La politique africaine de François Hollande à l’épreuve

Chaque mardi, le point de vue de la rédaction de Boulevard-Extérieur sur un sujet de politique internationale.

 François Hollande a défini sa politique africaine dans son « discours de Dakar », comme l’avait fait avant lui Nicolas Sarkozy. La similitude s’arrête là, la tonalité des deux interventions étant nettement différente. Pour la énième fois, un président de la République française a annoncé la fin de la Françafrique, c’est-à-dire de cette consanguinité malsaine entre l’ancienne puissance coloniale et les potentats africains. La France allait traiter les peuples africains en adultes et les soutenir dans leurs aspirations démocratiques. Fini l’interventionnisme pour mettre ou laisser en place des « amis de la France » souvent peu recommandables.

Cette volonté de François Hollande n’a pas tardé à être mise à l’épreuve, au Mali puis en République centrafricaine. Les deux situations ne sont pas exactement comparables. Si au Mali comme en Centrafrique des rebelles menacent le pouvoir central, dans le premier cas les sécessionnistes ont fait – au moins provisoirement – cause commune avec les fondamentalistes islamistes d’AQMI (Al Qaida au Maghreb islamique) qui ont pris des citoyens européens en otages, dans le second deux factions s’opposent pour le contrôle du pouvoir central.

Dans les deux cas, François Hollande a décidé qu’il n’y aurait pas d’intervention directe de la France, ce qui n’exclut pas la présence de forces françaises. En Centrafrique, leur mission est de protéger les ressortissants français et européens qui pourraient être pris dans les combats entre troupes loyalistes et rebelles, pas de maintenir au pouvoir François Bozizé, lui-même arrivé à la présidence à Bangui en 2003 à la suite d’une opération armée. Le gouvernement français ne devrait pas avoir grand mal à s’en tenir là.

Au Mali, les soldats français agiront en appui de l’armée malienne et de la force africaine mise sur pied par la Communauté des Etats d’Afrique de l’Ouest (CEDEAO). Les Français ne seront pas seuls, quelque 400 militaires venus de plusieurs pays de l’Union européenne participeront à la formation des soldats africains et leur apporteront une aide logistique (renseignement, transport, équipement).

En République centrafricaine, Paris considère qu’il s’agit de l’opposition entre deux groupes pour le contrôle du pouvoir dans un seul pays. Au Mali, le défi est stratégique. Il concerne l’ensemble du Sahel et la menace terroriste vise aussi l’Europe. C’est la raison pour laquelle la France déploie depuis plusieurs mois des efforts pour intéresser ses partenaires européens et les Américains à la situation qui prévaut au Nord-Mali. En l’occurrence, François Hollande se situe dans la continuité de la politique de Nicolas Sarkozy.

Sur l’analyse, il n’y a pas de désaccord entre Européens et Américains. Sur les modalités de l’engagement et ses conséquences, les avis divergent. La combativité des soldats maliens, l’adaptabilité des forces de la CEDEAO à un terrain qu’elles ne connaissent pas, les répercussions d’une intervention sur les pays voisins du Mali, le découplage entre dialogue politique avec les sécessionnistes touareg et la répression des groupes terroristes, autant de points sur lesquels les représentants de la communauté internationale s’interrogent. La crainte est évidemment que les soldats africains aient besoin de plus que d’un simple soutien logistique et que la France et ses alliés soient rapidement placés devant un choix difficile : assister à la débâcle de leurs protégés ou s’engager plus avant, d’abord avec des moyens aériens, comme en Libye, voire avec des troupes au sol. François Hollande a solennellement exclu cette hypothèse. Jusqu’à quand ?