L’élection de François Hollande est bonne pour l’Europe

L’équipe de Boulevard-Extérieur propose à ses lecteurs chaque mardi son point de vue sur un sujet d’actualité internationale.  

En politique internationale, les Etats n’aiment pas beaucoup le changement. Ils se méfient des nouvelles têtes, qui risquent de perturber les équilibres établis. Ils préfèrent en général le sortant à son vainqueur. On comprend que la victoire de François Hollande soit accueillie avec réserve, en dépit des formules de politesse, à Washington, Berlin ou Londres. Les chefs d’Etat ou de gouvernement, qui se retrouvent plusieurs fois par an dans des sommets diplomatiques, ont pris des habitudes, noué des contacts, établi des réseaux. L’arrivée d’un nouveau venu les oblige à réviser leurs manières de faire.

 L’élection de François Mitterrand en 1981 avait inquiété plusieurs des partenaires de la France. L’entrée de ministres communistes au gouvernement et les élans tiers-mondistes du nouveau président suscitaient des appréhensions. Avec François Hollande, qui se présente comme le successeur de François Mitterrand, ces craintes n’ont pas lieu d’être, et les dirigeants étrangers le savent bien. A l’exception du retrait anticipé des troupes françaises d’Afghanistan, le président élu n’a rien promis qui puisse troubler l’ordre des choses. Il n’entend pas revenir sur le retour de la France dans le commandement intégré de l’OTAN. Il ne se distingue pas deses partenaires habituels sur les dossiers chauds de l’Iran, de la Syrie ou de la Palestine. 

 Pourtant il est un domaine dans lequel l’élection de François Hollande peut changer la donne : c’est celui de l’Europe. La renégociation du traité de stabilité, dont il a fait l’axe principal de sa campagne, est une initiative forte, par laquelle il peut imprimer sa marque. Sa proposition a déjà fait bouger les lignes en Europe, où désormais l’idée d’un pacte de croissance, en complément du pacte budgétaire, a de nombreux partisans. La victoire de François Hollande va accroître la pression sur Angela Merkel.

 On sait que les dirigeants européens ne conçoivent pas tous de la même manière la relance de la croissance, mais des compromis sont possibles, que le nouveau président français va tenter de promouvoir. En écho à la « réorientation » de l’Europe souhaitée par François Hollande, le chef du gouvernement italien, Mario Monti, a parlé d’une « inflexion » de la politique européenne. Le président de la Commission, José Manuel Barroso, a noté des « convergences » entre les propositions du président élu et celles de l’exécutif européen. Des négociations vont s’engager. Ce premier test sera important pour la crédibilité de François Hollande.

 L’élection du nouveau président français, Européen convaincu dans la lignée de Jacques Delors, son ancien mentor, est de nature à renforcer l’unité de l’Europe au moment où la solidarité des Etats membres est plus que jamais à l’ordre du jour.Elle pourrait aussi favoriser, à plus long terme, le retour de la gauche au pouvoir dans plusieurs pays de l’Union, à commencer par l’Allemagne et l’Italie en 2013. Le « changement » voulu par le candidat ne se limitera peut-être pas à la France.