A trois semaines du scrutin, le résultat reste incertain. Pour beaucoup d’analystes politiques, il devrait se jouer au centre. Selon un sondage réalisé en juillet dernier, 36% des Suédois se déclaraient de droite, 24% de gauche et 33% du centre. Un autre sondage montrait que 46% des électeurs pensaient que les forces de l’Alliance, actuellement au pouvoir, allaient s’imposer le 19 septembre tandis que 40% pronostiquaient un changement de gouvernement et donc une victoire de la gauche.
Longtemps fidèles toute leur vie durant à un même parti, les Suédois, comme les autres Européens, se montrent plus changeants. Leur vote fluctue selon le contexte ou la position des partis sur tel ou tel sujet. Tout ceci rend le résultat des élections moins prévisible que durant les décennies précédentes, le scrutin restant indécis jusqu’à la veille du vote. En outre, si les campagnes électorales se cristallisent de plus en plus sur les deux principaux leaders politiques – le Premier ministre Fredrik Reinfeldt pour les forces de l’Alliance et Mona Sahlin pour la coalition de gauche –, la personnalité des candidats joue, en Suède, un rôle moindre que dans les autres Etats. Le débat d’idées est toujours primordial et les électeurs se prononcent en premier lieu en fonction du programme économique et de la capacité à gouverner de chaque parti.
Vote préférentiel
La Suède possède un Parlement monocaméral, le Riksdag, qui compte 349 membres élus tous les 4 ans le 3e dimanche de septembre au scrutin proportionnel. Le pays est divisé pour les élections législatives en 29 circonscriptions électorales, chacune élisant en moyenne 11 représentants au Riksdag. La plus vaste de ces circonscriptions est celle de Stockholm qui élit 38 parlementaires.
310 sièges sont répartis entre les 29 circonscriptions électorales que compte le pays ; les 39 autres, appelés sièges compensatoires, sont attribués aux différents partis afin d’assurer la représentativité la plus exacte possible au niveau national. Les candidats sont élus à ces sièges compensatoires dans les circonscriptions où leur parti bénéficie du plus fort reste. Pour prendre part à la distribution de ces sièges, un parti doit avoir obtenu 4% des suffrages exprimés au niveau national ou 12% au sein d’une circonscription.
Depuis les élections législatives de 1998, les électeurs peuvent voter pour un parti ou effectuer un vote préférentiel en faveur de l’un des candidats figurant sur les listes qui leur sont proposées par les partis et, par conséquent, peser davantage sur l’attribution des sièges.
Sept partis sont actuellement représentés au Riksdag :
- le Parti social-démocrate (SAP), principal parti d’opposition, dirigé depuis 2007 par Mona Sahlin, a dominé la vie politique suédoise durant plus de 70 ans. Il compte 130 élus dans le Parlement sortant ;
- le Parti du rassemblement modéré (M), dirigé par le Premier ministre Fredrik Reinfeldt, situé à droite : 97 députés ;
- le Parti du centre (C), ex-Parti agrarien dirigé par l’actuelle ministre de l’Industrie, Maud Olofsson : 29 députés ;
- le Parti du peuple-Les Libéraux (FpL), dont le leader est l’actuel ministre de l’Education, Jan Björklund : 28 élus ;
- le Parti chrétien-démocrate (KD), parti conservateur créé en 1964 et dirigé par Göran Hägglund : 24 députés ;
- le Parti de la gauche (Vp), ex-Parti communiste dont le leader est Lars Ohly : 22 élus ;
- le Parti de l’environnement-Les Verts (MP), formation de gauche créée en 1981 et représentée par ses deux porte-parole, Peter Eriksson et Maria Wetterstrand : 19 députés.
Bilan de quatre ans de gouvernement
Au pouvoir depuis 2006, les forces de l’Alliance qui regroupe les quatre partis de droite (M, C, FpL, KD), s’enorgueillit du fait que la Suède a été moins sévèrement touchée que la majorité des autres Etats membres de l’Union européenne par la crise économique internationale. Pays très ouvert et donc fortement affecté par la chute du commerce mondial, la Suède a cependant connu une récession légèrement moins marquée que dans d’autres pays. Cela s’explique notamment par le soutien apporté à la demande intérieure et aux finances publiques qui ont permis de limiter la chute du PIB. Ce dernier a cependant baissé l’an passé de 4,7%. La récession a conduit à une augmentation du taux de chômage : 9,5% de la population active (juin 2010) mais 21,2% pour les jeunes entre 20 et 24 ans, et ce alors que la coalition de l’Alliance a remporté les précédentes élections législatives du 17 septembre 2006 sur ses promesses de réduction du chômage.
Baisse des prestations sociales
Lors de leur arrivée au pouvoir, les partis de l’Alliance ont porté un coup aux syndicats et aux caisses de chômage gérés par ceux-ci en augmentant les cotisations syndicales. Le pays a alors connu une érosion syndicale (500 000 Suédois n’ont pas renouvelé leur adhésion, ce qui représente une baisse de 8% des salariés syndiqués entre 2006 et 2009). En outre, l’Etat s’est désengagé du financement des caisses d’assurance chômage. Sa contribution est tombée en janvier 2007 de 95% à 55% (soit une économie de 10 milliards de couronnes – 900 millions € – pour les caisses de l’Etat sur l’année 2007). Les conditions nécessaires pour percevoir l’allocation journalière de base de 320 couronnes (29 €) ont été durcies. Une personne doit avoir travaillé 80 heures mensuelles (contre 70) ou 480 heures sur 6 des 12 derniers mois à raison de 50 heures mensuelles. Enfin, le montant de l’allocation est désormais établi sur la base du revenu moyen perçu au cours des 12 derniers mois (au lieu de 6). De nombreux Suédois perçoivent donc une allocation journalière inférieure à l’allocation de base de 320 couronnes.
