Pour Dmitri Trenin, les gouvernements américains successifs ont gâché les chances représentées premièrement par l’effondrement du communisme puis par les attentats du 11 septembre 2001 pour intégrer la Russie dans l’Occident. Faute de se mettre d’accord sur les règles de leurs relations, les Etats-Unis et la Russie courent le risque de tomber dans un conflit majeur.
L’agenda de la sécurité européenne doit être construit de telle sorte qu’il permette de résoudre les divergences ouvertes, y compris le Kosovo et l’Ossétie du Sud, de relancer le contrôle des armements et le cadre de la lutte contre la prolifération nucléaire, et de renforcer une approche commune des questions du Moyen-Orient et du terrorisme.
Voici ses principales conclusions :
- les Etats-Unis doivent éviter de retourner à une politique de guerre froide – la Géorgie n’est pas l’Allemagne et la Russie n’est pas l’URSS ;
- Les tensions entre les Etats-Unis et la Russie convergent vers l’Ukraine, qui est importante à la fois pour l’Europe et pour la Russie. L’intégration dans l’Union européenne, et non dans l’OTAN, est la meilleure manière de garder une Ukraine libre et prospère ;
- L’OTAN a atteint les limites « saines » de son expansion vers l’Est. Tout mouvement en direction de la Géorgie ou de l’Ukraine serait dangereux ;
- La Russie doit être traitée comme un partenaire égal au Moyen-Orient et en Afghanistan ;
- La politique intérieure russe est l’affaire de la Russie. Le capitalisme continuera à transformer le paysage politique mais cela prendra des générations, pas des décennies. Et une Russie démocratique ne signifierait pas automatiquement qu’elle serait plus pro-américaine ou plus malléable.
Dmitri Trenin conclut : « L’idée selon laquelle il faudrait deux guerres froides pour résoudre la question russe comme il a fallu deux guerres mondiales pour résoudre la question allemande correspond peut-être à l’expérience américaine mais elle est trompeuse et dangereuse – y compris pour les Etats-Unis. Pour réussir, la politique américaine vis-à-vis de la Russie doit partir des réalités, non des mythes du passé ou des rêves de l’avenir. Elle exige du courage. Les développements récents dans le Caucase et au-delà peuvent représenter un moment de vérité qui pourrait débarrasser de ces scories la pensée américaine sur la Russie et finalement aider à produire une stratégie digne de ce nom. »