Un "partenariat oriental" pour freiner l’élargissement de l’UE

L’Union européenne cherche désespérément les moyens d’apaiser les appétits des pays voisins sans poursuivre sur la voie d’un élargissement illimité.

Après la « nouvelle politique de voisinage » mise en place après le big bang de 2004 qui a vu l’entrée de dix nouveaux Etats, suivis par la Bulgarie et la Roumanie en 2007, les Vingt-sept viennent d’inventer « le partenariat oriental ». Il s’agit d’une offre de coopération renforcée adressée à six pays situés aux marches de l’Europe : l’Arménie, l’Azerbaïdjan, la Géorgie, la Moldavie, l’Ukraine et la Biélorussie, quand celle-ci se sera débarrassée de l’autocrate Loukachenko. L’UE a mis 600 millions d’euros sur la table pour la période 2010-2013, en réalité un peu plus de la moitié de cette somme, car l’autre moitié était déjà prévue par la politique de voisinage.

Les Européens poursuivent ainsi plusieurs objectifs. Ils veulent d’abord montrer à ses anciennes républiques de l’Union soviétique qu’ils les considèrent comme faisant partie de l’Europe. Mais en envoyant ce signal, ils tiennent en même temps compte de l’opposition de la Russie à un élargissement des institutions occidentales dans ce qu’elle considère toujours comme sa zone d’influence. Cette opposition est certes plus affirmée contre l’extension de l’OTAN vers les frontières russes. Mais elle concerne aussi l’UE dans la mesure où celle-ci encourage les réformes démocratiques et est conçue, au moins dans certains milieux politiques russes, comme l’antichambre voire un prolongement de l’OTAN.

Du point de vue de l’UE, ce degré supplémentaire dans la coopération avec les voisins permet d’éviter les limites de l’élargissement qui divisent les Vingt-Sept. Schématiquement, les Britanniques, qui n’ont pas le souci d’approfondir l’intégration européenne, sont en faveur de cet élargissement. D’autres, comme les Français, sont beaucoup plus réticents. En arrivant au pouvoir, Nicolas Sarkozy a convaincu ses partenaires de créer un "Comité de Sages" pour définir l’identité et donc les frontières de l’Europe, un élargissement sans fin lui paraissant la négation d’un Europe-puissance. Ce raisonnement vaut pour lui non seulement pour ces anciennes républiques soviétiques mais pour la Turquie à laquelle il propose un « partenariat renforcé ».

Le « partenariat » oriental suffira-t-il à calmer les ardeurs européennes des pays concernés ? Rien n’est moins sûr. Car l’UE fait face à un dilemme. L’élargissement, qui a permis la stabilisation et la démocratisation de son environnement, se heurte à l’hostilité d’une grande partie des opinions publiques européennes et nourrit le sentiment de rejet constaté lors des divers référendums, de la France à l’Irlande. En même temps, il est le meilleur instrument de la politique étrangère de l’UE qui a réussi, mieux que la promotion de la démocratie à la mode américaine, à « exporter la démocraties » dans son voisinage. Cette politique semble avoir atteint ses limites avant d’avoir rempli tous ses objectifs. C’est cette quadrature du cercle que « le partenariat oriental » est censé résoudre.