Les dispositions prises par le gouvernement de Fredrik Reinfeldt ont touché les plus fragiles puisqu’elles concernent en premier lieu ceux qui n’occupent pas un emploi avec un contrat à durée indéterminée, soit 571 000 personnes sur 4 millions de salariés. Le gouvernement a également réduit les avantages dont bénéficiaient les salariés en matière de congé maladie (auparavant non limité dans le temps). Seules les personnes très malades peuvent bénéficier d’un congé de longue durée. Les autres perçoivent 80% de leur salaire durant un an (le plafond étant fixé à 2 000 €). Ce congé est prolongeable de 550 jours (avec 75% du salaire). Après cette période, les personnes perdent leur droit à l’assurance maladie.
Interrogé par le journal Expressen, Fredrik Reinfeldt a affirmé que son gouvernement « avait contribué à mettre en place une politique de l’emploi plus efficace, qui a tenté de mettre fin à une certaine culture de la passivité ». Il a déclaré que le chômage des jeunes s’expliquait parce que nombre d’entre eux quittent le système scolaire sans qualification. « D’où l’utilité des réformes que nous avons mises en place, sur le coaching ou le développement de l’apprentissage », a-t-il dit, ajoutant, « d’un autre côté, il s’agit de ne pas faire la fine bouche devant un emploi chez McDo. Après tout, avoir un boulot avec un salaire, c’est en soi une bonne chose ». Dans son programme présenté le 8 mai dernier, le gouvernement a affirmé sa volonté de renforcer l’apprentissage. Le Parti du peuple-Les Libéraux s’est déclaré convaincu que cette mesure favoriserait l’emploi grâce à des salaires moins élevés.
Priorité à l’éducation
« Nous voulons poursuivre sur notre lancée. Nos finances publiques sont en ordre. Nous n’avons pas de dettes similaires à d’autres pays européens pris dans la crise budgétaire », a déclaré Fredrik Reinfeldt, candidat à sa propre succession à la tête du gouvernement. Il a promis de faire de l’éducation sa mesure prioritaire pour lutter contre le chômage. Son programme est fondé sur la responsabilité budgétaire. Si les finances publiques du pays sont solides (la dette publique s’élevait à 42,8% du PIB en 2009), les partis de l’Alliance souhaitent néanmoins réviser la loi de finances pour y faire inscrire un objectif d’excédent public. Ils prévoient cependant d’augmenter le budget que les municipalités consacrent aux soins aux personnes âgées et à l’éducation. Enfin, mi-août, le gouvernement a décidé de consacrer 5,4 millions d’euros à un programme destiné à améliorer le logement des personnes âgées.
Le ministre de l’Economie, Anders Borg (M), a indiqué que les partis de l’Alliance envisageaient de vendre les parts que possède l’Etat dans plusieurs grandes entreprises, pour un montant total d’environ 100 milliards de couronnes (10,46 milliards €), afin de diminuer la dette publique. Enfin, le Premier ministre a promis de poursuivre les baisses d’impôts, notamment en faveur des retraités.
Présence en Afghanistan
En matière de politique étrangère, le gouvernement a déclaré début août qu’il envisageait de prolonger la présence des troupes suédoises en Afghanistan. « La Suède doit participer aux efforts pour gérer la crise internationale avec un mandat légal clair, pour mieux illustrer sa solidarité et sa responsabilité dans le monde. Les partis de l’Alliance veulent prolonger le mandat des forces suédoises et sont ouvertes à une augmentation de la contribution militaire si la situation l’exige », a écrit le ministre de la Défense, Sten Tolgfors (M), dans une tribune publiée par le quotidien Dagens Nyheter. La Suède est un pays officiellement neutre, non membre de l’OTAN et elle participe à la force internationale en Afghanistan depuis début 2002.
Le ministre des Affaires étrangères, Carl Bildt (M), a dénoncé le danger que les forces de gauche feraient courir au pays et « l’antiaméricanisme primaire qui caractérise le programme de l’opposition » (celle-ci demande la fermeture des bases américaines à l’étranger). « Laissez aux sociaux-démocrates la possibilité de faire entrer la gauche ex-communiste au gouvernement, c’est laisser la porte ouverte à la mise en œuvre d’une politique dont l’issue ne fait hélas aucun doute : un gouvernement désuni et une Suède affaiblie », a-t-il déclaré.
Si les forces de droite demeurent unies à un mois des élections législatives, plusieurs questions se posent sur le poids des différents partis politiques qui composent leur coalition. Les Modérés du Premier ministre Fredrik Reinfeldt, qui ont choisi pour slogan Framat tillsammans "Avançons ensemble", bénéficient d’une cote de popularité élevée, mais obtiennent celle-ci au détriment des 3 autres partis. Le Parti du peuple-Les Libéraux rassemble les Suédois vivant dans les grandes villes et les plus diplômés ainsi qu’un fort contingent d’enseignants tandis que le Parti du centre est davantage celui des campagnes rurales. Sa présidente, la ministre de l’Industrie Maud Olofsson, a réaffirmé lors d’un entretien publié par le quotidien Aftonbladet son ambition d’en faire « le parti des entrepreneurs et des écologistes de droite », même si, traditionnellement opposé au nucléaire, le parti a voté le 17 juin dernier en faveur de la construction de nouveaux réacteurs nucléaires en remplacement des dix anciens (qui couvrent 42% des besoins énergétiques du pays) lorsqu’ils seront arrivés à terme de leur durée d’exploitation (un texte voté de justesse par le Riksdag par 174 voix contre 172).
Le Parti chrétien-démocrate semble quelque peu marginalisé, son nouveau concept de « vrais gens » peinant à s’imposer. Son président, Göran Hägglund, a indiqué que ce terme désignait « tous ceux qui se sentaient parfois dépassés et maltraités par les autorités et l’intelligentsia ». Son programme s’articule autour de trois points : la création de nouveaux emplois, notamment grâce à la baisse des charges patronales ; des libertés accrues pour les citoyens, grâce notamment à une limitation du champ d’action de la politique et une meilleure qualité des services rendus par l’Etat. Les personnes âgées constituent la cible du parti qui souhaite réduire l’écart en matière d’imposition entre les retraités et les salariés (273 millions € de baisses d’impôts) mais aussi faire passer de 67 à 70 ans l’âge maximal de départ en retraite.
