Pour porter secours aux victimes des catastrophes naturelles ou industrielles, la France préconise la création d’une force européenne de protection civile. En mai 2006, chargé d’une mission de réflexion par la Commission européenne et par la présidence autrichienne de l’UE, l’ancien commissaire et ancien ministre des affaires étrangères français Michel Barnier avait proposé la création d’une telle force. Malgré l’appui de la France, ce projet n’emporte pas l’adhésion des 27 Etats membres. En décembre 2004, le tsunami qui avait frappé plusieurs pays d’Asie du Sud-Est avait fait apparaître la faiblesse de l’Europe. M. Barnier distingue sept grands risques : les tremblements de terre et les tsunamis, les incendies et les feux de forêts, les inondations et les glissements de terre, les accidents industriels et nucléaires, les attaques terroristes, les catastrophes maritimes, les grandes pandémies.
Une clause de solidarité entre les Etats membres
L’Union européenne n’a certes pas attendu M. Barnier pour s’intéresser à ces questions. Un office d’aide humanitaire, baptisé ECHO, a été créé en 1992 puis un mécanisme communautaire de protection civile a été mis en place au sein de la Commission européenne en 2001. Le traité constitutionnel, en 2003, a inscrit parmi les politiques de l’UE la prévention des catastrophes naturelles et la protection civile. Il a également institué une clause de solidarité entre les Etats membres en cas d’attaque terroriste ou de catastrophe naturelle. Ces dispositions ont été reprises dans le traité de Lisbonne.
Bref les institutions européennes ne sont pas restées inactives et elles l’ont prouvé en diverses circonstances, en Europe même ou hors d’Europe. Toutefois l’idée d’une force européenne spécialisée, gérée par un centre opérationnel, va nettement plus loin. Elle vise à substituer aux initiatives spontanées, prises dans l’urgence par les Etats membres et coordonnées à la hâte par la Commission, une organisation plus structurée. « L’addition des réponses individuelles n’est pas équivalente à une réponse européenne planifiée », explique M. Barnier.
Pour une « mutualisation » des moyens
Il ne s’agit pas de créer à Bruxelles une institution centralisée qui déposséderait les Etats membres de leur responsabilité, précise l’ancien commissaire, mais d’assurer la « mutualisation » des moyens existants pour améliorer à la fois la cohérence du dispositif et la visibilité de l’UE. Les Etats pourraient se spécialiser, seuls ou en coopération avec d’autres, dans la gestion d’un ou plusieurs risques, en acceptant de financer et d’entretenir les éléments correspondants de la force européenne. Par exemple les pays du Sud pourraient choisir d’unir leurs efforts dans la lutte contre les incendies. Un Institut de formation permettrait d’envisager, à terme, la constitution d’un corps européen.
Ce projet, qui mise sur la « valeur ajoutée » de l’Europe, suscite la méfiance de plusieurs Etats qui entendent, comme la Grande-Bretagne, conserver leur souveraineté dans ce domaine ou, comme l’Allemagne, ménager le pouvoir des Länder. Trois ans après la publication du rapport, la force européenne dont M.Barnier souhaitait la mise en place dans un délai de quatre ans, soit à partir de 2010, n’est pas près de voir le jour.
Priorité à « l’assistance mutuelle européenne »
La France a pourtant repris à son compte les idées de son ancien ministre des affaires étrangères et tenté de les faire avancer au cours de sa présidence européenne du second semestre 2008. Elle n’a obtenu qu’un succès limité. Face aux réserves de ses partenaires, elle a renoncé à l’idée d’une force européenne pour se contenter de promouvoir « l’assistance mutuelle européenne », c’est-à-dire le renforcement du mécanisme actuellement en vigueur. Favorable à un dispositif « souple » et « respectueux des compétences des Etats membres », elle a suggéré le développement de « modules européens de protection civile » dans les pays qui le voudraient, autrement dit d’équipes spécialisées dans une mission particulière et prêtes à intervenir. Treize modules ont été identifiés, parmi lesquels le pompage haute capacité, la purification de l’eau, la lutte contre les feux de forêts par hélicoptère, la lutte contre les forêts de forêts par avion, l’évacuation aérienne médicalisée, le sauvetage en situation de risques nucléaires, radiologiques et bactériologiques.
Les attentats de Mumbai/Bombay en novembre 2008 ont été l’occasion pour les Vingt-sept d’affirmer leur volonté de mieux coordonner leurs actions mais on est loin du corps de sauveteurs européens imaginé par M. Barnier. Celui-ci ne perd pas espoir. Il a proposé la formation d’une force de réaction rapide contre les incendies. L’idée est toujours d’actualité.