La France en appelle à l’Assemblée générale de l’ONU

Malgré les mises en demeure de la Ligue arabe et les pressions de la communauté internationale, la répression se poursuit en Syrie contre les manifestants. La France a rappelé son ambassadeur à Damas, Eric Chevallier. L’Union européenne a élargi les sanctions. Toutefois le Conseil de sécurité reste paralysé par les vetos russe et chinois. La diplomatie française cherche une issue en passant par l’Assemblée générale de l’ONU.

Depuis qu’Alain Juppé a honoré de sa présence une réunion d’opposants syriens au régime de Bachar el Assad, en octobre au théâtre de l’Odéon à Paris, la France est en pointe dans la recherche d’une issue pacifique à la crise en Syrie. Après le véto opposé par la Russie et la Chine à une résolution du Conseil de sécurité de l’ONU condamnant la répression menée par le régime, la diplomatie française a œuvré pour que l’Union européenne décide puis aggrave les sanctions contre Damas. Avec les Britanniques et les Américains, elle cherche maintenant à contourner le Conseil en s’adressant directement à l’Assemblée générale de l’organisation internationale. Elle espère qu’un texte y sera adopté à une large majorité rappelant la « responsabilité de protéger » qui incombe à la communauté internationale quand des dirigeants se retournent contre leur peuple.

Les Russes et les Chinois seraient ainsi placés au pied du mur, de même que les pays émergents représentés actuellement au Conseil de sécurité. Ceux-ci se sont abstenus lors du vote de la résolution sur la Syrie, au nom de la défense de la souveraineté nationale.

La France estime d’autre part que la décision de la Ligue arabe de suspendre la Syrie est un tournant dans la crise. « Trop c’est trop » : c’est l’interprétation donnée à Paris de cette décision des pays arabes. Toutefois, on fait la distinction avec ce qui s’est passé au mois de mars dernier à propos de la Libye. La Ligue arabe avait alors accepté une intervention extérieure pour créer une zone d’interdiction aérienne au-dessus de ce pays. Dans le cas de la Syrie, pas question d’ingérence extérieure, qui pourrait déclencher une conflagration généralisée dans une région ultra-sensible.

Le ministre des affaires étrangères, Alain Juppé, a entrepris une tournée en Turquie et dans les pays du Golfe pour rallier le plus de soutiens possible aux thèses françaises. Celles-ci tiennent en trois points :

- pas d’intervention unilatérale, contrairement aux déclarations de certains opposants syriens (mais ils ne sont pas tous d’accord entre eux) qui souhaiteraient une action de la Turquie. A propos de la Libye, Nicolas Sarkozy avait laissé entendre que la France privilégiait l’hypothèse d’un mandat de l’ONU mais qu’elle pourrait agir sans, en cas d’urgence. Rien de tel, jusqu’à présent, à propos de la Syrie.

- La France n’est pas, en principe, favorable à la politique du regime change, mais dans le cas de la Syrie, elle soutient un changement profond menant à des réformes sérieuses et elle ne voit pas comment ce serait possible avec Bachar el Assad, qui « a perdu toute légitimité ». « Il est trop tard », a répété Alain Juppé à Ankara, pour que le régime fasse amende honorable.

- L’accentuation de la pression internationale et « l’héroïsme » des populations syriennes devraient amener Moscou et Pékin à revoir leur position. C’est un espoir dont on sait, à Paris, qu’il peut mettre du temps à se concrétiser. La France ne prendra pas le risque d’un nouveau veto au Conseil de sécurité. Elle l’a fait en octobre à l’inverse d’une pratique qui privilégie la recherche d’un consensus avant toute mise aux voix ou le retrait du texte quand la majorité n’est pas acquise. Mais en obligeant la Russie et la Chine à se découvrir, les Occidentaux les obligent à prendre leurs responsabilités face à une répression qui a fait plus de 3500 morts.