Enfin, le Parti du peuple-Les Libéraux a mis l’éducation au centre de son programme électoral. Début août, son leader, le ministre de l’Education, Jan Björklund a déclaré que « l’école n’avait pas vocation à élever les enfants à la place des parents ». Il a affirmé que les parents des élèves dont le comportement pose problème devraient pouvoir assister, avec leur enfant, à certains cours, afin qu’ils se rendent compte par eux-mêmes de la situation en classe. Le ministre souhaite ouvrir des « classes d’élite » dans les collèges et des lycées. « Les élèves doués ont, autant que les autres, le droit de se sentir bien à l’école sans être contraints de rester assis à écouter des cours qui ne sont pas de leur niveau. Après 1968, nous avons réduit notre niveau d’exigence et donné trop de pouvoirs aux élèves. Il est interdit de leur donner des notes avant la classe de 3e ! Conséquences de ce laisser-aller : le respect vis-à-vis de l’enseignant n’existe plus », a-t-il dit. Une enquête publiée par le Dagens Nyheter révèle que l’éducation constitue la première préoccupation des Suédois devant la santé, la situation des personnes âgées et l’emploi.
Deux grandes questions se posent aux partis de droite à un mois des élections législatives. Hormis les Modérés et le Parti du peuple-Les Libéraux, les deux autres partis de l’Alliance – le Parti du centre et les chrétiens-démocrates – passeront-ils la barre des 4% des suffrages exprimés obligatoires pour être représentés au Parlement ? D’autre part, quel sera le résultat de l’extrême-droite qui se présente sous l’étiquette Démocrates suédois (SD) ? Ceux-ci pourraient-ils priver les forces de droite de la majorité absolue au Parlement ?
Les sociaux-démocrates peuvent-ils revenir au pouvoir ?
A gauche, les Verts ont le vent en poupe et sont plébiscités dans les enquêtes d’opinion tandis que les sociaux-démocrates sont à la peine. La leader social-démocrate, Mona Sahlin, reste peu populaire et pâtit de la concurrence de Maria Wetterstrand, la très populaire porte-parole des Verts. Mona Sahlin avait été très affectée dans les années 1990 par l’affaire dite Toblerone. En 1990 et 1991, alors ministre du travail, elle avait utilisé à plusieurs reprises sa carte bancaire professionnelle pour des achats privés. Parmi les articles qu’elle avait achetés se trouvaient deux barres de chocolat de la marque Toblerone. Le deuxième porte-parole des Verts, Peter Eriksson, s’est inquiété de la faible cote de confiance de Mona Sahlin qui, selon lui, pourrait coûter la victoire aux forces de gauche. « Elle est un facteur de découragement » a-t-il déclaré. La présidente du Parti social-démocrate a affirmé « être à l’aise avec les sentiments qu’elle fait naître « et souligné qu’elle avait toujours été "soit adorée, soit détestée « . "Au moins, les gens prennent position », a-t-elle conclu.
Le Parti social-démocrate a longtemps été qualifié de « parti politique le plus efficace du monde ». Il a dominé la vie politique suédoise tout au long du XXe siècle. Mais les catégories socioprofessionnelles qui assuraient sa victoire (ouvriers et petits employés) se sont peu à peu détournées du parti. Pour deux raisons : l’identification des électeurs à un parti politique est désormais très faible et l’ancienne classe ouvrière est en voie de disparition. Le plus important des partis de gauche a récupéré les suffrages de nouveaux électeurs, comme les Suédois issus de l’immigration, mais en nombre insuffisant pour rester dominant sur la scène politique. Les sociaux-démocrates présentent les élections législatives du 19 septembre comme l’heure du choix entre « une politique qui créera davantage d’emploi et d’égalité des sexes et une politique qui élargit les inégalités et qui exclut ».
Le 7 décembre 2008, les forces de gauche se sont unies au sein d’une coalition appelée Rödgröna (coalition rouge-verte) à l’image de ce qu’avaient fait les partis de droite en 2006 lorsqu’ils se sont regroupés dans l’Alliance. Cette union des partis de gauche est due à la Confédération syndicale de Suède (LO) qui s’est rapprochée du Parti de gauche au détriment du Parti social-démocrate. S’il remporte les élections législatives, le Parti social-démocrate gouvernera donc avec deux « petits » partis, ce qui serait une première dans le royaume. Mais les forces de gauche, qui ont longtemps mené la course dans les enquêtes d’opinion, sont devancées par celles de l’Alliance.
Une « libérale verte »
Les Verts possèdent un électorat jeune, urbain et diplômé. Ils se battent pour l’ouverture des frontières du pays (même si Maria Wetterstrand a déclaré que son parti était prêt à renoncer à sa demande de légalisation de tous les immigrés sans-papiers) présents en Suède, un moratoire sur la construction des grandes surfaces dans les banlieues des grandes villes, le doublement de l’utilisation des moyens de transports en commun dans les dix années à venir (ils souhaitent augmenter le nombre de voies ferrées et de tramways).
Maria Wetterstrand se définit comme une "libérale verte". Elle s’oppose à ce que l’Etat prenne une place trop importante, combat la centralisation et souhaite privatiser plusieurs entreprises publiques. Longtemps eurosceptiques, les Verts se sont, sous l’influence de Maria Wetterstrand, convertis à l’Union européenne.
Peter Eriksson a déclaré rester ouvert à une collaboration avec les « petits » partis conservateurs. Il est en effet très possible que ni les partis de l’Alliance ni les forces de gauche n’obtiennent la majorité et que le parti d’extrême droite se retrouve en position d’arbitre. L’ensemble des partis politiques ayant exclu une collaboration avec lui, les deux blocs se verraient obligés de tenter de « débaucher » l’un des partis de la coalition adverse. Les analystes politiques considèrent que, dans ce cas, les partis de l’Alliance pourraient, s’ils recueillaient le plus grand nombre d’élus, parvenir à convaincre les Verts de les rejoindre.
