Le dernier traité de réduction des armements nucléaires de la guerre froide, ou le premier de l’après-guerre froide, le traité START pour Strategic Arms Reduction Treaty, a expiré le 5 décembre. Il avait été signé le 31 juillet 1991 par le premier président George Bush et par Mikhaïl Gorbatchev, alors président de l’URSS finissante. Il était entré en vigueur le 5 décembre 1994, pour une durée de quinze ans. Lors de leur première rencontre, à Londres, les présidents Obama et Medvedev s’étaient promis de conclure un nouveau traité de réduction des armements avant la date fatidique. Diplomates et militaires russes et américains négocient depuis des semaines à Genève mais ne sont pas parvenus à un accord en temps et en heure. La secrétaire d’Etat Hillary Clinton et le ministre russe des affaires étrangères, qui se sont rencontrés au nord du lac Léman, ont déclaré que le nouveau traité serait prêt « le plus tôt possible », en tous cas avant la fin de l’année.
Si un accord est trouvé, le nouveau texte n’entrera pas en vigueur avant plusieurs mois, après la ratification par la Douma russe et par le Sénat américain, où Barack Obama a besoin de la majorité des deux tiers (67 voix) soit de l’appui de quelques sénateurs républicains. Entre temps, un texte provisoire devrait couvrir la période de transition.
Les deux parties sont d’accord sur une diminution des plafonds autorisés pour la possession de têtes nucléaires et de vecteurs pouvant les transporter. Pour les premières, la limite serait fixée entre 1500 à 1675 contre 2200 actuellement ; pour les seconds de 500 à 1100 contre 1600 aujourd’hui, qu’il s’agisse des missiles intercontinentaux, des sous-marins ou des bombardiers stratégiques. Ces chiffres représentent les plus bas niveaux depuis un demi-siècle. Aux Etats-Unis, les républicains sont réticents à accepter une diminution du nombre des vecteurs, car ils estiment que ces véhicules peuvent aussi être équipés d’armes classiques.
Mais la pierre d’achoppement entre Moscou et Washington porte sur les contrôles et les vérifications. Les Russes souhaiteraient des contrôles moins stricts que dans le premier accord START. Les contrôleurs américains viennent de quitter une base russe de production des missiles balistiques sol-sol Topol-M (SS-27 dans la nomenklature de l’OTAN) et Bulava (SS-26), à la suite de l’expiration du traité et les Russes ne veulent pas les voir revenir car il n’y a plus de contrôleurs russes aux Etats-Unis, ces derniers ne fabriquant plus de missiles sol-sol. Mais la question des contrôles et des vérifications sera certainement décisive au moment de la ratification par le Sénat.
Barack Obama aurait souhaité que le projet de nouveau traité soit prêt avant la date d’expiration du précédent afin de pouvoir se prévaloir d’un succès dans sa politique en faveur du désarmement dans son discours d’acceptation du prix Nobel de la paix, jeudi 10 décembre. Les Russes ne lui ont pas fait ce plaisir. Mais le président américain a des objectifs à plus long terme, portant à la fois sur des réductions plus drastiques des armements nucléaires, englobant aussi bien les armes nucléaires tactiques que les vecteurs en réserve qui ne sont pas comptabilisés par START. Selon un de ses conseillers, le président viserait un plafond de 1000 têtes, tous types d’armes confondus. Pas essentiel vers une nouvelle stratégie nucléaire qui n’abolirait pas l’arsenal des grandes puissances du jour au lendemain mais qui, avec la lutte contre la prolifération, la ratification du CTBT (le traité sur l’interdiction de tous les essais nucléaires), serait une étape vers le monde dénucléarisé que Barack Obama a appelé de ses vœux au printemps dans son discours de Prague.