OMC : les cinq atouts du nouveau directeur général brésilien

Désigné le 8 mai comme le nouveau directeur général de l’OMC (Organisation mondiale du commerce), le Brésilien Roberto Carvalho de Azevedo a des atouts pour réussir à débloquer les négociations de Doha pour un accord commercial multilatéral, une tâche à laquelle s’était attelé sans succès son prédécesseur le Français Pascal Lamy. 

C’est officiel : le Brésilien Roberto Carvalho de Azevedo a été choisi par un comité des « sages » de l’OMC pour succéder à compter du 1er septembre au Français Pascal Lamy en poste depuis 2005 avec deux mandats successifs de quatre ans. Pour la première fois l’OMC sera dirigée par un latino-américain. Mais il ne sera pas le premier représentant d’un pays en développement à être à la tête de l’organisation : celle-ci avait eu comme directeur général de 2002 à 2005 le Thaïlandais Supachai Panitchpakdi.

Roberto Azevedo a remporté l’adhésion de la majorité des représentants des 196 pays membres de l’OMC face notamment au dernier challengeur en lice (sur neuf candidats au départ). Le Mexicain Herminio Blanco, avait le soutien des Etats-Unis et de l’UE. Tous deux sont latino-américains, mais ils possèdent des profils bien différents, qui fait de Azevedo un DG idéal pour sortir de l’impasse des négociations de Doha (voir l’article : Les chambres de commerce veulent sortir de l’impasse de Doha http://www.boulevard-exterieur.com/article.php?rubrique=1&ssCat=&id=2348). Le Brésilien dispose en effet de plusieurs atouts pour aboutir à des résultats lors de la prochaine conférence ministérielle de l’OMC qui aura lieu en décembre prochain à Bali.

La voix des pays émergents

Même s’il se défend d’être le candidat des pays émergents et en développement le Brésilien Robert Azevedo a de fait le soutien de ces pays qui représentent la majorité des 196 membres de l’OMC. Non seulement sa candidature est portée par les BRICS (Brésil, Russie, Inde, Chine, Afrique du sud), mais aussi par de nombreux autres pays en développement africains, latino-américains et asiatiques. Pour ceux-ci, Azevedo est le mieux à même de défendre leurs intérêts (agriculture et industries locales) face aux pays développés car il a ferraillé avec succès contre les subventions des Etats-Unis en faveur de leur coton et contre celles de l’Union européenne en faveur de son sucre lorsqu’il dirigeait la délégation du Brésil auprès de l’OMC.

Le poids du Brésil

Le Brésil s’est imposé au cours des dernières années sur la scène politique, diplomatique et économique internationale. Le pays est devenu un partenaire de poids de nombreux pays en développement, particulièrement en Afrique comme le signale un article du Financial Times (http://blogs.ft.com/beyond-brics/2013/05/07/new-boss-of-wto-its-the-brazilian/#axzz2T4cfv3tn). Du coup, cela facilite les échanges avec les petits pays comme avec les plus grands. Et peut contribuer à combler une partie du fossé qui s’élargit entre pays du Nord et pays du Sud. Comme l’a rappelé Azevedo lors de sa conférence de presse de candidat à l’OMC (voir vidéo https://www.youtube.com/watch?v=3C7EFEHvn-w), il a eu lors du Sommet de Davos en janvier dernier des échanges privés avec huit ministres sur deux jours, ce qui montre un bon réseau tissé au fil des années même s’il n’a pas occupé de poste ministériel.

« L’ADN du multilatéral »

Le nouveau DG a le sens des formules. Il a ainsi affirmé que le « multilatéral était son ADN », rapporte le quotidien britannique The Gardian (http://www.guardian.co.uk/global-development/2013/may/03/roberto-azevedo-world-trade-organisation). Ayant passé plus de quinze ans au sein de l’OMC (voir sa biographie complète : http://www.wto.org/english/news_e/news12_e/biography_robertoazevedo_brazil_e.pdf), il a déclaré « respirer ce système, travailler dans ce système et croire en ce système. Du coup, je n’aurais pas besoin d’une période de formation ou d’acclimatation lorsque je deviendrais DG. Je serais un directeur général prêt-à-porter ».

L’expérience

Diplomate de carrière, l’ambassadeur Roberto Azevedo a suivi dès ses débuts en 1984 les questions commerciales. Il suit de même depuis leur départ en 2001 les négociations de Doha pour un accord commercial multilatéral (il est le négociateur en chef de la délégation brésilienne) et a supervisé les discussions pour les accords du Mercosur (communauté économique qui regroupe plusieurs pays d’Amérique du sud). En outre, il est depuis 2008 le représentant permanent du Brésil auprès de l’OMC. Grâce à ces différentes fonctions, Azevedo peut se targuer d’avoir été vu à la manœuvre pour dépasser des blocages par les délégations de tous pays et de toute taille.

Le pragmatisme

Considéré comme un négociateur hors pair, Azevedo sait camper sur ses positions quand il le faut, mais aussi faire des compromis. « Je suis le mieux placé pour faire aboutir le processus des négociations de Doha », affirmait-il lors de sa conférence de presse de candidat. Et à ce sujet, il a déjà une idée sur la méthode à utiliser : être pragmatique et proposer du sur-mesure adapté à chaque situation. « Il est impossible aujourd’hui d’avoir une seule approche globale pour aider les pays en développement à accéder au marché mondial », dit-il. D’où l’idée de revoir certains programmes qui ne sont plus adaptés selon lui comme l’initiative « Aid for trade ».

Et encore plus concrètement, pourquoi ne pas suivre certaines recommandations de la Chambre de commerce internationale (CCI) faites en avril dernier ? Celle-ci avait proposé un accord multilatéral dans des domaines où il y a un consensus comme par exemple la facilitation des échanges commerciaux. Cette approche pragmatique pourrait être discutée dès le Sommet du G20 qui aura lieu du 5 au 6 septembre à Saint Petersburg. Un G20 regroupant des pays en développement et des pays pauvres, dont la création avait été orchestrée…par le Brésil.