Le Parti de l’Etat-providence
Le Parti de gauche (Vänsterpartiet), qui regroupe d’anciens communistes, des militants associatifs issus de l’immigration et des militants opposés à « l’impérialisme américain », a choisi de modifier son nom pour cette campagne électorale. Il se définit désormais comme le Välfärdspartiet (V), Parti de l’Etat-providence, dont il se veut l’ardent défenseur, y compris contre la volonté de ses partenaires au sein de la coalition, le Parti social-démocrate et les Verts. Il voit comme un « gigantesque échec » le bilan de l’Alliance. Il se bat pour l’ouverture des frontières, la journée de travail de 6h, le partage du congé parental (actuellement assuré à 80% par les mères) entre les deux parents, l’ouverture des écoles maternelles le soir et la nuit, ainsi que le retrait des troupes suédoises d’Afghanistan.
Sur ce sujet, il est rejoint par les sociaux-démocrates dont la leader, Mona Sahlin, a déclaré envisager un retour des troupes suédoises stationnées dans ce pays puisque la région dont celles-ci ont la charge devrait être parmi les premières à faire l’objet d’un transfert de responsabilité aux Afghans. « Si c’est le cas, et si le scrutin afghan du 18 septembre (les élections législatives) se déroule dans de bonnes conditions, alors il paraît clair que nous commencerons, au cours de la prochaine législature, à réduire notre présence sur place », a-t-elle affirmé. Le 6 août, Mona Sahlin écrivait dans une tribune publiée dans le quotidien Aftonbladet : « Pour réussir pleinement, le pays a besoin de notre aide et de notre soutien. La Suède est depuis longtemps l’un des principaux contributeurs d’aide à l’Afghanistan. Mais l’assistance militaire a pris le pas sur l’aide au développement. Nous souhaitons dépasser cette situation pour faire en sorte que l’aide au développement soit au moins équivalente à l’effort militaire. Si les conditions de sécurité s’améliorent, le temps sera alors venu de réfléchir aux conditions de notre départ. Il est toutefois essentiel que l’assistance civile perdure bien après le retrait des soldats occidentaux ».
Une enquête d’opinion réalisée en juillet montrait que 41 % des Suédois considéraient la présence suédoise en Afghanistan comme injustifiée (ils étaient 35 % en février), 42 % y étant favorables (46 % lors du précédent sondage).
Les forces de gauche souhaitent augmnter les dépenses publiques, une hausse financée par une augmentation des impôts qui resterait cependant "légère" pour la grande majorité des Suédois. Devraient augmenter les taxes sur l’alcool, le tabac et les carburants. Le 15 août dernier, Mona Sahlin a accusé le Premier ministre Fredrik Reinfeldt d’avoir affaibli le modèle social suédois durant son mandat et de poursuivre sur cette voie, néfaste selon elle, en promettant de baisser les impôts.
En matière de fiscalité, l’opposition souhaite également poursuivre les réductions d’impôt en faveur des retraités ; ceux-ci se verraient accorder 7,5 milliards de couronnes d’avantages fiscaux. "La Suède est l’un des rares pays au monde qui impose davantage les retraites que les salaires" a écrit l’ancien Premier ministre social-démocrate (1986-1991 et 1994-1996) Ingvar Carlsson. En outre, alors que le revenu moyen des Suédois a cru de 32% entre 1999 et 2008, celui des retraités a augmenté de 24% (et celles des femmes âgées vivant seules de 19%). Les plus de 65 ans représentent 18% de la population suédoise.
L’extrême droite fera-t-elle son entrée au Parlement ?
Le parti nationaliste des Démocrates suédois, fondé en 1988 et dirigé par Jimmie Akesson, est en hausse constante aux élections législatives et locales. Il a recueilli 2,9% des suffrages (et près de 10% en Scanie, région frontalière du Danemark, lors du dernier scrutin du 17 septembre 2006). Les Démocrates suédois ont donc fait leur entrée dans trois parlements régionaux et obtenu 20 élus municipaux.
Selon les enquêtes d’opinion, ils sont populaires parmi les plus jeunes électeurs, en particulier chez les primo-votants. Le parti, qui possède des liens historiques avec les néo-nazis (dont il s’est éloigné pour tenter de devenir fréquentable) et qui est issu du mouvement raciste "Gardez la Suède suédoise", a une idéologie à la fois conservatrice et sociale. Il veut restreindre l’accès à l’interruption volontaire de grossesse, faire cesser ce que le secrétaire du parti, Björn Söder, qualifie de « normalisation de l’homosexualité », s’oppose au féminisme, etc. Mais, à l’image des forces de gauche (et du parti d’extrême droite du Parti du peuple danois, DF), il se veut le défenseur de l’Etat providence.
Dans un pays où un habitant sur quatre a un parent né à l’étranger, les Démocrates suédois sont favorables à une réduction de l’immigration pour que la Suède reste une « société homogène ». Ils souhaitent voir diminuer le nombre des immigrés et des demandeurs d’asile de 90%, instaurer un permis de séjour uniquement provisoire, obliger les demandeurs d’asile et les futurs immigrés à se soumettre à un test ADN mais aussi à des examens pour vérifier s’ils ont la tuberculose ou s’ils sont porteurs du virus HIV.
Durant de nombreuses années, la tendance nationale (anti-mondialisation et anti-Union européenne) a été l’apanage des forces de gauche dans le royaume. En 2003, le Premier ministre de l’époque Göran Persson (SAP) avait prôné une approche restrictive des contrôles aux frontières, notamment envers les travailleurs venus des Etats baltes. Il avait évoqué les "touristes sociaux" qui pourraient miner l’Etat providence.
