L’optimisme de Bernard Kouchner correspond à un sentiment qui se répand aux Etats-Unis, surtout bien sûr dans les milieux proches de l’administration Bush qui ont soutenu la guerre en Irak. C’est le message que fait aussi passer John McCain, le candidat républicain à la présidence. Mc Cain entonne d’autant plus volontiers ce discours qu’il peut se targuer d’avoir été parmi les premiers, au début de l’année dernière, à proposer une augmentation – provisoire – du contingent américain en Irak. Ce qu’on a appelé le « surge » (la poussée). Le mensuel The American Interest, qui rassemble des intellectuels proches des républicains comme des démocrates, a titré en « une » le mois dernier : « Et si nous étions en train de gagner ? »
Le sentiment du ministre des affaires étrangères n’est donc pas isolé. Mais la question posée par ses déclarations est autre : que peut faire la France en Irak ? Après avoir condamné la guerre, elle court le risque de se retrouver à l’écart de la reconstruction. Il n’est donc pas anormal qu’elle vise à retrouver la place à la fois politique et économique qu’elle occupait en Irak avant la chute de Saddam Hussein.
Toutefois cette approche n’est pas sans risques. Quel que soit le vainqueur des élections de novembre, le prochain président des Etats-Unis cherchera à impliquer les Européens en Irak. Ses arguments seront d’autant plus forts que la situation sur le terrain sera moins tendue et qu’il aura amorcé un retrait des forces américaines. Les Européens et les Français en particulier, qui critiquent depuis des années la politique de Bush, pourront-ils résister à l’appel de son successeur, sans avoir vraiment leur mot à dire sur la nouvelle stratégie ?