Europe : l’hypothèse Verhofstadt

Invitée de l’émission "Parcours européen" sur Fréquence protestante, samedi 18 avril, Marielle de Sarnez, première vice-présidente du Modem, tête de liste de ce parti pour les élections européennes en Ile-de France, s’est déclarée opposée à la reconduction de José Manuel Barroso à la présidence de la Commission européenne. Elle s’est dite favorable à une candidature de l’ancien premier ministre belge Guy Verhofstadt. Extraits de l’entretien.

Commission européenne

Nicolas Sarkozy joue avec le feu, et il n’est pas le seul. Ils veulent un président de la Commission faible pour que les Etats existent. Mais ils existeraient même avec un président de la Commission fort. Je n’ai pas peur d’un président fort, créatif, vigoureux. Il est important qu’il y ait un lieu où l’intérêt général de l’Europe soit défendu. Si on avait eu un président du type de Jacques Delors, l’initiative européenne aurait été présente face à la crise. Mais on a eu une Commission extrêmement affaiblie. J’en veux à José Manuel Barroso, j’en veux aussi aux chefs d’Etat et de gouvernement. C’est eux qui l’ont choisi et qui se sont accordés pour qu’il ne risque de faire de l’ombre à personne, à aucun d’entre eux. Je combats et condamne une nouvelle candidature de M. Barroso, je vais essayer de travailler, avec d’autres, à une alternative. Je pense à Guy Verhostadt, qui est un grand Européen, qui a l’énergie, qui aurait le savoir-faire. Il y en a d’autres.

Parlement européen

Pourquoi le Parlement ne siègerait-il pas uniquement à Strasbourg ? A Bruxelles il y a la Commission. On peut imaginer que le Parlement ne siège qu’à Strasbourg. S’il faut choisir entre Bruxelles et Strasbourg, voilà mon choix.

Présidence française de l’UE

Il y a eu beaucoup de communication pendant cette présidence, mais la communication n’est pas tout dans la vie. Se soucier davantage du fond que de la forme, c’est largement plus indispensable. Au fond, les problèmes que connaissait l’Europe avant cette présidence, elle les connaît encore au lendemain de cette présidence. Rien ne s’est trouvé réglé. Il n’y a eu aucune action de fond.

Elargissement

Je faisais partie de ceux qui disaient : approfondissons d’abord avant d’élargir. Cet approfondissement a été loupé. J’ai regretté qu’il n’y ait pas eu d’approfondissement. Ensuite j’ai été étonnée de la manière dont les responsables français n’ont pas su gérer cet élargissement, n’ont pas su l’expliquer aux Français. On a eu l’élargissement honteux. Pour ces peuples cela signifiait une liberté retrouvée, un vieux rêve pour eux. On a été incapable de gérer cela avec un minimum de générosité et de prise en compte de l’histoire.

Turquie

Je n’aime pas que cette question soit agitée avant chaque élection, avant chaque rendez-vous européen, par des personnalités françaises, avec des arrière-pensées politiciennes. Je pense qu’il faut des frontières à l’Europe et qu’elle ne doit pas forcément s’étendre à la Turquie. De toute façon, la Turquie ne respecte aujourd’hui aucun des critères requis, notamment en matière de libertés publiques et de droits de l’homme. Le génocide arménien n’est toujours pas reconnu. La question des minorités kurdes n’est pas prise en compte. Et la Turquie occupe toujours une partie d’un pays membre de l’Union, Chypre. Agiter cette question comme si l’adhésion était pour demain matin, pour moi ce n’est pas responsable. Je suis plus que réservée sur l’adhésion de la Turquie mais ne faisons pas de cette question un affaire de basse politique. Je ne souhaite pas que l’Europe se referme comme si elle était ce que certains appellent un club chrétien mais il est important que l’Europe ait des frontières et faut bien s’arrêter à un moment. Si la Turquie entre dans l’Union, pourquoi pas l’Ukraine ? Et si l’Ukraine entre, pourquoi pas la Géorgie, puis la Russie ? Soyons raisonnables. Nous avons une Europe politique à construire mais pour la construire on ne peut pas continuer indéfiniment à l’élargir.