Le pays est officiellement autorisé à enrichir de l’uranium pour produire le combustible nécessaire à la propulsion de ses sous-marins nucléaires, mais en définitive, personne ne connaît réellement la destination finale du combustible livré aux bases militaires.
Le Brésil développait trois programmes militaires secrets entre 1975 et 1990, à la disposition de chacune de ses armes qui les ont explorés séparément. La marine a été la plus performante et, grâce à des centrifugeuses à haute performance, importées tout comme la matière première, l’hexafluorure d’uranium, a pu faire fonctionner de petits réacteurs pour ses sous-marins. C’est alors que le pays a procédé à une explosion nucléaire souterraine « pacifique », suivant en cela l’exemple de l’Inde. Selon le précédent président de la Commission nationale de l’énergie atomique, les militaires brésiliens, en 1990, étaient sur le point de fabriquer une bombe. Avec l’avènement de la démocratisation, les programmes nucléaires secrets ont été abandonnés et, selon la constitution de 1988, les activités afférentes ont été limitées aux « utilisations pacifiques ». Brasilia a ratifié le Traité d’interdiction des armes nucléaires en Amérique latine et les Caraïbes en 1994 et, en 1998, signé le TNP. Le flirt avec la bombe était apparemment terminé. Mais Lula da Silva semble l’avoir relancé. Quelques mois seulement après son élection à la Présidence, en 2003, le développement du son sous-marin nucléaire a été réactivé. Au demeurant, au cours de sa campagne électorale, Lula avait critiqué le TNP, le qualifiant d’injuste et d’obsolète. Depuis, s’il n’est pas revenu sur sa signature, le pays a durci ostensiblement ses conditions d’accueil aux inspecteurs de l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA), notamment, en 2004, en ce qui concerne les conditions de leurs visites à la nouvelle usine d’enrichissement de Resende, près de Rio de Janeiro. Et il n’est plus question pour eux de réclamer la transparence du programme nucléaire sous-marin.
"Ouvert à la négociation"
Que cache donc le Brésil ? Qui y a-t-il derrière le développement de petits réacteurs pour sous-marins, une technologie que plusieurs pays maîtrisent depuis des décennies, si ce n’est pas un programme d’armement nucléaire ? Le Vice-Président José Alencar a donné une pertinence à cette hypothèse lorsque, en septembre 2009, il a ouvertement plaidé pour l’acquisition de l’arme nucléaire, nécessaire, a-t-il souligné, pour un pays qui dispose de 15 000 km de frontières, de riches réserves pétrolières en mer, et qui cherche à accroître son importance sur la scène internationale. Et quand il lui a été rappelé que le Brésil avait signé le TNP, il a répondu calmement que ce sujet était « ouvert à la négociation ».
Il n’existe encore aucune preuve tangible de l’implication du Brésil dans des activités nucléaires, mais, insiste l’auteur de l’article du Spiegel, les événements passés suggèrent qu’il est hautement probable qu’il soit en train de travailler sur un programme militaire nucléaire. Ni la constitution, ni le TNP ne peuvent empêcher cette éventualité. Tout ce qui pourrait permettre qu’une résolution parlementaire puisse lever les obstacles serait que Lula da Silva dise que les Etats-Unis n’ont pas vocation à détenir le monopole des armes nucléaires dans les Amériques. Dans ce cas, l’Amérique latine cesserait d’être une région dénucléarisée – et le rêve d’Obama d’un monde sans armes nucléaires prendrait fin.