Ecrit alors qu’il venait de subir un quintuple pontage coronarien en 2007, le témoignage du prince Hicham du Maroc a mis plus de six ans à voir le jour. C’est dire combien il a été mûri et remanié pour mieux toucher ses différentes cibles.
Froissé avec le successeur de Hassan II dès sa prise de pouvoir en juillet 1999, Moulay Hicham Ben Abdallah, réside de manière permanente en Californie s’autorisant des retours au Maroc pour certaines occasions, mais sans avoir de rôle à la cour où sa présence n’est pour le moins guère désirée.
Fils aîné de Moulay Abdallah el Alaoui, frère cadet de Hassan II, il a grandi auprès du futur Mohammed VI dont il a été très proche. Proche également de Hassan II, qui a veillé de près à son éducation après la mort prématurée de Moulay Abdallah en 1983, Moulay Hicham s’est très tôt opposé à l’autoritarisme de Hassan II tout en l’admirant pour son rôle dans le positionnement géopolitique du Maroc et pour l’ouverture qu’il a instituée en intégrant les partis nationalistes de gauche dans le jeu politique marocain durant les dernières années de son règne.
Etonnant face-à-face avec Hassan II dans la première partie de l’ouvrage, la deuxième partie se mue en un face-à-face plus cruel encore avec son cousin Mohammed VI avec lequel la rupture est consommée.
« A la recherche d’un monde arabe plus démocratique », Hicham Ben Abdallah el Alaoui, particulièrement inquiet du déficit de gouvernance au Maroc, des inégalités économiques qui s’approfondissent, des blocages sociaux qui se perpétuent, il propose un programme de démocratisation qui passe par l’établissement d’une monarchie constitutionnelle et la destruction du système de la cour, le « Makhzen », ainsi qu’une solution au problème du Sahara occidental dont l’autodétermination passe, selon lui, par une démocratisation du royaume.
« Il faut transformer la maison des Alaouites, dont je suis issu et que je ne renie pas, en un temple populaire et démocratique. Non pas pour que la monarchie survive, mais pour que le Maroc perdure », écrit Moulay Hicham en conclusion, affirmant : « Nous sommes tous, qu’on le veuille ou non, des fils de Hassan II. Pour moi, cela veut dire que, pour faire du neuf sans casse, il faut savoir transformer le vieux. Hassan II l’a fait à la fin de son règne. […] En revanche, pour avoir créé le vide autour de lui, ou le trop plein de copains incapables, ce qui revient au même, Mohammed VI risque d’entraîner le pays dans sa chute ».
Une lecture indispensable pour ceux qui se préoccupent de l’avenir de la rive sud de la Méditerranée.