialistes, le ministre français de la Défense, Hervé Morin, s’était rendu à Athènes pour s’enquérir de la nouvelle situation créée par l’annonce du déficit public colossal de 12,7% du PIB en 2009. La France est avec les Etats-Unis, la Russie et le Royaume-Uni l’un des principaux pourvoyeurs d’armes à la Grèce. Elle négocie actuellement la vente de six frégates européennes multimissions (FREMM) et de quinze hélicoptères NH-90 et Puma. 
Sur le dossier des frégates, pour lequel un nouveau round de négociations bilatérales s’est tenu du 9 au 11 février, Evanguelos Vénizélos a précisé qu’il annoncerait "tout, quand cela sera mûr", ne cachant pas sa volonté d’obtenir de meilleures compensations avec de forts transferts de technologie. Pour les hélicoptères, les deux parties sont encore à la "recherche de solutions communes".
Il reste bien sûr la question clé de l’acquisition programmée de vingt avions de chasse de dernière génération. Paris voudrait placer ses Rafale et Berlin l’Eurofighter. Le débat n’est pas tranché. "Je connais l’intérêt français pour le Rafale et l’intérêt d’autres pays, notre approche sera responsable et transparente", a affirmé le ministre grec de la Défense. Mais il est en tout cas hautement improbable qu’une décision soit prise cette année, pour cause d’austérité et de rigueur.