Le risque de confusion
Durant la dernière législature (2006-2010), les forces de gauche ont devancé les partis de l’Alliance dans toutes les enquêtes d’opinion. Le dernier sondage publié le 20 aout dernier crédite les forces de l’Alliance de 47,9% des suffrages pour 46,3% des voix aux partis de l’opposition (le Parti social-democrate reste le premier parti de Suède avec 32,7% des suffrages). L’écart est donc très faible entre droite et gauche. Les Démocrates suédois recueilleraient 4% des voix et feraient donc leur entrée au Parlement. Enfin, 22% des personnes interrogées ont déclaré ne pas avoir encore décidé à qui elles accorderaient leur suffrage. L’écart entre les deux coalitions est donc très faible et a tendance à se réduire au fil des semaines. « Il est probable que la situation soit très confuse à l’issue du scrutin », analyse Carl Melin de l’institut d’opinion United Minds. « Si aucune des deux coalitions ne parvient à atteindre la majorité absolue, un gouvernement minoritaire pourrait être formé mais si celui-ci refuse le soutien des Démocrates suédois, il serait toutefois très instable », a expliqué le politologue Peter Santesson-Wilson de l’Institut Ratio. « Les Démocrates suédois pourraient ainsi voter avec l’opposition sur la loi sur le budget, ce qui causerait un véritable chaos politique et forcerait le gouvernement à démissionner », a-t-il ajouté.
En conclusion, les Suédois ont préféré la droite à la gauche à seulement deux reprises dans l’histoire du royaume : en 1991 et en 2006.
Par Corinne Deloy (Fondation Robert Schuman)
Le 19 septembre, 7 millions de Suédois sont appelés à renouveler l’ensemble de leurs représentants : nationaux (membres du Riksdag, Chambre unique du Parlement) et locaux (conseils municipaux et conseils de comtés).
Les Norvégiens et les Islandais vivant dans le royaume, les personnes possédant la nationalité d’un autre Etat mais enregistrées comme résidentes en Suède depuis au moins trois ans consécutifs et les citoyens des 26 autres Etats membres de l’Union européenne sont autorisés à voter aux élections locales.. 497 000 Suédois seront électeurs pour la première fois le 19 septembre prochain, soit +15% par rapport aux dernières élections législatives du 17 septembre 2006, représentant 9% du total des votants.
A trois semaines du scrutin, le résultat reste incertain. Pour beaucoup d’analystes politiques, il devrait se jouer au centre. Selon un sondage réalisé en juillet dernier, 36% des Suédois se déclaraient de droite, 24% de gauche et 33% du centre. Un autre sondage montrait que 46% des électeurs pensaient que les forces de l’Alliance, actuellement au pouvoir, allaient s’imposer le 19 septembre tandis que 40% pronostiquaient un changement de gouvernement et donc une victoire de la gauche.
Longtemps fidèles toute leur vie durant à un même parti, les Suédois, comme les autres Européens, se montrent plus changeants. Leur vote fluctue selon le contexte ou la position des partis sur tel ou tel sujet. Tout ceci rend le résultat des élections moins prévisible que durant les décennies précédentes, le scrutin restant indécis jusqu’à la veille du vote. En outre, si les campagnes électorales se cristallisent de plus en plus sur les deux principaux leaders politiques – le Premier ministre Fredrik Reinfeldt pour les forces de l’Alliance et Mona Sahlin pour la coalition de gauche –, la personnalité des candidats joue, en Suède, un rôle moindre que dans les autres Etats. Le débat d’idées est toujours primordial et les électeurs se prononcent en premier lieu en fonction du programme économique et de la capacité à gouverner de chaque parti.
Vote préférentiel
La Suède possède un Parlement monocaméral, le Riksdag, qui compte 349 membres élus tous les 4 ans le 3e dimanche de septembre au scrutin proportionnel. Le pays est divisé pour les élections législatives en 29 circonscriptions électorales, chacune élisant en moyenne 11 représentants au Riksdag. La plus vaste de ces circonscriptions est celle de Stockholm qui élit 38 parlementaires.
310 sièges sont répartis entre les 29 circonscriptions électorales que compte le pays ; les 39 autres, appelés sièges compensatoires, sont attribués aux différents partis afin d’assurer la représentativité la plus exacte possible au niveau national. Les candidats sont élus à ces sièges compensatoires dans les circonscriptions où leur parti bénéficie du plus fort reste. Pour prendre part à la distribution de ces sièges, un parti doit avoir obtenu 4% des suffrages exprimés au niveau national ou 12% au sein d’une circonscription.
Depuis les élections législatives de 1998, les électeurs peuvent voter pour un parti ou effectuer un vote préférentiel en faveur de l’un des candidats figurant sur les listes qui leur sont proposées par les partis et, par conséquent, peser davantage sur l’attribution des sièges.
Sept partis sont actuellement représentés au Riksdag :
- le Parti social-démocrate (SAP), principal parti d’opposition, dirigé depuis 2007 par Mona Sahlin, a dominé la vie politique suédoise durant plus de 70 ans. Il compte 130 élus dans le Parlement sortant ;
- le Parti du rassemblement modéré (M), dirigé par le Premier ministre Fredrik Reinfeldt, situé à droite : 97 députés ;
- le Parti du centre (C), ex-Parti agrarien dirigé par l’actuelle ministre de l’Industrie, Maud Olofsson : 29 députés ;
- le Parti du peuple-Les Libéraux (FpL), dont le leader est l’actuel ministre de l’Education, Jan Björklund : 28 élus ;
- le Parti chrétien-démocrate (KD), parti conservateur créé en 1964 et dirigé par Göran Hägglund : 24 députés ;
- le Parti de la gauche (Vp), ex-Parti communiste dont le leader est Lars Ohly : 22 élus ;
- le Parti de l’environnement-Les Verts (MP), formation de gauche créée en 1981 et représentée par ses deux porte-parole, Peter Eriksson et Maria Wetterstrand : 19 députés.
Bilan de quatre ans de gouvernement
Au pouvoir depuis 2006, les forces de l’Alliance qui regroupe les quatre partis de droite (M, C, FpL, KD), s’enorgueillit du fait que la Suède a été moins sévèrement touchée que la majorité des autres Etats membres de l’Union européenne par la crise économique internationale. Pays très ouvert et donc fortement affecté par la chute du commerce mondial, la Suède a cependant connu une récession légèrement moins marquée que dans d’autres pays. Cela s’explique notamment par le soutien apporté à la demande intérieure et aux finances publiques qui ont permis de limiter la chute du PIB. Ce dernier a cependant baissé l’an passé de 4,7%. La récession a conduit à une augmentation du taux de chômage : 9,5% de la population active (juin 2010) mais 21,2% pour les jeunes entre 20 et 24 ans, et ce alors que la coalition de l’Alliance a remporté les précédentes élections législatives du 17 septembre 2006 sur ses promesses de réduction du chômage.
