Les priorités de Budapest

La révision du traité de Lisbonne, l’adhésion de la Croatie et la définition d’une stratégie danubienne seront les principales priorités de Budapest au premier semestre 2011.

Après la Slovénie en 2008 et la République tchèque en 2009, la Hongrie sera, à partir du 1er janvier 2011, le troisième pays de l’ancien bloc de l’Est à exercer la présidence tournante de l’Union européenne. La Pologne lui succédera au second semestre. La présidence tournante a perdu, il est vrai, une partie de son lustre depuis que le traité de Lisbonne l’a privée de la présidence du Conseil européen, confiée au nouveau président permanent, le Belge Herman Van Rompuy, et de celle du conseil des ministres des affaires étrangères, assurée désormais par la haute représentante, la Britannique Catherine Ashton, mais elle n’en garde pas moins une certaine importance dans la définition du calendrier comme dans gestion des affaires courantes, où son rôle est de rapprocher les points de vue pour faire avancer les dossiers.

Selon le nouvel ambassadeur hongrois à Paris, Laszlo Trocsanyi, qui était l’invité le 1er décembre de l’association Alcyon, Budapest aborde cette présidence avec « réalisme ». Réalisme quant au rôle des pays « petits » et « moyens » face aux « grands » (avec 10 millions d’habitants, la Hongrie appartient au groupe des pays « moyens » en Europe). Réalisme dans la prise de conscience d’un euroscepticisme en progression. Réalisme aussi dans le sentiment que la méthode intergouvernementale tend à se renforcer au détriment de la méthode communautaire, donnant aux « grands » pays plus de poids qu’aux « petits » et aux « moyens ».

Répondre aux urgences du moment

 

M. Trocsanyi, qui fut ambassadeur à Bruxelles de 2000 à 2004, juste avant l’entrée de son pays dans l’Union européenne, se dit déçu par les divisions de l’Europe. Il se rappelle que, le jour de l’adhésion, le 1er mai 2004, les ambassadeurs occidentaux dans la capitale belge ont boudé les festivités organisées sur la Grand-place par les ambassadeurs des nouveaux pays membres. L’Europe n’en continue pas moins d’avancer, malgré ses querelles internes. Sachant que, le plus souvent, l’actualité bouscule les programmes les mieux établis, il assure que la Hongrie s’efforcera de répondre en priorité aux urgences du moment. Quelles sont-elles ?

 

D’abord, à l’évidence, la gestion de la sortie de crise, dont les difficultés de l’Irlande soulignent les incertitudes. A la Hongrie, qui n’est pas encore membre de la zone euro, de tenter à son tour d’améliorer la gouvernance économique de l’UE. Dans l’immédiat, il lui faudra faire adopter le budget pour 2011, si celui-ci ne l’est pas avant le 31 décembre 2010.

 

Ensuite, la révision du traité de Lisbonne, destinée à pérenniser le mécanisme de sauvetage des Etats menacés de faillite. M. Trocsanyi, qui n’oublie pas la laborieuse gestation du traité, souhaite que la modification soit aussi limitée que possible.

 

Un signal positif en direction des Balkans

 

Le troisième dossier est celui de l’élargissement. Les négociations avec la Croatie arrivent à leur terme. Le traité d’adhésion avec ce pays, qui fut pendant huit siècles « associé » au royaume de Hongrie, pourrait être signé avant la fin de l’année 2011. Ce serait, selon l’ambassadeur hongrois, un signal positif en direction des Balkans. Avec la Turquie, en revanche, M.Trocsanyi ne voit pas d’ouverture possible dans un proche avenir, même si la poursuite des négociations est « une obligation morale ».

 

L’ambassadeur hongrois évoque aussi le dossier de la défense européenne. Il s’étonne que la France et la Grande-Bretagne aient choisi, le 2 novembre à Londres, une approche bilatérale plutôt qu’une approche européenne. Il se demande comment organiser une défense européenne sans une force européenne. Le sujet sera abordé par la présidence hongroise. Il devrait être l’une des priorités de la présidence polonaise au second semestre.

 

Une stratégie commune aux pays du Danube

 

Parmi les autres thèmes à l’ordre du jour de la présidence hongroise figurent l’ouverture de l’espace Schengen à la Bulgarie et la Roumanie, la définition d’une politique européenne à l’égard des Roms et l’élaboration d’une stratégie danubienne, qui devrait réunir autour de projets communs les pays traversés par le fleuve, de l’Allemagne à la Russie, sorte de pendant oriental à l’Union pour la Méditerranée.

 

Sur ces questions, comme sur l’adhésion des Etats des Balkans, qui touchent à son voisinage direct, la Hongrie entend apporter sa marque et faire valoir son expérience, fondée à la fois sur la géographie et sur l’histoire.