Pour une nouvelle politique à l’égard de la Russie

Sur le site Opendemocracy, Donald Rayfield, professeur émérite à l’Ecole des langues modernes de la Queen Mary University de Londres et auteur d’un dictionnaire anglo-géorgien, signe un long article très nuancé sur les relations entre la Russie et la Géorgie. Il suggère aux dirigeants géorgiens de modifier fondamentalement leur attitude pour être mieux à même de résister durablement à Moscou. Source : http://www.opendemocracy.net  

Les trois conseils de Donald Rayfield aux dirigeants géorgiens :

1) regardez ce qui s’est passé en République tchèque qui s’en sort très bien sans la Slovaquie et réciproquement. Regardez la Hongrie qui, à part quelques extrémistes de droite, a abandonné tout espoir de reconquérir la Transylvanie. Acceptez que des territoires puissent être perdus et qu’une nation puisse survivre avec une composition ethnique plus homogène, et même puisse en tirer bénéfice (à condition que ce soit combiné avec la culture d’un nationalisme civique plutôt qu’ethnique).

2) concentrez-vous entièrement sur votre développement économique et social afin de devenir visiblement plus riches, plus libres et plus sûrs que les résidents d’Abkhazie ou d’Ossétie du sud.

3) comprenez qu’il existe autre chose que l’alternative entre la reconquête impossible des territoires perdus et la cession à la Russie. Il y a une troisième hypothèse : reconnaître l’indépendance de l’Abkhazie et de l’Ossétie du sud, offrir des relations diplomatiques, ouvrir les frontières, de telle sorte que ces deux régions puissent regarder vers l’extérieur, vers la Turquie et l’Europe, et pas seulement vers la Russie.

Le conseil s’adresse aussi à l’Occident. L’Otan et l’Union européenne doivent conditionner toute aide à la Géorgie à ces trois principes rationnels et se garder de toute nouvelle rodomontade.

Donald Rayfield : "je ne connais aucun homme politique géorgien qui ait le courage de dire quelque chose dans ce sens sans craindre d’être immédiatement assassiné. Mais si un tel homme ou femme politique n’apparaît pas, ce qui s’est passé en août 2008 se reproduira. Pis, les conséquences seront plus catastrophiques la prochaine fois, car la politique étrangère de la Russie est uniquement fondée sur le principe qu’il vaut mieux être craint qu’aimé ; et le régime russe (Poutine-Medvedev-FSB-armée) semble fermement installé comme le plus grand maître chanteur du monde, au moins jusqu’à ce qu’il n’ait plus de pétrole (…).

L’histoire de la Géorgie est une histoire où des siècles de démembrement ont été suivis par des décennies d’unité. Tout ami de la Géorgie un tant soit peu responsable, doit penser de manière plus radicale et plus réaliste pour inverser le processus et offrir des conseils clairs et francs. Entre temps, on peut espérer qu’une nouvelle génération de Géorgiens, particulièrement ceux qui ont vécu et travaillé à l’étranger, partageront et propageront ce "réalisme radical" dans les mois et les années qui viennent".