Baisse des prestations sociales
Lors de leur arrivée au pouvoir, les partis de l’Alliance ont porté un coup aux syndicats et aux caisses de chômage gérés par ceux-ci en augmentant les cotisations syndicales. Le pays a alors connu une érosion syndicale (500 000 Suédois n’ont pas renouvelé leur adhésion, ce qui représente une baisse de 8% des salariés syndiqués entre 2006 et 2009). En outre, l’Etat s’est désengagé du financement des caisses d’assurance chômage. Sa contribution est tombée en janvier 2007 de 95% à 55% (soit une économie de 10 milliards de couronnes – 900 millions € – pour les caisses de l’Etat sur l’année 2007). Les conditions nécessaires pour percevoir l’allocation journalière de base de 320 couronnes (29 €) ont été durcies. Une personne doit avoir travaillé 80 heures mensuelles (contre 70) ou 480 heures sur 6 des 12 derniers mois à raison de 50 heures mensuelles. Enfin, le montant de l’allocation est désormais établi sur la base du revenu moyen perçu au cours des 12 derniers mois (au lieu de 6). De nombreux Suédois perçoivent donc une allocation journalière inférieure à l’allocation de base de 320 couronnes.
Les dispositions prises par le gouvernement de Fredrik Reinfeldt ont touché les plus fragiles puisqu’elles concernent en premier lieu ceux qui n’occupent pas un emploi avec un contrat à durée indéterminée, soit 571 000 personnes sur 4 millions de salariés. Le gouvernement a également réduit les avantages dont bénéficiaient les salariés en matière de congé maladie (auparavant non limité dans le temps). Seules les personnes très malades peuvent bénéficier d’un congé de longue durée. Les autres perçoivent 80% de leur salaire durant un an (le plafond étant fixé à 2 000 €). Ce congé est prolongeable de 550 jours (avec 75% du salaire). Après cette période, les personnes perdent leur droit à l’assurance maladie.
Interrogé par le journal Expressen, Fredrik Reinfeldt a affirmé que son gouvernement « avait contribué à mettre en place une politique de l’emploi plus efficace, qui a tenté de mettre fin à une certaine culture de la passivité ». Il a déclaré que le chômage des jeunes s’expliquait parce que nombre d’entre eux quittent le système scolaire sans qualification. « D’où l’utilité des réformes que nous avons mises en place, sur le coaching ou le développement de l’apprentissage », a-t-il dit, ajoutant, « d’un autre côté, il s’agit de ne pas faire la fine bouche devant un emploi chez McDo. Après tout, avoir un boulot avec un salaire, c’est en soi une bonne chose ». Dans son programme présenté le 8 mai dernier, le gouvernement a affirmé sa volonté de renforcer l’apprentissage. Le Parti du peuple-Les Libéraux s’est déclaré convaincu que cette mesure favoriserait l’emploi grâce à des salaires moins élevés.
Priorité à l’éducation
« Nous voulons poursuivre sur notre lancée. Nos finances publiques sont en ordre. Nous n’avons pas de dettes similaires à d’autres pays européens pris dans la crise budgétaire », a déclaré Fredrik Reinfeldt, candidat à sa propre succession à la tête du gouvernement. Il a promis de faire de l’éducation sa mesure prioritaire pour lutter contre le chômage. Son programme est fondé sur la responsabilité budgétaire. Si les finances publiques du pays sont solides (la dette publique s’élevait à 42,8% du PIB en 2009), les partis de l’Alliance souhaitent néanmoins réviser la loi de finances pour y faire inscrire un objectif d’excédent public. Ils prévoient cependant d’augmenter le budget que les municipalités consacrent aux soins aux personnes âgées et à l’éducation. Enfin, mi-août, le gouvernement a décidé de consacrer 5,4 millions d’euros à un programme destiné à améliorer le logement des personnes âgées.
Le ministre de l’Economie, Anders Borg (M), a indiqué que les partis de l’Alliance envisageaient de vendre les parts que possède l’Etat dans plusieurs grandes entreprises, pour un montant total d’environ 100 milliards de couronnes (10,46 milliards €), afin de diminuer la dette publique. Enfin, le Premier ministre a promis de poursuivre les baisses d’impôts, notamment en faveur des retraités.
Présence en Afghanistan
En matière de politique étrangère, le gouvernement a déclaré début août qu’il envisageait de prolonger la présence des troupes suédoises en Afghanistan. « La Suède doit participer aux efforts pour gérer la crise internationale avec un mandat légal clair, pour mieux illustrer sa solidarité et sa responsabilité dans le monde. Les partis de l’Alliance veulent prolonger le mandat des forces suédoises et sont ouvertes à une augmentation de la contribution militaire si la situation l’exige », a écrit le ministre de la Défense, Sten Tolgfors (M), dans une tribune publiée par le quotidien Dagens Nyheter. La Suède est un pays officiellement neutre, non membre de l’OTAN et elle participe à la force internationale en Afghanistan depuis début 2002.
Le ministre des Affaires étrangères, Carl Bildt (M), a dénoncé le danger que les forces de gauche feraient courir au pays et « l’antiaméricanisme primaire qui caractérise le programme de l’opposition » (celle-ci demande la fermeture des bases américaines à l’étranger). « Laissez aux sociaux-démocrates la possibilité de faire entrer la gauche ex-communiste au gouvernement, c’est laisser la porte ouverte à la mise en œuvre d’une politique dont l’issue ne fait hélas aucun doute : un gouvernement désuni et une Suède affaiblie », a-t-il déclaré.
