Sans jeter un regard sur le passé, nous ne pouvons pas réfléchir aux relations entre l’OTAN et la Fédération de Russie. L’histoire des relations politiques et stratégiques dans l’Europe du XXè siècle est indissolublement liée à la rivalité entre les Etats du pacte de Varsovie réunis autour de l’URSS et les membres de l’OTAN. C’est pourquoi il est maintenant de notre responsabilité d’écrire l’histoire du nouveau siècle.
Ensemble nous pouvons gagner beaucoup : la coopération entre l’OTAN et la Russie dans le domaine de la sécurité peut être profitable aux deux parties. Nous avons beaucoup d’intérêts en commun, comme la stabilisation de l’Afghanistan, la lutte contre le terrorisme, la piraterie, la prolifération des armes de destruction massive. La solution pacifique des « conflits gelés », un reliquat des temps anciens quand le monde était encore divisé en deux blocs, est également importante.
En décembre 2008, la réunion des ministres des affaires étrangères [de l’OTAN et de la Russie] a lancé un signal clair en direction de nouvelles négociations. Cependant il ne suffit pas de soigner les contacts politiques. Un véritable partenariat est bâti sur la coopération quotidienne sur le terrain […].
Les efforts de l’OTAN en faveur d’une nouvelle approche de la Russie devrait trouver une réponse dans la volonté de Moscou de s’engager dans un véritable partenariat avec l’OTAN. Par là, j’entends un partenariat reposant sur la confiance, une communauté d’intérêts, de principes et de comportements ainsi que la volonté d’affronter les menaces et les défis du XXIè siècle.
Qu’est-ce que cela signifie, vu par un ancien membre du pacte de Varsovie ? En tant que membre actuel de l’OTAN, la Pologne dispose d’une expérience politique et historique qui peut être utile. Celle-ci nous permet de comprendre aussi bien la sensibilité, particulière de la Russie en ce qui concerne la politique de sécurité que les préoccupations et les espoirs des Etats postcommunistes et postsoviétiques. La Pologne peut aussi proposer sa longue expérience de l’adaptation aux standards de l’Union européenne et de l’OTAN dans les domaines politiques, économiques, sociaux et stratégiques.
Moscou a fait part, ces derniers mois, de son insatisfaction concernant l’architecture européenne de sécurité et proposé des changements profonds. La proposition russe mérite un examen sérieux. Quelques uns des points proposés semblent cependant avoir pour but de limiter un élargissement des structures euro-atlantiques à l’Est et de miner l’indépendance des processus de décision au sein de l’OTAN. Je suis convaincu que nous avons besoin actuellement plus d’une discussion ouverte et d’un effort de coopération que de nouvelles formules juridiques.
Les participants au dialogue entre l’OTAN et la Russie devraient constituer une communauté de principes, de valeurs et de règles de comportement tels qu’écrits dans les accords de coopération entre la Russie et l’OTAN, par exemple l’Acte fondateur de 1997 ou la déclaration de Rome de 2002. Malheureusement quelques évolutions internationales ont montré que beaucoup reste à faire avant qu’on puisse parler d’une telle communauté.
Le conflit russo-géorgien de 2008 ou les manœuvres Zapad/Ladoga de 2009 en Biélorussie et dans le nord de la Russie en sont les exemples les plus frappants. Il reste beaucoup à faire pour supprimer les concepts et les schémas hérités de la guerre froide.
Nous voulons une Russie sûre et nous avons besoin d’une Russie sûre d’elle-même et stable. Ce pays doit cependant être prévisible, coopératif et – de préférence – démocratique. Seule une telle Russie peut vivre en paix avec elle-même et avec ses voisins.
La Pologne a toujours souhaité la construction et la consolidation d’une communauté de valeurs dans laquelle la Russie serait un partenaire naturel. L’histoire tragique de notre nation témoigne du coût du non-respect des principes du droit international. Pour nous, des institutions telles que l’OTAN, l’Union européenne et l’OSCE devraient rester le cœur de notre communauté.
Vu de Pologne les perspectives de coopération entre l’OTAN et la Russie sont prometteuses. Nous sommes prêts à poursuivre la construction d’une communauté de sécurité sur le continent européen. En ce qui concerne Varsovie, l’Alliance atlantique incarne cette communauté. Le souhait de plusieurs Etats européens d’adhérer à l’OTAN est naturel et positif. Nous pensons que le processus d’élargissement de l’Alliance – dont la Russie ne devrait pas être exclue d’emblée – représente une occasion d’étendre la zone de stabilité et de sécurité à des endroits où il n’existe ni l’une ni l’autre.
L’élargissement de l’OTAN et le processus d’adhésion représentent la possibilité de dépasser la division séculaire de l’Europe entre l’Est et l’Ouest avec leurs différentes philosophies. Nous croyons que la Russie, en tant que grand partenaire de l’Alliance, peut profiter de la stabilité que celle-ci crée dans tout le voisinage, et que la Russie fera le choix de renforcer encore cette stabilité.