UE : bilan provisoire de la présidence française

La présidence française de l’Union européenne a encore près de deux mois devant elle. Il est sans doute trop tôt pour en tirer un bilan exhaustif mais des enseignements peuvent d’ores et déjà être tirés de cette « présidence de crise ».

Première leçon des six mois de présidence française : l’Europe a manifesté une réaction aux événements qu’elle n’avait pas montrée jusqu’alors. Le mérite en revient en grande partie à Nicolas Sarkozy, qui, par tempérament, peut difficilement se contenter d’attendre les échéances européennes habituelles avant d’agir. Le président de la République a bouleversé le calendrier des réunions, convoqué des conseils des chefs d’Etat et de gouvernement dans diverses formations, depuis le G4 (les quatre membres européens du G8) jusqu’aux vingt-sept en passant par le G15 (les quinze pays de la zone euro). Sans trop se soucier de l’avis de ses partenaires, il a pris des décisions qu’il a fait entériner a posteriori.

La Commission en retrait

La seconde leçon concerne l’équilibre entre les diverses institutions européennes. Le Conseil européen et la Banque centrale européenne sortent renforcés des deux crises de l’été, la guerre russo-géorgienne et la crise financière. La Commission de Bruxelles, en revanche, a joué un rôle plutôt effacé, soit parce que ses membres ont été pris de court, soit parce qu’en tant qu’institution, elle était moins bien placée que d’autres pour intervenir. C’est surtout vrai de la crise du Caucase qui concerne la politique extérieure, pour laquelle elle n’est pas compétente. Le traité de Lisbonne, s’il est ratifié, lui donnera plus de pouvoirs dans ce domaine, avec la fusion des fonctions de Haut Représentant pour la politique extérieure et de sécurité commune et celles de Commissaire pour les relations extérieures. Pour le moment, la Commission est en retrait.

Renforcement de la BCE

Ce n’est pas la première fois que la séparation des pouvoirs entre le Conseil et la Commission est mise en évidence. Mais les événements de ces dernières semaines n’ont pas provoqué un énième débat entre l’intergouvernemental (le Conseil) et le communautaire (la Commission). En effet, la BCE, institution supranationale par excellence, a tiré elle aussi son épingle du jeu. Non seulement elle a joué un rôle essentiel dans la gestion de la crise financière, et pas seulement pour la zone euro stricto sensu, mais son président a été associé à toutes les réunions des chefs d’Etat et de gouvernement. Autrement dit, le « dialogue » que la France réclame depuis longtemps entre les responsables politiques et les autorités monétaires a eu lieu sans que les institutions aient été formellement réformées et sans que la sacro sainte indépendance de la banque centrale ait été entamée.