UE : que faire avec les pays voisins de la Russie ?

Pour stabiliser son environnement, l’UE n’avait jusqu’à maintenant pas trouvé de meilleur moyen que de proposer l’adhésion aux Etats qui le veulent et qui le peuvent. La perspective de l’entrée dans l’UE a été depuis la chute du mur de Berlin le moteur le plus puissant pour les réformes politiques et économiques dans les anciens pays communistes d’Europe centrale. Mais aujourd’hui le contexte a changé.

Lundi 8 septembre, Nicolas Sarkozy, accompagné par le président de la Commission de Bruxelles José Manuel Barroso et par le Haut représentant pour la politique extérieure commune Javier Solana, se rend à Moscou et à Tbilissi. Le lendemain se tient à Evian le sommet Union européenne-Ukraine. Par les hasards du calendrier -mais est-ce vraiment une coïncidence ? -, l’Union européenne se trouve confrontée deux jours de suite au plus grand défi de sa nouvelle "politique de voisinage", c’est-à-dire les rapports qu’elle entretient avec les voisins immédiats de la Russie, comme la Géorgie et l’Ukraine.

Ne pas froisser Moscou

La nouvelle politique de voisinage met entre parenthèses la question de l’élargissement de l’UE. Après l’échec du projet de Constitution européenne, attribué pour une grande part aux craintes des citoyens, en particulier néerlandais et français, face à un élargissement sans fin de l’Union, l’UE a voulu maintenir des incitations à la réforme sans pour autant déboucher inéluctablement sur une adhésion (comme le disait l’ancien président de la Commission de Bruxelles, « tout sauf les institutions  »). C’est le premier avantage de la "nouvelle politique de voisinage". Le second est qu’elle s’adresse essentiellement à des Etats qui ont une frontière commune avec la Russie, voire qui sont d’anciennes républiques de l’ex-URSS que Moscou ne verrait pas d’un bon œil dans l’UE.

Ces deux avantages ont aussi des inconvénients. Le premier est que la politique de voisinage ne satisfait pas totalement les aspirations des pays concernés. Ou bien ceux-ci la conçoivent comme une étape vers l’adhésion, ce qui repousse le problème sans le résoudre, ou bien ils la considèrent comme une voie de garage, ce qui ne les incite pas à mener à bien les réformes promises.

Le deuxième inconvénient concerne les relations avec Moscou. La politique de voisinage touche des Etats qui, selon le Kremlin, appartiennent à sa zone d’influence. L’UE ne peut donc pas ignorer les conséquences de son expansion sur ses relations avec la Russie. Elle le peut d’autant moins après la guerre russo-géorgienne. Les élargissements précédents, en direction de l’Europe centrale et des Etats baltes, se sont produits dans un contexte relativement favorable. Ces pays avaient plus ou moins réglé leurs problèmes de minorités et la Russie était encore dans un état de faiblesse qui ne lui permettait pas de s’opposer à l’avancée européenne.

Equilibrisme

Ces deux conditions n’existent plus aujourd’hui. Les pays concernés par la politique de voisinage et une éventuelle adhésion frappent à la porte de l’Europe alors qu’ils sont impliqués dans des conflits « gelés » ou ouverts et que le régime de Vladimir Poutine veut reconstruire autour de la Russie une couronne d’Etats vassaux censés garantir la sécurité de ses frontières. Bruxelles entre directement en concurrence avec Moscou. D’où l’exercice d’équilibrisme auquel se livre Nicolas Sarkozy entre Moscou, Tbilissi et Kiev car il ne peut rassurer les uns sans inquiéter les autres.