Le génie de l’Amérique

Dans son premier discours en tant que président des Etats-Unis, Barack Obama a tenu à réaffirmer les valeurs fondamentales de l’Amérique, celles des Pères fondateurs, des pionniers, des adversaires du communisme et du fascisme.

Doit-on insister sur le messager ou sur le message ? Après le discours d’investiture de Barack Obama, la majorité des commentaires a insisté, à juste titre, sur le symbole représenté par l’arrivée à la Maison-Blanche du premier Afro-américain. Toutefois, justement parce que le nouveau président a mis beaucoup de soin, depuis qu’il s’était lancé dans la bataille électorale, à ne pas se présenter comme le candidat des Noirs mais comme un Américain en mesure d’incarner les valeurs traditionnelles de l’Amérique à cause de ses origines mêmes, Barack Obama était en position d’annoncer que l’Amérique était de retour. Et c’est ce qu’il a fait avec beaucoup de force, mardi 20 janvier, sur les marches du Capitole. L’adresse au monde « des plus grandes capitales jusqu’au plus petit village où mon père est né […], sachez que nous sommes prêts à montrer la voie une nouvelle fois ».

George W. Bush avait aussi des accents messianiques. Mais après avoir annoncé une présidence « modeste », il avait fait de la promotion de la démocratie, y compris par la force, un des objectifs de ses deux mandats. Barack Obama introduit une rupture avec son prédécesseur en mettant l’accent sur les valeurs fondamentales de l’Amérique, celles des pères fondateurs, des pionniers, des adversaires du communisme et du fascisme. Les victoires du passé n’ont pas été acquises par la force des armes, ou pas seulement par la force des armes. Mais « par des alliances robustes et des convictions durables ». Les générations précédentes « ont compris que la puissance seule ne peut pas nous protéger, a poursuivi le président, pas plus qu’elle ne nous donne le droit d’agir selon notre bon plaisir. Au contraire, elles savaient que notre puissance augmente quand nous en usons avec prudence ; que notre sécurité procède de la justesse de notre cause, la force de notre exemple, les qualités sereines d’humilité et de retenue. »

Confronté à une crise financière et économique sans précédent depuis les années 1930, et à deux guerres en Irak et en Afghanistan, face aux défis et aux méthodes qui peuvent être nouveaux, Barack Obama en appelle aux « valeurs sur lesquelles repose notre succès – le travail dur, le courage, l’honnêteté, la tolérance et la courtoisie, la loyauté et le patriotisme —, ces choses sont anciennes […] Ce qui est nécessaire, c’est un retour à ces valeurs. » On est donc loin du relativisme des valeurs qui caractérisait le mouvement progressiste américain depuis les années 1960. Le fiasco de la guerre d’Irak et la crise économique ne semblent pas devoir entraîner les mêmes conséquences que la défaite au Vietnam. L’heure est à la réassurance sur les valeurs de base de l’histoire américaine, d’autant plus crédible aujourd’hui qu’elles ne seraient plus personnifiées par un White anglo-saxon protestant.

C’est ce que deux auteurs américains, Eric Lane et Michael Oreske, appellent « le génie de l’Amérique » (Ed. Odile Jacob).