Une stratégie de remplacement pour l’Afghanistan

Gilles Dorronsoro, professeur de sciences politiques à la Sorbonne, actuellement chercheur à la Fondation Carnegie à Washington, critique la stratégie menée par l’OTAN en Afghanistan et propose une porte de sortie. Source : www. carnegieendowment.org   

Voici les principales conclusions de son étude :

« Après sept ans de guerre, la communauté internationale n’a pas réussi à créer les conditions d’un Etat afghan stable. La vérité est que la coalition internationale a des ressources limitées et ne dispose que de peu de temps pour créer des institutions afghanes durables. Pourtant, construire de telles institutions est la seule stratégie de sortie réaliste.

Le débat à Washington et dans les capitales européennes s’est récemment focalisé sur le nombre de forces supplémentaires qui devaient être envoyées en Afghanistan cette année pour le surge militaire. Un tel ajustement tactique a peu de chance de faire la différence dans un pays où le ratio population-forces internationales est déjà très élevé (1 soldat pour 430 habitants).

La vraie question est le nombre de troupes combattantes disponibles. Le choix est soit de continuer une stratégie offensive en menant la chasse aux talibans, en particulier dans le sud et dans l’est, et d’y disperser des forces ; soit d’adopter une nouvelle stratégie se concentrant sur la protection de sites stratégiques, c’est-à-dire, les centres urbains et les routes-clés, afin de permettre le développement d’un noyau dur d’institutions afghanes.

- Les objectifs en Afghanistan doivent être mesurés aux ressources disponibles pour les atteindre ;

- C’est la présence même de soldats étrangers menant la guerre en Afghanistan qui est probablement le facteur principal expliquant la résurgence des talibans ;

- Le principal objectif politique devrait être de laisser un gouvernement afghan capable de survivre à un retrait américain ;

- La stratégie devrait faire la différence entre trois régions et allouer les ressources en fonction de ce choix : les villes stratégiques et les communications qui doivent être sous le contrôle total des forces afghanes et de la coalition internationale ; des zones tampons autour des lieux stratégiques, où l’OTAN et l’armée afghane devraient se consacrer à la lutte contre les insurgés ; et les territoires contrôlées par l’opposition, où l’OTAN et les forces afghanes ne gaspilleraient pas leur énergie et leurs moyens ;

- Le retrait permettrait aux Etats-Unis de se concentrer sur le problème central de sécurité dans la région, à savoir Al Qaïda et l’instabilité au Pakistan.