Six interrogations sur les élections

Les Allemands votent le dimanche 22 septembre pour renouveler le Bundestag. Le nombre de députés est théoriquement de 598 mais le mélange de système majoritaire à un tour et proportionnel (chaque électeur dispose de deux voix) peut amener à créer des sièges supplémentaires. Ceci dans le cas où un parti a plus d’élus directement dans les 299 circonscriptions que le nombre de députés auxquels lui donnerait droit son pourcentage de voix obtenu à la proportionnelle. Au soir du scrutin, six points seront à surveiller.

Une majorité pour la coalition sortante ? Les derniers sondages laissaient entrevoir un résultat très serré. La coalition entre la démocratie chrétienne et les libéraux n’était pas assurée d’avoir la majorité absolue. En revanche la CDU-CSU semble assurée d’arriver en tête, ce qui devrait permettre à Angela Merkel de rester à la chancellerie.

Le score du FDP : Ce serait d’autant plus vrai que le Parti libéral (FDP) échouerait à franchir la barre des 5% nécessaires pour avoir des députés au Bundestag. Les sondages le créditaient de 5% des voix, avec une marge d’erreur de deux points, qui laissait le suspens entier. Après sa déroute aux élections régionales de Bavière, le 15 septembre, où il a obtenu 3%, le FDP a fait campagne pour que des électeurs de la CDU lui « prêtent » leur deuxième voix afin d’assurer une majorité à la coalition. Cela s’est produit plusieurs fois dans le passé, avec la CDU comme avec les sociaux-démocrates. Mais aujourd’hui la CDU n’avait pas de voix à « gaspiller ».

Le sort des Verts : Après avoir atteint des sommets (quelque 25%) dans les enquêtes d’opinion après la catastrophe de Fukushima, les Verts sont tombés dans les intentions de vote, parfois sous la barre des 10%, ce qui serait pour eux une immense déconvenue. Leur - programme prévoyant une augmentation des impôts pour les Allemands les plus riches - a été mal reçu et la polémique sur leur défense de la pédophilie dans les années 1970-1980 leur a nui dans les derniers jours de la campagne.

L’avenir du nouveau parti Alternative pour l’Allemagne (AfD) : C’est le parti des eurosceptiques qui a fait campagne pour la sortie de l’Allemagne de la zone euro, le retour au deutschemark et une coopération plus étroite avec la Russie qu’avec la France. Son score est la grande inconnue du scrutin car c’est un nouveau venu sur la scène politique allemande et les sondeurs ont du mal à évaluer son impact. Les dernières enquêtes lui donnaient 4% mais il n’était pas exclu qu’il franchisse le seuil de 5% et envoie des députés au Bundestag. Dans cette hypothèse, le paysage politique serait de plus en plus compliqué avec six partis représentés au Parlement fédéral et une coalition plus difficile à mettre sur pied. Dans la mesure où l’AfD devait prendre des voix à la CDU et au FDP, la reconduction de la coalition sortante serait quasiment impossible.

Un succès de l’AfD marquerait une césure dans la position de l’Allemagne vis-à-vis de l’intégration européenne. Jusqu’à maintenant les Allemands pouvaient se montrer parfois réservés par rapport à une Europe qui leur parait coûter trop cher, mais jamais ils n’ont fait entrer au Bundestag un parti ouvertement eurosceptique.

Une grande coalition, avec quel SPD ? Une coalition entre la démocratie chrétienne et la social-démocratie serait assurée d’avoir une majorité écrasante au Bundestag. Ce n’est pas le premier choix d’Angela Merkel, tandis que Peer Steinbrück, qui a été son ministre des finances dans le gouvernement de grande coalition entre 2005 et 2009 a exclu d’être l’adjoint de la chancelière. Mais ce sera peut-être la seule combinaison capable d’avoir une majorité, avec un vice-chancelier social-démocrate autre que Peer Steinbrück.

Des deux côtés on a implicitement posé des conditions. Le SPD ne s’alliera pas à la CDU-CSU sans que l’instauration d’un salaire minimum légal pour toute l’Allemagne soit décidée. Angela Merkel a exclu une « communautarisation » des dettes en Europe et la création d’eurobonds. Sur beaucoup d’autres sujets, les positions des deux camps ne sont pas aussi éloignées mais les négociations promettent d’être longues si la grande coalition apparait comme la seule solution.

De nouvelles élections ? La Constitution ne les exclut pas mais les rendent très difficiles. Le cas ne s’est jamais produit. Tout au plus certains chanceliers ont utilisé des artifices pour provoquer des élections anticipées (Helmut Kohl en 1982, Gerhard Schröder en 2005). Ce serait certainement le dernier recours après que toutes les autres solutions auraient été épuisées.