Les difficultés commencent pour Obama

Après les dernières primaires du Montana et du Dakota du sud, mardi 3 juin, Barack Obama pourra dire comme Léon Blum au lendemain de la victoire du Front populaire : « les difficultés commencent ». Barak Obama est quasiment assuré d’emporter l’investiture démocrate, mais ses chances de l’emporter au final (le 4 novembre) contre le Républicain John McCain ont été hypothéquées par l’interminable duel avec Hillary Clinton.

Sans doute la présence d’un candidat noir a-t-elle contribué à mobiliser un électorat qui d’ordinaire ne s’intéresse guère à la politique. Des dizaines de milliers de Noirs (et de jeunes) se sont inscrits pour pouvoir voter aux primaires et plus tard à la présidentielle. Mais Obama est apparu à plusieurs reprises soit comme un candidat communautaire, soit comme l’homme d’une élite coupée des véritables préoccupations de l’Américain moyen. Ce sont ces classes moyennes blanches qui ont voté en masse pour Hillary Clinton et qui se déclarent à moins de 50% disposées à voter pour un candidat noir. Ce que Barack Obama peut gagner du côté des nouveaux électeurs, il risque de le perdre du côté des cols bleus, soutiens traditionnels du Parti démocrate. Ses partisans se rappellent avec effroi l’équation de 1972. Le candidat démocrate George McGovern avait alors l’appui des minorités, des élites et des jeunes. Il fut balayé par Richard Nixon.

Méfiance de la communauté juive

De la même manière, la volonté d’Obama de rompre en politique étrangère avec la méthode Bush attire une grande partie des Américains qui sont hostiles à la guerre en Irak ou qui mettent en doute les vertus de l’unilatéralisme. Une majorité d’entre eux comprend que les Etats-Unis, aussi puissants soient-ils, ne peuvent pas agir seuls, se passer d’alliés et imposer leur volonté aux autres. Mais en même temps, nombreux sont ceux qui mettent en doute le patriotisme d’Obama. Or le patriotisme, le culte du drapeau -jusqu’à une date récente le sénateur de l’Illinois refusait de porter le pin aux couleurs de la bannière étoilée au revers de sa veste-, sont des valeurs respectées outre-Atlantique. Ses adversaires, qui ne se recrutent pas tous dans le camp républicain, demandent benoîtement : "vous savez quel est son deuxième prénom ? Hussein !" Et les experts de s’interroger pour savoir si les origines musulmanes de son père seraient un atout ou un handicap dans le monde arabe, et inversement aux Etats-Unis. Une chose est sûre : la communauté juive qui a longtemps voté en majorité pour les Démocrates, au moins jusqu’en 2000 et la candidature de George W. Bush, se montre méfiante vis-à-vis de ce candidat qui sort de l’ordinaire.

L’enthousiasme des supporteurs de Barack Obama ne doit pas faire illusion. Même si le slogan « en choisissant McCain vous votez pour un troisième mandat de George Bush » peut porter auprès d’électeurs déçus, la bataille qui s’annonce sera au moins aussi dure que celle des derniers mois. Et l’issue est encore très incertaine.