Mal accueilli à Bruxelles il y a un mois, le pacte de compétitivité proposé par l’Allemagne et soutenu par la France a été formellement adopté vendredi 11 mars par les dix-sept Etats de la zone euro. Des concessions ont été négociées pour rendre ce plan plus acceptable par les pays qui contestaient certaines de ses dispositions. Il sera soumis au Conseil européen, les 24 et 25 mars à Bruxelles, pour permettre aux Etats extérieurs à la zone euro de dire s’ils ont l’intention, ou non, d’y participer. Ce « pacte pour l’euro », dont l’ambition est de renforcer le pilier économique de l’Union monétaire, devrait favoriser la mise en place d’un « gouvernement économique » de l’Europe fondé sur une harmonisation des politiques nationales.
Il a pour objet, selon les Dix-Sept, de « donner une force nouvelle à la coordination des politiques économiques dans la zone euro » et de « parvenir à un plus haut niveau de convergence » afin d’améliorer la compétitivité. La compétitivité, expliquent-ils, est essentielle pour assurer une croissance plus rapide et plus durable mais aussi pour « préserver les modèles sociaux » des Etats européens. Ils précisent que ce nouveau pacte doit être compatible avec les instruments existants, notamment le pacte de stabilité et de croissance, et qu’il s’appliquera à des domaines d’action prioritaires pour lesquels des « objectifs communs » seront fixés au niveau européen.
Des politiques salariales harmonisées
La plupart de ces domaines d’action relèvent de la compétence des Etats membres, et non de celle de l’UE. La fixation d’objectifs communs marque donc une étape nouvelle dans la construction de l’union économique. Le pacte s’immisce ainsi dans les politiques salariales en proposant de « réexaminer les dispositifs de fixation des salaires », ainsi que « les mécanismes d’indexation », et en demandant « que les accords salariaux dans le secteur public viennent soutenir les efforts de compétitivité consentis dans le secteur privé ». Il s’intéresse aux politiques sociales en appelant au développement de la « flexi-sécurité » et à l’accroissement de la participation au marché du travail.
Il invite aussi les Etats à améliorer leurs systèmes d’enseignement et de recherche. Il leur recommande d’adapter le système des retraites à la situation démographique, par exemple en adaptant l’âge réel de la retraite à l’espérance de vie, en limitant les régimes de préretraite ou en favorisant l’emploi des travailleurs âgés. En matière de fiscalité, il préconise l’établissement d’une assiette commune de l’impôt sur les sociétés, renonçant – concession faite à l’Irlande – à préconiser une harmonisation des taux. Dans tous ces domaines, les Etats devront prendre chaque année « des engagements nationaux concrets ».
Une taxe sur les transactions financières
Les Dix-Sept ont également convenu de « la nécessité de réfléchir à l’introduction d’une taxe sur les transactions financières ». Cet engagement apparaît comme une réponse aux socialistes européens qui, les 4 et 5 mars à Athènes, ont présenté un contre-projet au pacte franco-allemand, dont l’une des principales dispositions est précisément la création d’une telle taxe.
Les socialistes considèrent que les mesures adoptées à Bruxelles « sont marquées par une vision économiquement dangereuse et socialement injuste » des politiques européennes, selon les termes d’un communiqué de Martine Aubry. La première secrétaire du PS estime que ce pacte, « en imposant une austérité massive », va « ralentir la sortie de crise ». Selon elle, une alternative existe : « financer la sortie de crise avec une taxe sur les transactions financières ».
Le débat est ouvert entre le pacte adopté par les dix-sept gouvernements de la zone euro, à majorité conservatrice, et le contre-pacte présenté par le Parti socialiste européen. On constate qu’à droite comme à gauche on est conscient de la nécessité pour les Européens de s’unir plus étroitement face à la crise. La discussion porte sur le contenu des mesures proposées, mais non sur le principe de la convergence des politiques. En ce sens, elle marque un progrès pour l’Europe.