Si les forces de droite demeurent unies à un mois des élections législatives, plusieurs questions se posent sur le poids des différents partis politiques qui composent leur coalition. Les Modérés du Premier ministre Fredrik Reinfeldt, qui ont choisi pour slogan Framat tillsammans "Avançons ensemble", bénéficient d’une cote de popularité élevée, mais obtiennent celle-ci au détriment des 3 autres partis. Le Parti du peuple-Les Libéraux rassemble les Suédois vivant dans les grandes villes et les plus diplômés ainsi qu’un fort contingent d’enseignants tandis que le Parti du centre est davantage celui des campagnes rurales. Sa présidente, la ministre de l’Industrie Maud Olofsson, a réaffirmé lors d’un entretien publié par le quotidien Aftonbladet son ambition d’en faire « le parti des entrepreneurs et des écologistes de droite », même si, traditionnellement opposé au nucléaire, le parti a voté le 17 juin dernier en faveur de la construction de nouveaux réacteurs nucléaires en remplacement des dix anciens (qui couvrent 42% des besoins énergétiques du pays) lorsqu’ils seront arrivés à terme de leur durée d’exploitation (un texte voté de justesse par le Riksdag par 174 voix contre 172).
Le Parti chrétien-démocrate semble quelque peu marginalisé, son nouveau concept de « vrais gens » peinant à s’imposer. Son président, Göran Hägglund, a indiqué que ce terme désignait « tous ceux qui se sentaient parfois dépassés et maltraités par les autorités et l’intelligentsia ». Son programme s’articule autour de trois points : la création de nouveaux emplois, notamment grâce à la baisse des charges patronales ; des libertés accrues pour les citoyens, grâce notamment à une limitation du champ d’action de la politique et une meilleure qualité des services rendus par l’Etat. Les personnes âgées constituent la cible du parti qui souhaite réduire l’écart en matière d’imposition entre les retraités et les salariés (273 millions € de baisses d’impôts) mais aussi faire passer de 67 à 70 ans l’âge maximal de départ en retraite.
Enfin, le Parti du peuple-Les Libéraux a mis l’éducation au centre de son programme électoral. Début août, son leader, le ministre de l’Education, Jan Björklund a déclaré que « l’école n’avait pas vocation à élever les enfants à la place des parents ». Il a affirmé que les parents des élèves dont le comportement pose problème devraient pouvoir assister, avec leur enfant, à certains cours, afin qu’ils se rendent compte par eux-mêmes de la situation en classe. Le ministre souhaite ouvrir des « classes d’élite » dans les collèges et des lycées. « Les élèves doués ont, autant que les autres, le droit de se sentir bien à l’école sans être contraints de rester assis à écouter des cours qui ne sont pas de leur niveau. Après 1968, nous avons réduit notre niveau d’exigence et donné trop de pouvoirs aux élèves. Il est interdit de leur donner des notes avant la classe de 3e ! Conséquences de ce laisser-aller : le respect vis-à-vis de l’enseignant n’existe plus », a-t-il dit. Une enquête publiée par le Dagens Nyheter révèle que l’éducation constitue la première préoccupation des Suédois devant la santé, la situation des personnes âgées et l’emploi.
Deux grandes questions se posent aux partis de droite à un mois des élections législatives. Hormis les Modérés et le Parti du peuple-Les Libéraux, les deux autres partis de l’Alliance – le Parti du centre et les chrétiens-démocrates – passeront-ils la barre des 4% des suffrages exprimés obligatoires pour être représentés au Parlement ? D’autre part, quel sera le résultat de l’extrême-droite qui se présente sous l’étiquette Démocrates suédois (SD) ? Ceux-ci pourraient-ils priver les forces de droite de la majorité absolue au Parlement ?
Les sociaux-démocrates peuvent-ils revenir au pouvoir ?
A gauche, les Verts ont le vent en poupe et sont plébiscités dans les enquêtes d’opinion tandis que les sociaux-démocrates sont à la peine. La leader social-démocrate, Mona Sahlin, reste peu populaire et pâtit de la concurrence de Maria Wetterstrand, la très populaire porte-parole des Verts. Mona Sahlin avait été très affectée dans les années 1990 par l’affaire dite Toblerone. En 1990 et 1991, alors ministre du travail, elle avait utilisé à plusieurs reprises sa carte bancaire professionnelle pour des achats privés. Parmi les articles qu’elle avait achetés se trouvaient deux barres de chocolat de la marque Toblerone. Le deuxième porte-parole des Verts, Peter Eriksson, s’est inquiété de la faible cote de confiance de Mona Sahlin qui, selon lui, pourrait coûter la victoire aux forces de gauche. « Elle est un facteur de découragement » a-t-il déclaré. La présidente du Parti social-démocrate a affirmé « être à l’aise avec les sentiments qu’elle fait naître « et souligné qu’elle avait toujours été "soit adorée, soit détestée « . "Au moins, les gens prennent position », a-t-elle conclu.
Le Parti social-démocrate a longtemps été qualifié de « parti politique le plus efficace du monde ». Il a dominé la vie politique suédoise tout au long du XXe siècle. Mais les catégories socioprofessionnelles qui assuraient sa victoire (ouvriers et petits employés) se sont peu à peu détournées du parti. Pour deux raisons : l’identification des électeurs à un parti politique est désormais très faible et l’ancienne classe ouvrière est en voie de disparition. Le plus important des partis de gauche a récupéré les suffrages de nouveaux électeurs, comme les Suédois issus de l’immigration, mais en nombre insuffisant pour rester dominant sur la scène politique. Les sociaux-démocrates présentent les élections législatives du 19 septembre comme l’heure du choix entre « une politique qui créera davantage d’emploi et d’égalité des sexes et une politique qui élargit les inégalités et qui exclut ».
Le 7 décembre 2008, les forces de gauche se sont unies au sein d’une coalition appelée Rödgröna (coalition rouge-verte) à l’image de ce qu’avaient fait les partis de droite en 2006 lorsqu’ils se sont regroupés dans l’Alliance. Cette union des partis de gauche est due à la Confédération syndicale de Suède (LO) qui s’est rapprochée du Parti de gauche au détriment du Parti social-démocrate. S’il remporte les élections législatives, le Parti social-démocrate gouvernera donc avec deux « petits » partis, ce qui serait une première dans le royaume. Mais les forces de gauche, qui ont longtemps mené la course dans les enquêtes d’opinion, sont devancées par celles de l’Alliance.
