Il a défendu son programme phare : la réforme d’un système de santé qui laisse 46 millions d’Américains sans assurance et dont le coût monte de façon vertigineuse.
Obama a perdu l’initiative de la réforme pendant l’été. Son parti est divisé entre modérés, opposés au déficit, et progressistes, tenants d’une politique sociale. Les républicains, sentant la faiblesse du président, ont foncé, claironnant que l’échec de la réforme serait son « Waterloo ».
Falsifications
Ce qui dérange, dans cette bataille, c’est la crédulité du public, prêt à croire les évidentes falsifications des intentions du président répandues dans les medias omniprésents. On va jusqu’à dénoncer un projet « socialiste » qui priverait le public du droit de choisir son médecin.
Comment en est-on arrivé là ? Barack Obama a été élu comme le candidat qui dépasserait les divisions partisanes, aggravées par les années Bush. Ses grands discours, comme sa personne elle-même, faisaient rêver d’un pays uni qui allait enfin réaliser le rêve démocratique des pères fondateurs.
C’est d’abord cette promesse qui l’a fait élire. Elle faisait de son opposant une sorte de menace pour l’unité nationale. Mais, une fois Obama élu, l’argument se retournait, car on ne peut pas être bipartisan tout seul ! Le jeu des républicains devenait alors très simple : il fallait s’opposer à tout ce que proposait « Washington », car ce gouvernement prétendait incarner tout seul l’unité nationale, ce qui était évidemment impossible. Une réaction populiste était inévitable.
"Socialisme"
C’est ainsi que l’accusation de « socialisme » pouvait mordre et que les plus folles déformations trouvaient un écho chez un public déjà angoissé par la situation économique et fatigué par une guerre qui dure depuis huit ans. Après tout, la crainte d’une mainmise gouvernementale sur les droits du citoyen est aussi ancienne que la révolution américaine.
Comment Obama peut-il s’en sortir ? Il faut d’abord qu’il reconnaisse la faille de son argumentaire : la politique vit de la concurrence, elle doit prendre en compte la légitimité de la division, ce qui veut dire : admettre que sa propre politique est elle aussi partisane. Pour faire passer la réforme, il faut désormais définir un programme, puis convaincre le public de sa validité.
Concrètement, le Président devra naviguer entre deux voies, celle du compromis et celle de l’attaque frontale. Ceux qui soutiennent le compromis - surtout à propos d’une police d’assurance garantie et financée par le gouvernement (« public option ») - se réfèrent au grand leader libéral récemment décédé, Ted Kennedy. Il a dit que son plus grand regret politique fut d’avoir refusé une proposition de compromis sur la réforme, offerte en 1972 par le républicain Richard Nixon.
L’ombre de Roosevelt
Ceux qui prônent l’attaque invoquent une autre icône libérale, Franklin Roosevelt, qui devait, lui aussi, faire face à des opposants prompts à déformer ses propos et à discréditer ses initiatives. Dans un discours d’octobre 1936, Roosevelt contre-attaquait : « Ils sont unanimes dans leur haine envers moi et j’accepte avec plaisir cette haine. » Et, poursuivait-il, voici notre programme, voici nos promesses, voici notre promesse du renouveau. Autrement dit, « Yes we can » comme slogan de campagne, n’a pas été inventé par Barack Obama en 2008.
On peut noter tout de même que le discours de Roosevelt, en 1936, faisait allusion aussi à « l’ombre » de guerre qui pesait sur le monde. Barack Obama n’a pas parlé de l’Afghanistan. C’est plus qu’une ombre qui plane sur l’avenir de son gouvernement...