Une coalition sans cohésion

Le gouvernement "Merkel II", inauguré en octobre dernier, devait sceller les retrouvailles naturelles entre les chrétiens-démocrates (CDU/CSU) et les libéraux (FDP). Dans les faits, on assiste surtout à des dissensions permanentes entre les partis au pouvoir.

Le début du deuxième gouvernment d’Angela Merkel a été plutôt agité. Un mois à peine après la formation du gouvernement (fin octobre), le ministre du travail, M. Jung, a dû démissionner, assumant sa responsabilité antérieure en tant que ministre de la défense pour les dégâts politiques de „l’affaire Kunduz“, autrement dit le bombardement en Afghanistan, sur ordre d’un colonel allemand, d’un groupe de talibans entourés de „civils“, en apparente violation des règles d’opération de l’Otan, causant 140 morts.

Désormais, le jeune nouveau ministre de la défense Karl-Theodor zu Guttenberg, le ministre le plus populaire du gouvernement Merkel, se trouve dans l’obligation de rouvrir le „dossier Kunduz“ en réponse aux questions d’une enquête parlementaire qui va commencer ses travaux le 21 janvier. Une telle enquête, menée selon les règles d’une procédure pénale, risque toujours d’apporter son lot de surprises. En tout cas, le pays va connaître un débat public sur sa politique d‘engagement militaire en Afghanistan, débat que les majorités diverses ont toujours cherché à éviter alors que l’envoi de troupes en Afghanistan trouve de moins en moins de soutien au sein de la population. Il est possible que l’enquête s’enlise et donne lieu à une multitude d’exploitations politiciennes à l’approche des élections régionales en Rhénanie du Nord-Westphalie le 9 mai – élections qui peuvent enlever à la coalition, en cas de défaite de la coalition CDU/FDP, sa majorité au Bundesrat, la deuxième chambre législative au niveau fédéral. Mais il est possible aussi qu’elle ajoute encore aux ennuis du gouvernement « Merkel II » si M. zu Guttenberg n’en sort pas complètement indemne, bien que cette affaire ne soit pas „son affaire“, mais celle de son prédécesseur Jung. Et si la responsabilité de M. Jung s’avère plus importante, la chancelière sera alors directement exposée aux conséquences de cette affaire.

Deuxième sujet qui occupe les esprits : le débat sur la réduction des impôts, qui est loin d’être clos. Le FDP continue de répéter que la coalition vise une réforme fiscale et une baisse d’impôts importante à partir de 2011, peut-être 2012. La CDU, son ministre des finances M. Schäuble et les chefs de gouvernements régionaux (y compris ceux qui forment une coalition avec le FDP) continuent de répéter que la coalition s’était mis d’accord sur une réforme fiscale „si possible à partir de 2011“ et si l’état des finances le permet. Les représentants des deux partenaires continuent de prétendre d’être d’accord alors qu’ils ne le sont pas.

Comme par hasard, un sondage vient d’être publié qui dit qu’une grande majorité d’Allemands n’est pas du tout en faveur d’une réduction d’impôts. Dans le même temps, l’électorat du FDP semble déçu car le score du parti libéral dans les sondages baisse, tout comme la popularité de leur chef, le ministre des affaires étrangères Guido Westerwelle. On devine dans quel sens la chancelière va trancher ce contentieux prétendument „inexistant“.

Restent les inquiétudes au sein de la CDU qui n’a toujours pas digéré son résultat électoral de septembre, son plus mauvais score fédéral depuis 1949. Certains plaident pour un virage à droite de la CDU. Mme Merkel a pu, pour l’instant, rétablir la confiance autour d’elle. Mais y avait-il un autre choix possible pour l’instant ?

La coalition „noire-jaune“ qui avait été tellement saluée comme la coalition naturelle des deux formations dites „bourgeoises“ (CDU/CSU et FDP), est d’une tout autre nature que la dernière coalition „noire-jaune“ dirigée par le chancelier Kohl. Mme Merkel aurait bien aimé continuer à gouverner avec le SPD. Avec un SPD affaibli et en état de longue convalescence, avec un FDP qui aura du mal à maintenir son bon score obtenu en 2009, avec une CSU en Bavière qui cherche à retrouver son âme et un électorat perdu, la CDU, réduite elle-même à 33%, doit chercher de développer de nouvelles options. Cela va prendre du temps.