Une « libérale verte »
Les Verts possèdent un électorat jeune, urbain et diplômé. Ils se battent pour l’ouverture des frontières du pays (même si Maria Wetterstrand a déclaré que son parti était prêt à renoncer à sa demande de légalisation de tous les immigrés sans-papiers) présents en Suède, un moratoire sur la construction des grandes surfaces dans les banlieues des grandes villes, le doublement de l’utilisation des moyens de transports en commun dans les dix années à venir (ils souhaitent augmenter le nombre de voies ferrées et de tramways).
Maria Wetterstrand se définit comme une "libérale verte". Elle s’oppose à ce que l’Etat prenne une place trop importante, combat la centralisation et souhaite privatiser plusieurs entreprises publiques. Longtemps eurosceptiques, les Verts se sont, sous l’influence de Maria Wetterstrand, convertis à l’Union européenne.
Peter Eriksson a déclaré rester ouvert à une collaboration avec les « petits » partis conservateurs. Il est en effet très possible que ni les partis de l’Alliance ni les forces de gauche n’obtiennent la majorité et que le parti d’extrême droite se retrouve en position d’arbitre. L’ensemble des partis politiques ayant exclu une collaboration avec lui, les deux blocs se verraient obligés de tenter de « débaucher » l’un des partis de la coalition adverse. Les analystes politiques considèrent que, dans ce cas, les partis de l’Alliance pourraient, s’ils recueillaient le plus grand nombre d’élus, parvenir à convaincre les Verts de les rejoindre.
Le Parti de l’Etat-providence
Le Parti de gauche (Vänsterpartiet), qui regroupe d’anciens communistes, des militants associatifs issus de l’immigration et des militants opposés à « l’impérialisme américain », a choisi de modifier son nom pour cette campagne électorale. Il se définit désormais comme le Välfärdspartiet (V), Parti de l’Etat-providence, dont il se veut l’ardent défenseur, y compris contre la volonté de ses partenaires au sein de la coalition, le Parti social-démocrate et les Verts. Il voit comme un « gigantesque échec » le bilan de l’Alliance. Il se bat pour l’ouverture des frontières, la journée de travail de 6h, le partage du congé parental (actuellement assuré à 80% par les mères) entre les deux parents, l’ouverture des écoles maternelles le soir et la nuit, ainsi que le retrait des troupes suédoises d’Afghanistan.
Sur ce sujet, il est rejoint par les sociaux-démocrates dont la leader, Mona Sahlin, a déclaré envisager un retour des troupes suédoises stationnées dans ce pays puisque la région dont celles-ci ont la charge devrait être parmi les premières à faire l’objet d’un transfert de responsabilité aux Afghans. « Si c’est le cas, et si le scrutin afghan du 18 septembre (les élections législatives) se déroule dans de bonnes conditions, alors il paraît clair que nous commencerons, au cours de la prochaine législature, à réduire notre présence sur place », a-t-elle affirmé. Le 6 août, Mona Sahlin écrivait dans une tribune publiée dans le quotidien Aftonbladet : « Pour réussir pleinement, le pays a besoin de notre aide et de notre soutien. La Suède est depuis longtemps l’un des principaux contributeurs d’aide à l’Afghanistan. Mais l’assistance militaire a pris le pas sur l’aide au développement. Nous souhaitons dépasser cette situation pour faire en sorte que l’aide au développement soit au moins équivalente à l’effort militaire. Si les conditions de sécurité s’améliorent, le temps sera alors venu de réfléchir aux conditions de notre départ. Il est toutefois essentiel que l’assistance civile perdure bien après le retrait des soldats occidentaux ».
Une enquête d’opinion réalisée en juillet montrait que 41 % des Suédois considéraient la présence suédoise en Afghanistan comme injustifiée (ils étaient 35 % en février), 42 % y étant favorables (46 % lors du précédent sondage).
Les forces de gauche souhaitent augmnter les dépenses publiques, une hausse financée par une augmentation des impôts qui resterait cependant "légère" pour la grande majorité des Suédois. Devraient augmenter les taxes sur l’alcool, le tabac et les carburants. Le 15 août dernier, Mona Sahlin a accusé le Premier ministre Fredrik Reinfeldt d’avoir affaibli le modèle social suédois durant son mandat et de poursuivre sur cette voie, néfaste selon elle, en promettant de baisser les impôts.
En matière de fiscalité, l’opposition souhaite également poursuivre les réductions d’impôt en faveur des retraités ; ceux-ci se verraient accorder 7,5 milliards de couronnes d’avantages fiscaux. "La Suède est l’un des rares pays au monde qui impose davantage les retraites que les salaires" a écrit l’ancien Premier ministre social-démocrate (1986-1991 et 1994-1996) Ingvar Carlsson. En outre, alors que le revenu moyen des Suédois a cru de 32% entre 1999 et 2008, celui des retraités a augmenté de 24% (et celles des femmes âgées vivant seules de 19%). Les plus de 65 ans représentent 18% de la population suédoise.
L’extrême droite fera-t-elle son entrée au Parlement ?
Le parti nationaliste des Démocrates suédois, fondé en 1988 et dirigé par Jimmie Akesson, est en hausse constante aux élections législatives et locales. Il a recueilli 2,9% des suffrages (et près de 10% en Scanie, région frontalière du Danemark, lors du dernier scrutin du 17 septembre 2006). Les Démocrates suédois ont donc fait leur entrée dans trois parlements régionaux et obtenu 20 élus municipaux.
Selon les enquêtes d’opinion, ils sont populaires parmi les plus jeunes électeurs, en particulier chez les primo-votants. Le parti, qui possède des liens historiques avec les néo-nazis (dont il s’est éloigné pour tenter de devenir fréquentable) et qui est issu du mouvement raciste "Gardez la Suède suédoise", a une idéologie à la fois conservatrice et sociale. Il veut restreindre l’accès à l’interruption volontaire de grossesse, faire cesser ce que le secrétaire du parti, Björn Söder, qualifie de « normalisation de l’homosexualité », s’oppose au féminisme, etc. Mais, à l’image des forces de gauche (et du parti d’extrême droite du Parti du peuple dano