François Hollande a réussi son examen de passage en Afrique. Le président de la République a trouvé les mots pour célébrer la démocratie et le développement sans donner des leçons de morale. Le choix de Dakar était doublement judicieux. Le Sénégal a connu au début de l’année une alternance démocratique, qui n’était pas la première pour ce grand pays d’Afrique de l’Ouest mais qui n’allait pas de soi après les manipulations de l’ancien président Wade pour rester au pouvoir. Et puis c’est à Dakar que Nicolas Sarkozy avait prononcé son premier discours sur l’Afrique : « l’homme africain n’est pas assez entré dans l’Histoire », lui avait fait dire sa plume, Henri Guaino. François Hollande devait s’en démarquer sans donner l’impression de prendre systématiquement le contrepied de son prédécesseur. Il a souligné au contraire le potentiel de développement du continent.
Il ne s’est pas contenté de parler. Il a joint le geste au discours. A Kinshasa, une étape controversée bien qu’il ne se soit pas agi d’une visite bilatérale mais du sommet de la francophonie, il n’a pas seulement rappelé la nécessité de respecter les droits de l’homme au président Kabila. A l’institut culturel français, il a dévoilé une plaque en l’honneur de Floribert Chebeya, un militant pour les droits de l’homme assassiné. Il a pris le risque de déplaire aux autorités de l’ancien Congo belge, le plus grand pays francophone d’Afrique mais il l’a fait en toute connaissance de cause, en assumant les conséquences économiques que ses prises de position pourraient entrainer.
C’est la fin de la « Françafrique », a répété François Hollande. Il lui reste à tenir cette ligne pendant tout son quinquennat. Car il n’est pas le premier chef de l’Etat à le dire. A sa manière, avec le discours de La Baule en 1990, François Mitterrand avait dit la même chose. Mais le premier président socialiste de la Vème République était encore lié à quelques potentats africains par les liens noués sous la IVème . Jacques Chirac, malgré quelques velléités d’émancipation, était toujours tributaire des vieux réseaux gaullistes qui étaient en Afrique noire comme en terrain conquis grâce à des échanges de bons procédés avec les clans au pouvoir. Nicolas Sarkozy ne s’en était pas complètement émancipé bien que le contexte politique local et international ait changé.
François Hollande s’est donné les moyens de ne pas retomber dans les vieilles ornières. Il a confié le ministère de la coopération devenu ministère du développement à un écologiste qui n’a pas de conseiller Afrique et supprimé la cellule Afrique de l’Elysée. La politique africaine de la France est confiée au Quai d’Orsay et à ses diplomates moins enclins à s’adonner à des combines douteuses que les hommes d’affaires et autres intermédiaires du marigot africain. Il lui reste à tenir bon face aux sollicitations de toutes sortes qui ne manqueront de lui arriver, aux risques de perdre des marchés face à des pays concurrents moins scrupuleux et aux impératifs de la politique internationale. S’il y parvient, il y aura une nouvelle page de l’histoire des relations de la France et de ses anciennes colonies.